Dans un climat diplomatique déjà marqué par des tensions sourdes mais persistantes, une nouvelle crise oppose la France et l’Algérie, cette fois autour de l’arrestation d’un agent consulaire algérien en poste à Créteil. Ce fonctionnaire, relevant officiellement du personnel du consulat général d’Algérie en région parisienne, a été arrêté par les autorités françaises dans des circonstances qui suscitent une vive controverse, à la fois sur le plan juridique et diplomatique.
L’Algérie, par la voie de son ministère des Affaires étrangères, a immédiatement protesté, exigeant la libération de l’agent, rappelant que ce dernier est censé bénéficier de l’immunité consulaire, telle que prévue par la Convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963. La France, en réponse, a opposé une fin de non-recevoir, arguant que sa justice est indépendante et que cette affaire relève du parquet national antiterroriste, ce qui a eu pour effet d’envenimer davantage la situation.
Le docteur Mustapha Richa, spécialiste en droit international, a livré une analyse précise du cas en question dans une déclaration accordée au média DNAlgérie. Il a rappelé que selon l’article 41 paragraphe 1 de la Convention de Vienne, un agent consulaire ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention provisoire par l’État hôte, sauf dans les cas où ce dernier serait impliqué dans une infraction grave, comme le terrorisme. Ce point est d’ailleurs invoqué par les autorités françaises pour justifier la mesure, estimant que les charges pesant contre l’agent consulaire algérien relèveraient de ce cadre juridique exceptionnel. Toutefois, cette interprétation ne convainc pas la partie algérienne, qui estime que l’arrestation a été menée sans notification préalable au chef de la mission consulaire, comme l’exige l’article 42 de la même convention.
L’arrestation en elle-même soulève de nombreuses interrogations sur son opportunité, sa légalité et ses conséquences. Le ministère algérien des Affaires étrangères, dans une note officielle datée du 12 avril 2025, déplore une violation flagrante du droit international, accusant la France de ne pas avoir respecté les obligations liées à la protection des agents consulaires en exercice. Il s’agirait selon Alger non seulement d’un manquement à l’obligation de notification immédiate mais aussi d’un non-respect de la nature même des fonctions consulaires, qui requièrent un minimum de garanties pour être exercées sans entrave.
Face au refus de Paris de relâcher son agent, l’Algérie a décidé de répondre par des mesures de réciprocité. Douze agents français rattachés à l’ambassade de France en Algérie ont été déclarés personae non grata et sommés de quitter le territoire algérien dans un délai restreint. Cette riposte diplomatique ferme marque un tournant dans les relations bilatérales, dans un contexte où les appels au dialogue sont de plus en plus supplantés par des démonstrations de fermeté. Suite à cela, la France a pris une décision similaire, en décidant d’expulser 12 agents consulaires algériens.
Cette affaire rappelle à bien des égards celle de Boualem Sansal, dont la situation inverse soulève une autre dimension du débat. Cet écrivain algérien, ayant acquis la nationalité française que depuis quelques mois, a été condamné par la justice de son pays à cinq ans de prison ferme pour atteinte à l’intégrité territoriale de l’Algérie. La France déploie tous les moyens diplomatiques à sa disposition pour obtenir sa libération, invoquant la liberté d’expression et les droits de l’homme, tout en s’immisçant de manière active dans une procédure judiciaire jugée indépendante par les autorités algériennes. Un parallèle qui, illustre un double standard dans la manière dont la France interprète l’indépendance de la justice selon qu’elle s’applique sur son propre sol ou dans un pays tiers.
Mustapha Richa rappelle également que le droit international offre à l’Algérie la possibilité d’exercer des contre-mesures, allant du rappel de son ambassadeur à la rupture partielle ou totale des relations diplomatiques, en passant par des sanctions ciblées. L’arrestation d’un agent consulaire sans respect du cadre juridique prévu pourrait être qualifiée d’acte illicite, donnant lieu à une réponse proportionnée. Dans un contexte géopolitique déjà tendu, une telle escalade n’est pas sans conséquences pour la coopération bilatérale, notamment dans les domaines migratoire, sécuritaire et économique.
Au-delà de l’aspect juridique, cette affaire réactive des sensibilités profondes dans les deux pays, liées à une histoire commune complexe. Elle pose également la question plus large de la cohérence dans l’application du droit international et du respect mutuel entre États souverains. Alors que la France insiste sur le caractère indépendant de sa justice, l’Algérie rétorque que ce principe doit valoir pour tous, sans exception, et s’appliquer avec la même rigueur lorsque c’est la justice algérienne qui statue.
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