Alger : le Français officiellement abandonné au profit de l’Anglais

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Dans un virage aussi symbolique que stratégique, la capitale algérienne, Alger, a décidé de tourner une page importante de son histoire administrative en abandonnant la langue française au profit de l’anglais. Cette mutation linguistique se matérialise par une décision récente de la Société des Eaux et de l’Assainissement d’Alger, plus connue sous l’acronyme SEAAL. Désormais, les factures d’eau envoyées à des millions de citoyens ne seront plus rédigées en français, mais exclusivement en arabe et en anglais, deux langues choisies pour accompagner les ambitions numériques et internationales de la société. Cette transition n’est pas anodine : Alger, en rompant avec le français sur ce point précis, annonce clairement un repositionnement sur le plan linguistique et technologique.

SEAAL a officiellement confirmé le lancement d’un nouveau format de facture bilingue, arabe et anglais, qui remplace définitivement l’ancien modèle en français. Selon les précisions du communiqué, plus de 5 millions de factures seront émises chaque année sous cette nouvelle forme, confirmant la volonté de SEAAL d’étendre cette réforme à l’ensemble de ses opérations sur Alger. Cette décision repose sur une logique d’adaptation aux exigences contemporaines : les plateformes numériques, les applications connectées et les partenariats internationaux nécessitent un langage accessible à l’échelle globale. Et pour SEAAL, ce langage n’est plus le français mais l’anglais.

En abandonnant le français, Alger, par le biais de SEAAL, inscrit sa stratégie de communication dans une dynamique ouverte vers le monde anglo-saxon. L’arabe, langue officielle et identitaire, reste la langue principale de contact avec les citoyens, tandis que l’anglais, introduit comme outil technique, permet une meilleure lisibilité pour les partenaires internationaux, les fournisseurs et les opérateurs numériques. SEAAL ne s’est pas contentée de changer de langue sur ses documents ; elle accompagne cette décision d’un programme de formation en anglais destiné à ses cadres et employés. L’objectif est clair : améliorer les compétences linguistiques du personnel pour suivre l’évolution des besoins de l’entreprise et offrir un service de qualité dans un environnement multilingue.

Ce choix n’est pas le fruit du hasard. SEAAL qualifie cette mutation de « choix stratégique », une décision qui s’inscrit dans le processus de modernisation numérique en cours au sein de la structure. L’anglais est défini comme la langue des affaires, de la technologie et de l’innovation. Dans un contexte où les entreprises publiques sont appelées à devenir plus performantes et plus ouvertes aux marchés internationaux, le passage de SEAAL à l’anglais est perçu comme une étape cruciale vers une meilleure intégration dans les standards mondiaux. Ainsi, Alger, qui renonce ici à l’usage du français dans les documents officiels de l’un de ses services les plus essentiels, marque un tournant dans la manière dont elle envisage son futur administratif.

Ce n’est pas la première fois que SEAAL s’affranchit de l’influence française. En 2021, la société avait mis fin à un partenariat de 15 ans avec le groupe français Suez, passant alors à une gestion entièrement assurée par des compétences algériennes. Cette rupture avec l’ancien partenaire français s’est accompagnée d’une volonté affirmée de nationalisation des compétences et d’indépendance dans la gestion des infrastructures. Aujourd’hui, en supprimant la langue française de ses factures, Alger poursuit cette même logique d’autonomie culturelle et administrative.

Alger, qui utilisait le français comme langue intermédiaire dans de nombreux documents officiels, semble désormais vouloir inscrire sa politique linguistique dans un nouvel équilibre. Le français, bien que toujours présent dans l’espace public, perd ici un terrain institutionnel significatif. SEAAL, en se débarrassant du français pour adopter l’anglais, confirme la tendance actuelle observée dans plusieurs secteurs en Algérie, où l’anglais gagne du terrain dans les universités, les formations techniques et les outils de communication des entreprises.

Cette transition opérée à Alger reflète une réalité plus large, celle d’un pays qui redéfinit ses priorités linguistiques. Le français, malgré son ancrage historique, cède ici sa place à une langue perçue comme plus fonctionnelle et tournée vers l’avenir. Ainsi, Alger n’a pas simplement changé la langue d’une facture. Elle a modifié le canal par lequel elle entend désormais dialoguer avec le monde. Et ce dialogue, de plus en plus, se fera en anglais, sans faire appel au français.