Algérie : le voyageur ayant fait tomber 8 douaniers lourdement condamné

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L’Algérie vient une nouvelle fois d’être secouée par une affaire de drogue mêlant un jeune voyageur, un réseau de complicité à l’aéroport Houari Boumediène et une fuite spectaculaire. Le voyageur, un étudiant universitaire de Constantine, a été condamné, ce mercredi 7 mai, à cinq ans de prison ferme après avoir été arrêté en possession de comprimés d’ecstasy, puis s’être évadé de l’aéroport grâce à l’aide de plusieurs douaniers. Ce voyageur en Algérie, censé embarquer pour un vol à destination des Émirats arabes unis, a fini par provoquer la chute de huit douaniers, eux-mêmes poursuivis et sanctionnés pour corruption et abus de fonction.

Tout commence début février 2024, quand le voyageur “A.M. Amine”, âgé de 24 ans et originaire de la wilaya de Constantine, est intercepté à l’aéroport Houari Boumediène, en Algérie, alors qu’il s’apprête à embarquer vers Dubaï. Dans ses bagages, les douaniers découvrent une cargaison de 300 comprimés d’ecstasy soigneusement dissimulés à l’intérieur d’une boîte de beurre, une technique classique de camouflage pour passer les contrôles sans éveiller de soupçons. Le voyageur avait apparemment tout planifié dans le but de faire transiter cette drogue de l’Algérie vers les Émirats, où il réside officiellement pour poursuivre ses études.

Mais ce qui semblait être une saisie classique va vite virer au scandale. Avant même que l’enquête interne ne soit bouclée, le jeune homme parvient à s’échapper des locaux de l’aéroport. Selon les investigations, il aurait profité de l’inattention des agents, absorbés par la rédaction des procès-verbaux de saisie, pour se glisser dans les sanitaires, puis s’éclipser discrètement de la zone sécurisée. Un scénario presque hollywoodien mais bien réel, qui met en lumière les défaillances du dispositif de sécurité. Le voyageur a ensuite quitté les lieux à bord de sa propre voiture, laissant derrière lui les preuves accablantes et des douaniers désormais dans l’embarras.

L’affaire aurait pu en rester là si les autorités judiciaires n’avaient pas agi avec une rare célérité. Quelques heures seulement après sa fuite, le voyageur a été retrouvé à Constantine, sa ville natale, où il croyait pouvoir se fondre dans l’anonymat. Les premiers éléments de l’enquête révèlent rapidement que cette évasion n’était pas le fruit du hasard. En effet, le voyageur a avoué devant le juge avoir remis 150 euros à une agente des douanes pour faciliter sa fuite. Un de ses complices, un autre agent identifié comme “S.S. Hocine”, aurait quant à lui perçu 7 millions de centimes pour fermer les yeux sur l’opération et garantir son passage hors de l’enceinte aéroportuaire.

L’enquête approfondie, ordonnée par le parquet de Dar El Beïda, a permis de démanteler un réseau de complicités internes au sein de la douane. Au total, huit douaniers, dont certains cadres, ont été interpellés, placés sous mandat de dépôt, puis jugés pour corruption et abus de fonction. Le rôle de chacun dans la fuite du voyageur a été examiné avec minutie, les peines infligées variant selon leur niveau d’implication. L’expertise électronique du téléphone du voyageur a également apporté son lot de preuves, notamment des messages vocaux et appels avec un ami, identifié comme étant celui qui lui avait remis à la fois l’argent et les drogues, dans le but de préparer son voyage depuis l’Algérie vers Dubaï.

Il est à noter que, dans un premier jugement, le tribunal a infligé cinq ans de prison ferme au voyageur, ainsi qu’une lourde amende de 500 000 dinars. Ce verdict a été confirmé, puis partiellement révisé en appel, où la peine a été réduite à trois ans de prison ferme.

Cette affaire, devenue emblématique, illustre à quel point la vigilance est cruciale dans les plateformes internationales de l’Algérie. Elle rappelle que tout voyageur peut potentiellement devenir la pièce maîtresse d’un scandale d’État si les failles du système ne sont pas comblées. Pour l’heure, les autorités semblent avoir repris la main, mais la vigilance reste de mise.