Algériens de France : le sale coup de la Préfecture de Saint Denis fait jaser

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En Seine Saint Denis, département dense et multiculturel d’Île-de-France, dans lequel résident de nombreux Algériens, une nouvelle pratique administrative suscite depuis peu l’indignation. Une série de circulaires internes, confidentielles mais désormais révélées, a été adressée aux forces de l’ordre, leur enjoignant de signaler tout étranger en situation régulière placé en garde à vue. Parmi les personnes concernées figurent de nombreux Algériens détenteurs d’un titre de séjour parfaitement en règle, qui se retrouvent ainsi fichés sans qu’aucune condamnation judiciaire n’ait été prononcée à leur encontre. Cette affaire, rendue publique par les médias Les Jours et Le Parisien, a provoqué un tollé parmi les défenseurs des droits humains. Le vendredi 18 avril, quatre organisations, dont la Ligue des droits de l’Homme, ont saisi le tribunal administratif de Montreuil afin de faire annuler cette procédure.

Derrière cette controverse se cache l’application de la circulaire Retailleau, qui étend le champ du signalement administratif à de simples suspects. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, il ne s’agit pas ici de délinquants avérés ni de personnes condamnées, mais de ressortissants étrangers, dont des Algériens, faisant l’objet d’un simple placement en garde à vue. À ce stade, aucune infraction n’est juridiquement établie, aucune décision judiciaire n’a été rendue. Pourtant, la procédure prévoit que la police collecte un ensemble d’informations précises : date et lieu des faits présumés, nature de l’infraction soupçonnée, antécédents judiciaires, et même toute donnée jugée utile pour évaluer si la personne constitue une menace à l’ordre public.

Le média Les Jours précise que cette collecte d’informations est poussée : les empreintes digitales, les copies des titres de séjour, ainsi que les documents d’identité du pays d’origine sont systématiquement transmis au bureau du séjour de Bobigny. Cette démarche, selon les organisations de défense des droits, pose de sérieuses questions sur le respect des principes fondamentaux du droit français. Des personnes en parfaite situation régulière, bien insérées dans la société, peuvent désormais voir leur avenir en France compromis, simplement parce qu’elles ont été suspectées d’un acte, sans jamais avoir été reconnues coupables.

Nathalie Teillaud, présidente de la Ligue des droits de l’Homme, a dénoncé avec fermeté ce qu’elle considère comme une dérive grave. Elle alerte sur les risques liés au non-renouvellement des titres de séjour sur la base de soupçons infondés. Elle met en garde contre une criminalisation rampante des étrangers, et souligne le danger d’un glissement vers une forme de discrimination systémique, où l’apparence ou l’origine devient un critère de suspicion. Pour la LDH, cette pratique représente une atteinte claire à la présomption d’innocence et au secret de l’instruction, deux piliers de la justice.

La préfecture de Seine-Saint-Denis, mise en cause, a tenté de calmer les critiques. Le vendredi 11 avril, elle a publiquement réfuté les accusations de fichage, préférant parler de « fiches de procédure » censées clarifier les conditions d’application de la loi. Elle rejette le terme jugé « infamant » de fichage, mais cette défense n’a pas suffi à éteindre les critiques, d’autant plus que des précédents existent. En Loire-Atlantique, une procédure similaire avait été suspendue par le tribunal administratif de Nantes le 4 avril. Dans ce département, les forces de l’ordre avaient été invitées à remplir des fiches de signalement à chaque interpellation d’un étranger, indépendamment de la suite judiciaire. Résultat : quarante fiches avaient été transmises à la préfecture, et une personne avait vu sa situation régularisée remise en question.

Le recours introduit à Montreuil s’appuie directement sur cette décision. Les associations demandent l’annulation de la procédure en vigueur en Seine-Saint-Denis, estimant qu’elle constitue un traitement de données personnelles illégal et une atteinte injustifiée aux droits des étrangers. Dans une société démocratique, où les principes d’égalité et de justice doivent primer, cette affaire soulève des questions profondes. Elle met en lumière la tension croissante entre sécurité publique et respect des libertés individuelles, en particulier pour les étrangers vivant en France, souvent dans des conditions déjà marquées par la précarité administrative.

Pour les nombreux Algériens de France détenteurs d’un titre de séjour, délivré notamment par la Préfecture de Saint Denis, la situation actuelle est source de peur et d’incertitude. Une simple interpellation peut désormais suffire à déclencher un signalement administratif aux conséquences potentiellement lourdes. Ce climat tendu pourrait durablement affecter la confiance entre les citoyens étrangers et les institutions françaises. Tandis que le tribunal administratif de Montreuil se prépare à examiner le dossier, l’affaire fait jaser bien au-delà de la Seine-Saint-Denis, et alimente un débat plus large sur la place des étrangers dans la société française et les garanties juridiques dont ils peuvent encore bénéficier.

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