Bouchouareb : la France dit Non, l’Algérie riposte avec une mesure radicale

Bouchouareb

Le dossier judiciaire d’Abdeslam Bouchouareb, ancien ministre algérien de l’Industrie, vient de franchir un nouveau cap. La justice algérienne, confrontée à une fin de non-recevoir persistante de la part des autorités françaises concernant son extradition, a décidé de passer à la vitesse supérieure.

Le 6ᵉ refus consécutif émanant de la justice française, cette fois de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, a poussé les juridictions algériennes à mettre en œuvre les mesures les plus fermes prévues par la loi. En l’absence de coopération judiciaire du côté français, Alger a donc enclenché la procédure de saisie effective des biens de Bouchouareb, en fuite depuis des années. Cet ancien pilier du gouvernement sous la présidence d’Abdelaziz Bouteflika, déjà condamné à plusieurs reprises par contumace, voit ainsi ses avoirs et possessions frappés de confiscation. Une décision prise par le pôle économique et financier du tribunal de Sidi M’hamed, à la suite d’une énième condamnation à vingt ans de prison ferme.

Désormais considéré comme un fugitif international, Bouchouareb est visé par pas moins de sept mandats d’arrêt internationaux, tous restés sans effet. Selon la législation algérienne, son absence physique à l’audience lui interdit toute possibilité de recours ou d’opposition aux jugements. Le verdict est donc irrévocable et exécutoire. Dans cette optique, la justice algérienne a entamé la saisie de l’ensemble de ses biens mobiliers et immobiliers, ainsi que de ses comptes bancaires. L’ensemble des fonds récupérés sera versé dans un compte dédié, prévu par la loi dans le cadre de la lutte contre la corruption. Un compte spécial où seront centralisées toutes les ressources issues des confiscations judiciaires.

Le dossier Bouchouareb est aussi tentaculaire que symbolique. Ancien homme fort du secteur industriel, il est accusé d’avoir amassé une fortune colossale en détournant les ressources publiques, profitant de sa position pour construire un empire aussi discret qu’opaque. Une enquête approfondie a révélé la présence de biens impressionnants à son nom ou au nom de membres de sa famille. L’un des plus notables est une villa de luxe située à Chéraga, dans la banlieue ouest d’Alger, dont la valeur est estimée à plus de 150 milliards de centimes. Cette demeure aurait même été louée temporairement à une ambassade étrangère avant de servir de dépôt à une collection de véhicules de luxe. Les enquêteurs ont également mis en lumière son implication dans des opérations de transferts de fonds vers l’étranger, via une proche d’une ancienne ministre, responsable d’une entreprise basée à Bab Ezzouar.

Par ailleurs, le patrimoine de Bouchouareb comprendrait plusieurs sociétés, certaines camouflées derrière des noms de proches. On y retrouve notamment deux usines produisant du chocolat et des chips, huit comptes bancaires bien remplis, sans oublier de fortes sommes d’argent en devises étrangères. Ces éléments ont été mis en lumière lors des divers procès liés à l’affaire du montage automobile, dans lesquels Bouchouareb est également impliqué. Les témoignages recueillis ont permis de retracer un vaste réseau de pots-de-vin et de faveurs. Il aurait ainsi perçu une villa à Hydra estimée à plus de 60 milliards de centimes, mais aussi 14 milliards de la part d’un industriel, trois appartements, deux voitures de luxe et plusieurs autres biens de grande valeur.

Les peines prononcées à son encontre reflètent la gravité des charges retenues. À ce jour, la justice algérienne a cumulé six condamnations à 20 ans de réclusion, soit un total de 120 années de prison. Une amende de 800 millions de dinars vient alourdir ce bilan déjà accablant. Face à l’échec des démarches diplomatiques et judiciaires visant à obtenir son extradition, les autorités algériennes n’entendent pas rester les bras croisés. La récupération des avoirs de Bouchouareb constitue désormais une priorité, dans le cadre d’un processus plus large de restitution des fonds détournés durant les années du système Bouteflika. Cette affaire, emblématique des dérives de l’ère passée, met en lumière les limites de la coopération judiciaire internationale lorsque la politique s’invite dans le droit. Pour Alger, il ne s’agit plus simplement de justice, mais d’un acte de souveraineté.

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