Affaire Boualem Sansal : Macron reçoit un appel inattendu

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Le dossier Boualem Sansal continue de susciter des réactions aussi diverses que sensibles, dans un contexte politique marqué par une tension croissante entre Paris et Alger. Mardi 15 avril, une lettre ouverte a été adressée au président Emmanuel Macron. Elle émane de Sabeha et Nawal, les deux filles de l’écrivain franco-algérien, incarcéré depuis cinq mois en Algérie. À travers cette démarche, elles appellent le chef de l’État français à se saisir de la situation de leur père, condamné pour ses propos jugés contraires à l’unité nationale algérienne.

Arrêté à l’aéroport d’Alger le 16 novembre 2024, Boualem Sansal a vu son voyage interrompu brutalement par les forces de sécurité. Les autorités lui reprochent une série de déclarations faites dans un journal français, dans lesquelles il remettait en cause les frontières actuelles de l’Algérie. Le 27 mars 2025, il a été condamné à cinq ans d’emprisonnement. Une peine lourde, qui a suscité à la fois incompréhension et fermeté, selon les interlocuteurs. Pour l’État algérien, il s’agit d’un dossier relevant de la souveraineté nationale et du respect de l’ordre public. La critique de frontières établies depuis des décennies a été perçue comme une remise en cause directe de l’intégrité territoriale, sujet hautement sensible dans le pays.

Les filles de l’écrivain ont décidé de prendre publiquement la parole. Dans leur lettre, elles expriment leur inquiétude quant à l’état de santé de leur père, âgé de 80 ans, et rappellent sa carrière d’auteur. Leur interpellation se veut un appel à la responsabilité humanitaire, adressé à Emmanuel Macron, sans provocation, ni attaque politique directe. Elles évoquent une situation qu’elles jugent injuste et expriment leur espoir de voir une solution apparaître, même discrète, pour sortir leur père de ce qu’elles considèrent comme une impasse judiciaire.

La publication de cette lettre, par le Figaro, intervient à un moment où les relations entre la France et l’Algérie sont à leur plus bas niveau depuis des mois. Les tensions, d’abord latentes, ont pris un tour officiel ces derniers jours, notamment après l’annonce par Alger de l’expulsion de 12 agents diplomatiques français. Selon un communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères, ces personnes étaient en poste à l’ambassade et dans les consulats de France en Algérie. Cette décision, qualifiée de « souveraine », fait suite à l’interpellation en France d’un agent consulaire algérien. Alger considère cette arrestation comme une provocation injustifiée.

La réponse de Paris ne s’est pas fait attendre. Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, a confirmé mardi 15 avril que la France expulserait elle aussi 12 diplomates algériens. Il a également annoncé le rappel pour consultations de l’ambassadeur de France à Alger. Dans un message publié sur le réseau social X, le ministre a dénoncé « une décision injustifiée et incompréhensible » de la part des autorités algériennes, tout en affirmant la volonté française de maintenir un dialogue, mais « pas à sens unique ».

Cette montée en puissance du conflit diplomatique trouve ses racines dans une prise de position française datant de juillet 2024. À cette époque, Emmanuel Macron avait publiquement soutenu un plan d’autonomie sous souveraineté marocaine pour le Sahara occidental. Ce soutien a été très mal perçu par Alger, qui appuie depuis toujours le Front Polisario, mouvement indépendantiste revendiquant ce territoire. En réponse, l’Algérie avait immédiatement rappelé son ambassadeur à Paris, marquant le début d’une crise diplomatique prolongée.

Depuis, la situation n’a cessé de se détériorer, les désaccords s’élargissant à d’autres sujets tels que la politique migratoire, la coopération sécuritaire, et désormais, les cas individuels comme celui de Boualem Sansal. Ce dernier, à travers sa condamnation, est désormais au cœur d’un affrontement plus vaste, où les considérations nationales et symboliques prennent souvent le pas sur les dossiers personnels.

Alors que le président français est publiquement interpellé, l’affaire Boualem Sansal ne semble pas près de connaître son épilogue. Elle s’inscrit dans un contexte où la diplomatie franco-algérienne avance à pas heurtés, et où chaque geste, chaque mot, est scruté à la loupe, aussi bien à Paris qu’à Alger.

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