Alors que les évolutions de la téléphonie mobile ont souvent été perçues comme de simples montées en débit, la 5G promet de bousculer profondément l’écosystème numérique en Algérie. C’est ce qu’a brillamment exposé Ali Kahlane, expert reconnu en stratégie digitale et innovation, lors d’une session de formation organisée jeudi dernier par le club de presse Ooredoo sous le thème «la technologie de 5G». Loin d’être une simple amélioration de la 4G, cette nouvelle génération de connectivité s’apprête à ouvrir des horizons inédits pour l’ensemble de la société.
Ali Kahlane l’affirme sans détour : «Avec la 5G, on entre dans une toute autre dimension.» Si la promesse d’un débit théorique atteignant jusqu’à 20 Gbps impressionne, l’enjeu principal ne réside pas uniquement dans la vitesse. Selon l’expert, «la vraie révolution réside dans la latence», ce temps de réponse quasi instantané qui passe de plus de 100 millisecondes en 4G à seulement 1 milliseconde en 5G. Cette quasi-immédiateté permet l’émergence d’usages totalement inaccessibles avec les standards actuels.
Un autre changement majeur repose sur la densité de connexion permise par la 5G. Grâce à une gestion optimisée du spectre et des fréquences, il est désormais envisageable de connecter jusqu’à un million d’objets par kilomètre carré, contre 100 000 en 4G. Ce bond exponentiel ouvre la voie à une généralisation de l’Internet des objets, transformant chaque feu de circulation, chaque capteur urbain et même chaque véhicule en un terminal interactif. Les implications pour les villes intelligentes, la gestion du trafic, l’énergie ou encore la santé publique s’annoncent colossales.
Prenant l’exemple emblématique des voitures autonomes, Ali Kahlane précise que ces véhicules «peuvent réagir instantanément aux obstacles, mais aussi communiquer en temps réel avec les autres voitures et les infrastructures. La 5G permet ainsi une circulation plus fluide et plus sûre, à des vitesses allant jusqu’à 500 km/h tout en maintenant la connexion». Une perspective qui pourrait révolutionner la mobilité urbaine et interurbaine en Algérie dans les années à venir.
Dans l’industrie 4.0, les avantages de la 5G sont également considérables. Des robots industriels pourront être contrôlés à distance avec une extrême précision, sans aucun délai perceptible. Là où une latence élevée aurait pu causer des accidents, voire des arrêts de production catastrophiques, la 5G promet une fluidité et une fiabilité inédites en Algérie. Les usages immersifs, tels que la réalité virtuelle et augmentée, bénéficieront aussi de cette connectivité nouvelle génération, ouvrant de nouvelles voies dans l’éducation, la formation, ou encore le divertissement.
Cependant, Ali Kahlane souligne que ces promesses nécessitent de lourds investissements. L’installation d’antennes spécifiques, l’acquisition de fréquences, et la mise en place d’infrastructures cloud performantes sont autant de prérequis indispensables. Avec la 5G, une grande partie du traitement des données est transférée vers le cloud, rendant les smartphones plus économes en énergie mais exigeant, en coulisses, une architecture réseau puissante et sophistiquée.
Les prévisions mondiales indiquent que d’ici 2030, plus de six milliards de personnes seront abonnées à la 5G. Quant à l’Algérie, elle avance à son rythme sur ce chemin ambitieux, bien que de nombreux défis subsistent. Les coûts élevés d’infrastructure, l’obligation d’intégrer des technologies avancées comme le NOMA, le MEC et le network slicing, ainsi que les préoccupations juridiques relatives à la protection des données personnelles représentent des obstacles à franchir. À cela s’ajoutent les risques accrus en matière de cybersécurité, en particulier dans les usages industriels, et un débat toujours ouvert sur la neutralité du net.
Néanmoins, les possibilités offertes sont vertigineuses. La 5G introduit une architecture flexible capable de proposer un réseau adapté à chaque usage spécifique. Elle permet la création de réseaux virtuels sur mesure, facilite la gestion d’événements temporaires, et révolutionne des secteurs comme le cloud gaming grâce au calcul déporté. Avec le découplage des fonctions et le slicing du réseau, elle optimise l’efficacité pour une variété d’usages allant des objets connectés aux voitures autonomes, offrant ainsi un futur numérique ultra-personnalisé.
L’Algérie, en pleine transformation digitale, se prépare à saisir cette opportunité majeure. En posant dès aujourd’hui les bases technologiques et réglementaires adéquates, l’Algérie pourrait bien tirer pleinement parti de la 5G pour dynamiser son économie, moderniser ses infrastructures et offrir à ses citoyens des services jusque-là inaccessibles.