Alors que les tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie atteignent un niveau critique, une action inattendue vient bouleverser la rigidité apparente des relations entre les deux États. À Alger, l’Ambassade de France a déposé une gerbe de fleurs à l’occasion de la commémoration des massacres du 8 mai 1945. Un geste chargé de symboles dans un contexte où la crise diplomatique reste entière, marquée par des propos fermes et une série d’actes politiques jugés provocateurs par la partie algérienne. À travers cette initiative, l’Ambassade de France à Alger semble vouloir envoyer un message de continuité mémorielle malgré les obstacles actuels.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a affirmé lors d’un entretien accordé, ce dimanche 11 mai, à France Info et au Monde, que la relation entre la France et l’Algérie est « totalement gelée ». Cette déclaration s’inscrit dans un climat diplomatique glacé, nourri par des tensions persistantes et des actions réciproques. Si la France a réagi à l’expulsion de douze de ses fonctionnaires en avril, c’est avant tout, selon les autorités algériennes, en réaction à des provocations répétées, notamment celles issues du ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Ce dernier, par plusieurs sorties jugées offensantes, aurait alimenté une atmosphère de méfiance, poussant Alger à prendre des mesures fermes.
Dans ce contexte, le geste de l’Ambassade de France à Alger, qui a choisi de maintenir sa présence symbolique lors des commémorations à Alger, prend une tournure encore plus singulière. « Ces massacres de Sétif méritent d’être commémorés. D’ailleurs, l’Ambassade de France à Alger a déposé une gerbe à cette occasion », a rappelé Jean-Noël Barrot, insistant sur la nécessité pour la France de rester fidèle à sa logique de vérité historique. Une logique entamée dès 2017, selon ses propres mots. Le dépôt de la gerbe n’a rien d’anodin : à Alger, l’Ambassade de France a choisi d’agir dans la discrétion mais avec force symbolique, affirmant ainsi une forme de continuité diplomatique malgré l’absence de dialogue politique concret.
Depuis le rappel à Paris de l’ambassadeur de France à Alger, Stéphane Romatet, aucune date de retour n’a été fixée. Une absence qui illustre bien la gravité de la situation, et qui souligne aussi la portée du geste posé par l’Ambassade de France à Alger, alors même qu’elle opère sans son représentant officiel. La commémoration du 8 mai, malgré les crispations entre Alger et Paris, a donc offert un rare moment de visibilité à un acte franco-algérien partagé, même si celui-ci reste avant tout symbolique.
Plusieurs parlementaires français ont aussi fait le déplacement en Algérie, participant aux cérémonies malgré le climat pesant. Cette venue a été perçue comme un signe d’ouverture, bien que l’exécutif français continue d’adopter un ton dur. « Il est toujours positif que les parlementaires puissent se déplacer à ces occasions, mais la relation reste bloquée et totalement gelée », a insisté Jean-Noël Barrot.
Interrogé sur de possibles sanctions contre Alger, le ministre français a déclaré : « Je ne m’interdis pas d’en prendre. Je ne dirai pas forcément quand je les prendrai, quand je ne les prendrai pas. Ainsi fonctionne la diplomatie. » Une déclaration à double tranchant, qui semble vouloir maintenir une posture ferme sans pour autant fermer toutes les portes.
Malgré ces tensions, le dépôt de fleurs à Alger par l’Ambassade de France reste un geste marquant. Il rappelle que, même en période de crise ouverte entre Alger et Paris, l’Ambassade de France à Alger peut jouer un rôle de mémoire et d’apaisement. Ce geste, au cœur même de la capitale algérienne, montre qu’un dialogue discret, ou du moins un respect des symboles, peut encore exister. Et cela, même lorsque les mots échappent, même lorsque les ambassadeurs ne se croisent plus. L’Ambassade de France à Alger, par cette action, a tenté de maintenir un fil, aussi mince soit-il, dans une relation que beaucoup considèrent aujourd’hui comme l’une des plus fragiles entre deux anciennes puissances liées par une histoire douloureuse.