La situation de Mehdi, un jeune Algérien de 22 ans, incarne une tragédie humaine qui illustre de manière frappante les conditions inhumaines vécues par les étrangers placés en centre de rétention administrative (CRA). Cette histoire a été révélée par le quotidien français L’Humanité, soulignant des circonstances qui dépassent les simples chiffres et règlements administratifs, notamment causés par la nouvelle circulaire de Bruno Retailleau. L’enfermement de Mehdi, après une tentative de suicide dramatique en janvier 2025, fait écho à une série de décisions et d’événements qui mettent en lumière des dysfonctionnements et des injustices systématiques.
Arrivé en France à l’âge de 16 ans, Mehdi avait rejoint son père, médecin gériatre, dans le but de construire un avenir meilleur. Mais malgré sa jeunesse et ses aspirations, il se retrouve piégé dans un système complexe et implacable. Son parcours a été marqué par une lutte incessante contre la précarité administrative. En dépit de l’annulation d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) par le tribunal administratif de Lille en 2021, la préfecture n’a pas délivré le récépissé autorisant à travailler, le plongeant davantage dans la précarité. Ne pouvant régulariser sa situation, il survit en ayant recours à des petits trafics et se retrouve confronté à la justice, une spirale de détentions et de rétentions dans plusieurs centres administratifs.
La situation de Mehdi se détériore de manière tragique après son arrestation alors qu’il attendait sa mère à la gare du Nord, à Paris. Placé dans différents CRA, il est finalement transféré à Vincennes, où les conditions de rétention deviennent insupportables. L’isolement, les tensions avec les agents et les mauvaises conditions de détention le poussent à une tentative de suicide, une tentative qui témoigne d’une détresse psychologique profonde. Alors qu’il se pend dans sa cellule, il est retrouvé inconscient et transporté d’urgence à l’hôpital Cochin, où il est plongé dans un coma artificiel. Cette situation, selon le rapport médical, a mis en évidence un risque suicidaire majeur. Après son réveil, il est placé sous surveillance psychiatrique.
Malgré cette épreuve, Mehdi ne trouve aucune solution. Le 20 janvier 2025, un juge des libertés et de la détention (JLD) ordonne sa libération après plusieurs irrégularités dans la procédure et l’incapacité de la préfecture à organiser son expulsion. Pourtant, la préfecture fait appel de cette décision, et la cour d’appel prononce la prolongation de son enfermement, maintenant Mehdi dans des conditions de rétention toujours plus difficiles.
Cette situation, selon l’avocate de Mehdi, Me Nina Galmot, trouve son origine dans la circulaire Retailleau d’octobre 2024, mise en place par le ministre de l’Intérieur. Ce texte a renforcé les mesures d’expulsion des étrangers en situation irrégulière, même en l’absence de régularisation. La nouvelle législation, selon Me Galmot, permet aux préfets d’invoquer la notion de « menace à l’ordre public » pour justifier la rétention, une notion qui peut s’appliquer à des délits mineurs. La suppression de la clause de protection, qui protégeait auparavant des individus comme Mehdi, rend désormais cette situation encore plus complexe.
Les conditions de rétention à Vincennes sont elles-mêmes sources de souffrance psychologique. Des témoignages recueillis par le média français L’Humanité auprès d’autres retenus révèlent une réalité alarmante : « Les services médicaux m’ont indiqué que 100 % des retenus reçoivent des médicaments pour les aider à dormir », raconte l’avocate. Ces mots dépeignent une réalité où les conditions de vie en CRA se rapprochent dangereusement de celles de prisons, mais sans les garanties et la dignité qui y sont associées. Les retours des détenus dans ces centres témoignent d’un sentiment de folie grandissante, d’une dégradation mentale profonde face à l’inertie des autorités administratives.
Le dossier de Mehdi met également en lumière des enjeux diplomatiques complexes, notamment les relations entre la France et l’Algérie, qui compliquent l’expulsion des ressortissants algériens. Une mission consulaire prévue fin février pourrait ne pas aboutir, en raison des délais serrés et des obstacles administratifs. La situation est d’autant plus tragique que Mehdi se trouve confronté à un système qui semble s’être enfermé dans une logique de renvoi systématique, sans tenir compte des réalités humaines derrière chaque dossier.
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