Dans un climat diplomatique devenu particulièrement tendu entre Paris et Alger, DNAlgérie a appris que, la France a récemment adopté deux mesures à l’encontre de l’Algérie qui soulèvent autant d’interrogations que d’étonnements.
La première mesure de la France contre l’Algérie consiste à retirer les emplacements de stationnement jusqu’alors réservés à la résidence de l’ambassadeur d’Algérie à Neuilly-sur-Seine, une commune huppée de la région parisienne. Une décision administrative qui, à première vue, peut sembler banale, mais qui envoie un signal diplomatique clair dans un contexte de crispation. La seconde décision est tout aussi surprenante : la municipalité de Neuilly, dirigée par Jean-Christophe Fromantin, a décidé d’imposer une redevance annuelle de 11 700 euros pour le portail de sécurité installé devant cette même résidence, un portail de sécurité pourtant discret et occupant à peine deux mètres carrés de surface.
Pour beaucoup d’observateurs, ces gestes s’apparentent davantage à des réactions d’humeur qu’à des actes diplomatiques structurés. D’autant plus que ces décisions interviennent dans un moment où la France semble chercher à reprendre la main dans un bras de fer symbolique, amorcé après une série de différends entre les deux capitales. En face, l’Algérie a choisi la voie du calme et de la rigueur institutionnelle, répondant aux différentes attaques par des déclarations diplomatiques mesurées. Le président Abdelmadjid Tebboune s’est montré ferme mais posé dans ses interventions, tandis que le ministère algérien des Affaires étrangères a pris soin de démonter, point par point, les accusations formulées par le ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau, dont certaines ont été qualifiées de calomnieuses par Alger.
Au sein même de la majorité présidentielle française, certaines voix ont exprimé leur malaise face à cette manière de gérer la relation franco-algérienne. Bruno Fuchs, député centriste réputé pour sa modération, a ainsi affirmé que la relation avec Alger est désormais « prise en otage par des manœuvres obscures », soulignant la disparition progressive des canaux classiques de dialogue. Ce commentaire reflète un sentiment partagé par plusieurs diplomates et analystes, qui notent un net recul du dialogue institutionnel entre les deux pays ces derniers mois.
La tension actuelle trouve son origine dans un événement survenu à Paris, où un employé consulaire algérien a été interpellé dans une affaire jugée floue, liée à un certain « Amir Dz ». En guise de réponse, l’Algérie a décidé d’expulser 12 diplomates français, une mesure forte qui a été immédiatement suivie par une mesure identique de la part de la France. Paris a également rappelé son ambassadeur pour consultation, un acte qui marque une rupture nette dans la continuité diplomatique habituelle.
Pourtant, le 31 mars dernier, les présidents Tebboune et Macron s’étaient entretenus par téléphone et avaient convenu d’une feuille de route destinée à sortir de l’impasse. Cet échange avait suscité l’espoir d’un retour progressif à la normalisation, mais des éléments intervenus en coulisses semblent avoir mis à mal ce fragile processus. Des actions menées par des acteurs non identifiés auraient saboté cette dynamique de réconciliation, relançant ainsi une nouvelle série de tensions, dont les deux récentes mesures prises à Neuilly-sur-Seine sont les dernières manifestations.
Face à cette situation, Alger envisage plusieurs options de rétorsion, fondées sur le principe de réciprocité, pierre angulaire de sa politique étrangère. L’une des mesures actuellement à l’étude consisterait à réduire la superficie de la résidence de l’ambassadeur de France à Alger, qui passerait de 4 hectares à un seul hectare. Par ailleurs, la surface de l’ambassade de France elle-même, occupant aujourd’hui 14 hectares, pourrait être réduite à 2 hectares seulement. Une autre piste envisagée serait de revoir à la hausse les loyers des bâtiments occupés par la mission diplomatique française. Ces loyers, qui n’ont pas évolué depuis plusieurs décennies et sont jugés symboliques, pourraient faire l’objet d’une réévaluation significative, potentiellement chiffrée à plusieurs millions d’euros par an.
Ces réponses algériennes, si elles venaient à être mises en œuvre, marqueraient un tournant important dans les relations bilatérales, qui semblent aujourd’hui plus fragiles que jamais. Car au-delà des symboles et des gestes ponctuels, c’est l’ensemble du socle diplomatique construit entre Paris et Alger depuis l’indépendance qui est mis à l’épreuve. Et dans ce jeu de réponses croisées, il est peu probable que le simple retrait d’un panneau de stationnement ou la taxation d’un portail suffisent à rétablir un dialogue que beaucoup considèrent désormais comme en état de mort clinique.