Aéroport de Paris Roissy : des Algériens secoués par un « marteau piqueur »

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Le compte à rebours est lancé pour le lancement du CDG Express, ce train à grande vitesse qui reliera dès 2027 l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle à Paris en seulement vingt minutes. Mais derrière cette prouesse technique et logistique à l’aéroport de Roissy, se cachent des préoccupations croissantes dans le département de la Seine-Saint-Denis, où vivent de nombreux Algériens.

Le CDG Express, censé fluidifier le transport des voyageurs aériens, fait déjà trembler le quotidien de milliers de riverains, dont des Algériens résidents sur le tracé de ce nouveau train reliant Paris à l’aéroport de Roissy, avant même sa mise en service. À la vitesse de 140 km/h, les trains traverseront plusieurs zones densément peuplées de ce département, notamment en reprenant une partie du tracé du RER B, avec un passage toutes les quinze minutes, de cinq heures du matin à minuit, soit un rythme soutenu difficilement compatible avec la tranquillité de ces quartiers. Le tarif de cette liaison, fixé à 24 euros, en fait une offre clairement destinée à une clientèle privilégiée, accentuant un clivage territorial qui ne cesse de faire réagir.

Ce sont d’abord les élus locaux qui ont sonné l’alarme, selon Le Parisien. Gilles Poux, maire communiste de La Courneuve, a pris les devants le 8 avril dernier en organisant une conférence de presse en pleine rue, au cours de laquelle il a comparé le vacarme du futur train à celui d’un « marteau-piqueur ». Une image saisissante qui n’a pas tardé à trouver écho dans d’autres sphères politiques. Stéphane Troussel, président socialiste du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, s’est à son tour emparé du sujet. Dans un courrier adressé au préfet de la région Île-de-France, il souligne que le bruit généré par les rames du CDG Express pourrait atteindre jusqu’à 105 décibels, un niveau sonore comparable à un « marteau-piqueur » en pleine activité. Une nuisance d’autant plus inquiétante que la ligne ne prévoit aucune halte dans les communes traversées, laissant sur le quai symbolique les habitants de ces quartiers, dont beaucoup sont issus de l’immigration algérienne, sans aucun bénéfice direct de ce service.

L’argument principal des élus locaux repose sur une inégalité criante. Le train passe, bruyant et inaccessible, sans s’arrêter ni offrir une quelconque amélioration des conditions de transport aux populations locales. Dans une zone déjà marquée par une forte densité urbaine, une précarité sociale élevée et une exposition régulière aux nuisances environnementales, l’arrivée du CDG Express est perçue non pas comme une avancée, mais comme une intrusion, voire une injustice. Dans son courrier, Stéphane Troussel dénonce un projet qui « accentue les inégalités territoriales et sociales qui fracturent l’Île-de-France ». Il réclame la tenue d’une réunion urgente avec les parties prenantes pour examiner les dispositifs acoustiques prévus et les renforcer là où cela s’avérera nécessaire. Pour sa part, Gilles Poux réclame la construction d’un mur antibruit de 700 mètres dans sa commune, et une pétition a été lancée pour soutenir cette demande. Le maire n’exclut pas d’aller plus loin, en menaçant même de bloquer le CDG Express si les revendications locales ne sont pas entendues.

L’enjeu est d’autant plus important que le quartier de La Courneuve, déjà concerné par les nuisances sonores liées au RER B, est aussi au cœur d’un vaste projet de réaménagement urbain. Sur une friche industrielle de 5,5 hectares, le futur centre-ville prévoit la construction de mille logements, d’une école et d’une crèche. Autant de structures vulnérables aux nuisances sonores, que les élus refusent de sacrifier au nom de la rapidité des trajets vers l’aéroport. Le CDG Express, qui a déjà suscité une vive opposition depuis sa genèse, est porté conjointement par le groupe ADP (Aéroports de Paris), SNCF Réseau et la Caisse des dépôts et consignations. Le coût total du projet est estimé à 2,7 milliards d’euros, dont seulement quinze millions d’euros seraient consacrés aux protections acoustiques sur l’ensemble du tracé, une enveloppe jugée largement insuffisante par les acteurs locaux.

Alors que les travaux avancent à l’aéroport de Roissy, l’inquiétude persiste, notamment parmi les Algériens habitant en Seine-Saint-Denis, alimentée par une impression de mépris territorial. En traversant la Seine-Saint-Denis à toute vitesse, sans arrêt ni compensation significative, le CDG Express semble incarner aux yeux de beaucoup le train des privilégiés, celui qui passe sans s’arrêter, laissant derrière lui le bruit, les vibrations et un sentiment d’injustice.

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