Alors même que les relations diplomatiques traversent une zone de turbulences entre les deux pays, la France continue d’entretenir un lien économique discret mais persistant avec l’Algérie. En témoignent les 80 tonnes de pastèques algériennes fraîchement exportées vers l’Hexagone, en date du 12 mai dernier, selon un communiqué officiel de la direction des services agricoles de Blida. Cette transaction illustre une nouvelle fois la vitalité de la coopération commerciale dans le domaine agricole, où les produits venus d’Algérie trouvent un écho favorable sur le marché français. Malgré la conjoncture politique, les échanges ne faiblissent pas, surtout lorsqu’il s’agit de produits frais à forte valeur ajoutée, issus du terroir algérien.
Cette première cargaison, bien que modeste, marque une avancée symbolique et stratégique pour les produits agricoles algériens, qui réussissent à s’imposer dans un espace aussi réglementé que celui de l’Union européenne. La pastèque, au-delà de son aspect rafraîchissant et estival, devient ici un produit ambassadeur, représentant les capacités d’adaptation des producteurs algériens aux normes sanitaires européennes. Elle rejoint ainsi une gamme déjà florissante de produits en provenance d’Algérie, comme les dattes, les tomates, les truffes et le miel, tous régulièrement expédiés vers plusieurs pays européens dont la France, l’Italie ou l’Espagne.
Le succès croissant de ces produits en France, en provenance d’Algérie, ne doit rien au hasard. Il est le fruit d’un effort structuré, conjuguant stratégie commerciale, qualité agricole et ouverture internationale. Ces dernières années, les producteurs algériens, soutenus par les autorités locales, ont misé sur la diversification, la labellisation et la participation à des salons internationaux pour séduire de nouveaux marchés. À ce titre, les produits agricoles issus du terroir algérien sont désormais plus visibles et mieux positionnés. En France, l’image de l’Algérie ne se limite plus aux exportations traditionnelles, mais s’étend à une palette de produits frais qui se distinguent par leur goût, leur authenticité et leur traçabilité.
Parmi les exemples les plus emblématiques figure la tomate cerise algérienne, désormais intégrée à un contrat d’export annuel de 3 millions de dollars avec la société saoudienne Goody, via la filiale Houkoul El Janoub du groupe Souakri. Bien que ce partenariat vise le marché du Golfe, il illustre la montée en gamme des produits agricoles algériens, qui deviennent compétitifs à l’international. Cette dynamique pourrait rapidement renforcer la présence de ces produits en France, où la demande pour des produits méditerranéens et naturels reste forte.
L’État algérien a également engagé un processus de labellisation pour valoriser certaines productions locales. La figue sèche de Béni Maouche a déjà obtenu le label d’Indication Géographique (IG), tandis que l’olive de table de Sig est en attente de validation finale. Ces signes distinctifs permettent de consolider la réputation des produits, en France comme dans d’autres marchés, et de mieux identifier leur origine algérienne.
Il est par ailleurs intéressant de constater que, malgré les tensions politiques actuelles, les produits agricoles continuent de tisser une forme de diplomatie douce entre la France et l’Algérie. Les échanges de produits, notamment dans le secteur agroalimentaire, restent vivaces et profitent autant aux producteurs algériens qu’aux distributeurs français, toujours en quête de produits de qualité. En France, les importateurs savent que les produits de l’Algérie peuvent répondre à une double exigence : l’authenticité du goût et le respect des normes.
L’exemple des 80 tonnes de pastèques envoyées récemment en France montre que l’économie suit parfois une logique différente de celle de la politique. Les produits agricoles algériens poursuivent leur percée, y compris dans un contexte diplomatique tendu. L’Algérie démontre ainsi sa capacité à maintenir un lien économique solide avec la France, en misant sur la force tranquille de ses produits du terroir.
Les entreprises algériennes continuent par ailleurs de se distinguer lors de leur retour sur les salons internationaux de l’agriculture. Elles y exposent des produits bio, techniques et innovants, consolidant encore l’image d’un secteur agricole en pleine transformation. À travers ces efforts, les produits agricoles de l’Algérie s’inscrivent désormais dans une logique de conquête maîtrisée des marchés extérieurs, dont la France reste un partenaire commercial incontournable malgré les aléas diplomatiques. Ainsi, en matière de produits alimentaires, la France et l’Algérie démontrent que l’échange peut parfois l’emporter sur les différends, autour d’intérêts communs comme celui du goût, de la saisonnalité et de la qualité.