Algérie : procès retentissant dans l’affaire des faux passeports

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Le procès qui s’ouvre ce mardi à Alger concentre l’attention des observateurs judiciaires et de l’opinion publique. Vingt prévenus, dont une majorité de fonctionnaires communaux, se retrouvent dans l’œil du cyclone après la mise au jour d’un vaste réseau spécialisé dans la falsification de documents officiels. Cette affaire de faux passeports en Algérie a été qualifiée de l’une des plus lourdes jamais traitées par la justice du pays, tant par le nombre d’accusés que par la gravité des faits reprochés.

Selon les éléments communiqués par Echourouk, le Conseil judiciaire d’Alger examinera, devant la 10e chambre pénale, un dossier lié à la falsification de faux passeports et de cartes nationales biométriques délivrés à des ressortissants syriens établis en Algérie. Parmi les 20 accusés, 12 sont actuellement sous mandat de dépôt, la plupart étant des agents de la commune de Djelfa. Ils devront répondre de chefs d’inculpation lourds, dont l’introduction frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé au détriment d’un organisme public, la constitution d’une association de malfaiteurs et l’abus de fonction. Des accusations appuyées par le Code pénal, notamment ses articles 394 bis 1, 394 bis 3 et 394 bis 5, ainsi que par l’article 33 de la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption.

L’origine du dossier remonte au 28 février 2024, date à laquelle le chef du service des documents biométriques de la commune de Djelfa avait déposé plainte auprès de la Sûreté de wilaya. Dans cette plainte, il signalait la délivrance frauduleuse de faux passeports et de cartes d’identité biométriques à des étrangers dépourvus de nationalité algérienne. Le fonctionnaire avait mis en cause directement un employé de la commune, soupçonné d’être au cœur de cette opération, ainsi que d’autres personnes dont l’implication devait être établie.

Les investigations qui ont suivi ont confirmé l’existence de documents biométriques délivrés à des ressortissants syriens sans présentation de certificat de nationalité. Ce manquement, qui constitue une violation grave des procédures administratives, a permis à 13 étrangers, dont 12 enfants syriens nés entre 2010 et 2018, d’obtenir des cartes d’identité et faux passeports en Algérie. Ces révélations ont mis en lumière la vulnérabilité du système administratif face à des pratiques de falsification organisées.

En analysant en détail les formulaires de demande de documents biométriques et les empreintes relevées dans la base de données, les enquêteurs ont découvert des incohérences flagrantes. L’exemple le plus marquant concerne un enfant syrien dénommé « A. Ahmed ». L’empreinte apposée sur son dossier ne correspondait pas à celle d’un parent, mais à celle d’un employé du service biométrique, identifié sous le nom de « B. K. Slimane ». Cet agent aurait placé sa propre empreinte à la place de celle du père du mineur, validant ainsi un document falsifié.

Un autre cas, tout aussi révélateur, concerne un enfant syrien appelé « M. Youssef ». Sur son formulaire, une mention manuscrite en rouge indiquant « A. Kenissa – nationalité » avait été repérée. Cette inscription suggère que le même employé avait pris l’initiative de déposer le dossier en vue de son traitement, profitant de ses relations avec d’autres agents de la mairie pour faciliter la falsification. Ces détails mettent en lumière un mode opératoire reposant sur des complicités internes et des manipulations des procédures officielles.

Ce procès, qui s’annonce long et complexe, devrait lever le voile sur d’autres aspects de ce réseau de faux passeports en Algérie. Les juges tenteront de déterminer l’étendue exacte du préjudice causé au système de traitement automatisé et à la base de données relevant du ministère de l’Intérieur et des collectivités locales. La gravité des accusations souligne la menace que représentent de telles pratiques pour la fiabilité des documents officiels et pour la sécurité juridique de l’État.

L’audience prévue ce mardi pourrait également permettre de mettre en lumière de nouveaux éléments sur l’organisation et les ramifications de cette affaire. Le fait que des enfants syriens aient pu obtenir des faux passeports en Algérie soulève des questions sensibles liées à l’exploitation de la vulnérabilité de familles étrangères. Cette dimension ajoute une charge émotionnelle à un dossier déjà lourd sur le plan judiciaire et institutionnel.