En plein tumulte diplomatique entre Paris et Alger, une initiative parlementaire tente d’apaiser les tensions. Laurent Lhardit, député socialiste de Marseille, a pris la tête du groupe d’amitié France-Algérie à l’Assemblée nationale, dans un contexte où les relations bilatérales oscillent entre crispation et nécessité de dialogue. Avec 45 membres issus de différents courants politiques, ce groupe se veut un espace d’échanges, loin des discours tranchés qui dominent actuellement les débats publics.
Alors qu’Emmanuel Macron a récemment tenté de recadrer les positions de son gouvernement en appelant à un « dialogue respectueux », le ton reste tendu, notamment après les déclarations de Bruno Retailleau prônant un « rapport de force » avec Alger. Dans ce climat pesant, l’officialisation du groupe d’amitié, le 6 mars, résonne comme un contrepoids aux tensions. Parmi les figures engagées dans cette démarche, le député LFI des Bouches-du-Rhône, Sébastien Delogu, incarne cette volonté de dépasser les clivages partisans pour traiter de la relation franco-algérienne avec une vision constructive.
Le dossier algérien, qui occupe régulièrement le devant de la scène politique en France, a récemment été ravivé par plusieurs sujets sensibles, dont l’emprisonnement de l’écrivain Boualem Sansal et la gestion des Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF). Pour Laurent Lhardit, il est essentiel de ne pas réduire cette relation à une série de polémiques nationales. « Nous vivons un moment de tension avec l’emprisonnement de l’écrivain Boualem Sansal et la question des OQTF. Mais il faut prendre garde à ne pas ramener les relations France-Algérie à des combats de politiques intérieures avec le Premier ministre François Bayrou qui court après Bruno Retailleau, qui lui-même court après le Rassemblement National », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité d’un regard dépassionné sur ces questions.
Si le groupe d’amitié n’a pas pour mission de se substituer à la diplomatie officielle, il espère néanmoins jouer un rôle dans l’amélioration des relations entre les deux pays. Marseille, ville qui abrite une importante diaspora algérienne ainsi qu’une communauté pieds-noirs encore marquée par l’histoire, illustre parfaitement l’imbrication des destins des deux rives de la Méditerranée. « À Marseille, 300 000 personnes – des enfants ou petits-enfants d’Algériens, des pieds-noirs, etc. – ont un lien avec l’Algérie. Nous nous devons d’éclairer l’importance de cette relation à l’heure où chaque pays européen doit savoir sur quel allié il peut compter », souligne Lhardit, qui entend bien s’appuyer sur cette réalité sociologique pour impulser des actions concrètes.
L’agenda du groupe s’articule autour de plusieurs axes, avec en premier lieu la mémoire commune, enjeu sensible et central des relations franco-algériennes. Les cicatrices de la colonisation et de la guerre d’indépendance continuent de peser sur le dialogue entre les deux nations. Laurent Lhardit ambitionne donc de « poursuivre le travail de mémoire », dans la lignée des initiatives déjà entreprises pour apaiser les tensions mémorielles et favoriser un regard croisé sur l’Histoire.
Mais au-delà du passé, c’est aussi l’avenir des relations économiques qui préoccupe le groupe d’amitié. Les échanges commerciaux entre les deux pays, bien qu’intenses, restent freinés par des divergences politiques et administratives. La coopération maritime entre Marseille et les ports algériens figure parmi les priorités, avec la volonté de renforcer les connexions et les flux économiques transméditerranéens. « Renforcer nos échanges économiques via notamment les routes maritimes entre Marseille et les ports algériens » apparaît comme un levier stratégique pour dynamiser cette relation.
Pour lancer concrètement ses travaux, le groupe d’amitié France-Algérie a déjà sollicité une première audition avec l’ambassadeur de France en Algérie, Stéphane Romatet. Cette rencontre marquera le point de départ d’une série d’échanges visant à mieux comprendre les attentes de part et d’autre et à identifier les pistes de rapprochement possibles.
Reste à savoir si cette initiative parlementaire réussira à infléchir le climat tendu qui domine actuellement les relations franco-algériennes. Si le défi est de taille, le simple fait que des élus de divers horizons politiques s’engagent dans cette démarche montre que la volonté d’entretenir un dialogue constructif existe encore.
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