En France, le parcours administratif des Algériens ne s’arrête pas à l’obtention d’un visa étudiant. Une fois les études terminées, la réalité impose un virage crucial : celui du changement de statut. Les Algériens installés en France se trouvent alors face à une étape décisive, où le passage du statut d’étudiant à celui de salarié ou de commerçant devient une nécessité vitale pour rester en situation régulière. Le changement de statut, devenu monnaie courante pour les Algériens formés en France, est censé leur ouvrir la voie à la stabilité. Pourtant, ce processus, en apparence administratif, se transforme parfois en véritable parcours du combattant, exposant certains à la précarité, au stress, voire à l’exploitation.
En France, le statut de commerçant est souvent préféré par les Algériens qui envisagent un changement de statut après leurs études, notamment parce qu’il semble plus accessible que celui de salarié, qui demande souvent un contrat à durée indéterminée, rare pour un jeune diplômé étranger. Dans les grandes villes de France, de nombreux Algériens s’orientent donc vers la micro-entreprise, convaincus que ce changement de statut leur garantira un renouvellement de leur titre de séjour. Toutefois, ce choix stratégique s’accompagne parfois de pressions économiques, de manque d’information et surtout, d’abus. Des Algériens déjà établis en France, parfois eux-mêmes passés par cette même transition, tirent aujourd’hui profit de la vulnérabilité de leurs compatriotes en facturant leur aide, pourtant souvent nécessaire, à prix fort.
C’est dans ce contexte qu’une Algérienne installée en France a tenu à briser le silence. Selon elle, « cesser de profiter de ses compatriotes est une nécessité morale ». Ayant elle-même vécu cette période d’incertitude liée au changement de statut, elle lance un appel à la solidarité. S’adressant directement aux Algériens établis en France, elle dénonce les comportements opportunistes qui visent les plus fragiles. « Ce n’est pas parce que vous avez obtenu la nationalité ou un titre de séjour de 10 ans que vous devez oublier d’où vous venez », affirme-t-elle. Pour elle, les Algériens en France devraient s’entraider pendant ces moments cruciaux, notamment lorsqu’il s’agit du changement de statut, plutôt que d’exploiter la détresse de ceux qui traversent encore ces épreuves.
Cette réalité est malheureusement confirmée par d’autres témoignages. Un nombre croissant d’Algériens en situation de transition en France rapportent avoir été approchés par des personnes leur proposant, contre rémunération, une assistance pour monter un dossier de changement de statut vers celui de commerçant. Parfois, les sommes demandées sont modestes en apparence, mais elles s’accumulent dans un contexte où chaque centime compte pour ces jeunes en situation précaire. L’Algérienne poursuit : « Nous sommes nombreux à être passés par cette étape difficile, et certains ont profité de notre stress et de notre détresse pour en tirer profit. Je trouve cela profondément injuste et malhonnête ».
Au-delà des aspects financiers, les Algériens confrontés au changement de statut en France décrivent un impact psychologique lourd. L’incertitude liée aux délais administratifs, aux exigences parfois floues des préfectures et aux refus inexpliqués génère anxiété, insomnie et isolement. Ceux qui n’ont ni réseau ni soutien sont particulièrement exposés. C’est pourquoi les appels à l’entraide entre Algériens en France prennent une résonance particulière. Le changement de statut ne devrait pas être un marché mais un droit administratif encadré, accessible et équitable pour tous.
Alors que le phénomène prend de l’ampleur, notamment avec l’augmentation des étudiants algériens en France chaque année, il devient impératif de rappeler les principes de solidarité et d’éthique. Le changement de statut n’est pas qu’un dossier à remplir, c’est une étape décisive dans une vie. Pour les Algériens en France, traverser cette période sans soutien, ou pire, en étant exploités par d’autres Algériens, est un phénomène choquant qui mérite d’être exposé. Dans cette France où les parcours d’intégration sont souvent semés d’obstacles, les Algériens ne devraient pas être les obstacles les uns des autres, mais plutôt des repères de soutien mutuel, notamment quand le changement de statut devient une question de survie administrative.