Une scène glaçante s’est déroulée jeudi 24 avril à Nantes, dans l’enceinte du collège-lycée privé Notre-Dame-de-Toutes-Aides. À l’heure du déjeuner, aux alentours de 12h30, un lycéen du nom de Justin P. a perpétré une attaque au couteau d’une rare violence, visant quatre élèves, dont une jeune fille de 15 ans qui n’a pas survécu. Le bilan est lourd : un décès et trois blessés. Mais au-delà de l’horreur de l’acte, c’est la tournure judiciaire de l’affaire qui fait aujourd’hui couler beaucoup d’encre et suscite l’indignation, notamment sur les réseaux sociaux. Car malgré l’extrême brutalité des faits, le jeune homme ne sera pas jugé. Le parquet a en effet annoncé son internement en psychiatrie, en raison de l’incompatibilité de son état mental avec une quelconque mesure de garde à vue.
Le procureur de la République de Nantes, Antoine Leroy, a tenu une conférence de presse le lendemain du drame pour éclairer les circonstances de cette attaque. Selon les premiers éléments de l’enquête et les conclusions de l’autopsie, la victime principale a été visée avec une violence inouïe. Le suspect lui a asséné pas moins de 57 coups de couteau, dont la majorité, voire l’intégralité, ont été concentrés sur la partie supérieure du corps. Le crâne, la gorge, le cou ont été visés de manière répétée. Ce sont les coups tranchant la veine jugulaire et la carotide qui ont causé la mort, selon les précisions du magistrat. Il ajoute que la jeune fille a été attaquée debout, avant de tomber au sol, et que l’agresseur a continué à la frapper alors qu’elle était déjà à terre. Tous les témoins présents dans la salle de classe où le drame s’est produit s’accordent sur ce point : l’acharnement était tel qu’il ne laissait aucun doute sur l’intention de tuer.
L’attaque ne s’est pas limitée à cette seule victime. Dans la foulée, Justin P. s’en est pris à trois autres élèves, de manière aléatoire, toujours avec le même couteau. Ces derniers ont été blessés mais ont survécu. Le mode opératoire évoque un passage à l’acte prémédité, mais les enquêteurs peinent à cerner les motivations profondes du suspect. Lors de ses premières auditions, le lycéen aurait évoqué plusieurs raisons possibles, sans qu’aucune ne puisse être confirmée avec certitude. Selon le procureur, aucune relation amoureuse ni conflit personnel n’a pu être établi entre lui et la jeune fille décédée. Bien au contraire, celle-ci semblait être la seule personne avec qui il entretenait un dialogue apaisé au sein de l’établissement. Ce paradoxe, relevé par Antoine Leroy, interroge sur l’état psychique du jeune homme au moment des faits. Le procureur affirme : « Ce n’est pas par hasard qu’il s’en prend à elle, c’est la seule personne avec qui il entretient de bonnes relations dans le lycée ».
L’enquête s’oriente donc vers la piste de l’abolition du discernement pour Justin P. Une expertise psychiatrique a été rapidement diligentée et ses conclusions sont sans appel : l’état mental du suspect est incompatible avec une garde à vue. Il a été transféré dans une unité spécialisée pour une hospitalisation sous contrainte. Cette décision judiciaire, bien que conforme à la procédure dans de tels cas, a immédiatement suscité une vive émotion, notamment en ligne. De nombreux internautes dénoncent un traitement différencié, pointant du doigt ce qu’ils considèrent comme un deux poids deux mesures dans la couverture médiatique et judiciaire des faits.
Des voix s’élèvent en effet pour rappeler que dans d’autres contextes, et pour d’autres profils d’auteurs, notamment d’origine étrangère, les actes violents sont rapidement qualifiés de terrorisme, même avant les résultats d’une expertise psychiatrique en France. Plusieurs internautes algériens ou d’origine maghrébine ont vivement réagi, estimant que si l’auteur des faits avait été issu de l’immigration ou porteur d’un autre prénom, les chaînes d’information en continu n’auraient pas hésité à employer des termes plus lourds, à commencer par « radicalisé » ou « extrémiste ».
Face à cette polémique naissante, les autorités restent silencieuses. L’enquête se poursuit sous l’égide du parquet de Nantes, avec pour objectif de déterminer les circonstances exactes ayant mené à cet acte. Les familles des victimes, elles, attendent des réponses. Celle de la jeune fille décédée espère que justice sera rendue, malgré l’absence de procès. L’émotion reste vive dans l’établissement, où une cellule psychologique a été mise en place. Le choc est tel que les cours ont été suspendus pendant plusieurs jours.
En attendant, la société tente de comprendre comment un adolescent, apparemment sans histoire, a pu basculer dans une violence aussi extrême, au cœur d’un lieu censé être sûr. Le fait qu’il ne soit pas jugé alimente un débat profond sur la responsabilité pénale des individus atteints de troubles mentaux, mais aussi sur l’égalité de traitement dans les discours publics.