Fadéla M’rabet : qui est cette Algérienne honorée avec ferveur en France ?

Fadéla M’rabet

Fadéla M’rabet, dont le nom résonne avec force dans les milieux intellectuels et féministes, a quitté ce monde le 14 mai 2025 à Paris, laissant derrière elle un héritage littéraire et militant remarquable. Cette Algérienne engagée, Fadéla M’rabet, a marqué son époque par son combat pour la liberté des femmes et pour une Algérie émancipée. À travers ses nombreuses publications telles que La femme algérienne (1965) ou Les Algériennes (1967), Fadéla M’rabet a offert une analyse profonde et courageuse des réalités sociales et politiques qui affectaient les femmes en Algérie, souvent au prix de controverses et d’oppositions.

Née dans une famille où son père prônait la réussite de ses filles, Fadéla M’rabet s’est toujours inscrite dans une dynamique d’avant-garde, brisant les barrières traditionnelles de son milieu à Skikda. Son parcours, qui l’a menée de l’Algérie vers Strasbourg, où elle fut l’une des premières étudiantes algériennes en France, révèle l’importance de son combat individuel et collectif. Durant la guerre d’indépendance, Fadéla M’rabet s’est engagée pleinement, participant aux grèves étudiantes et militant au sein du FLN, ce qui lui valut d’être renvoyée de son poste d’enseignante à Strasbourg. Ce militantisme et cette détermination sont palpables dans ses écrits et témoignent de la place centrale qu’occupe Fadéla M’rabet dans l’histoire de la lutte algérienne.

Les écrits de Fadéla M’rabet oscillent entre autobiographie, autofiction et analyse politique, comme dans Une femme d’ici et d’ailleurs où elle explore la tension entre ses racines algériennes et son parcours européen, entre nostalgie et espoir. Ce livre incarne la complexité de son identité, mais aussi la force d’une femme ayant su s’émanciper dans un contexte souvent hostile. La relation avec son mari, Tarik Maschino, militant lui aussi, a renforcé son engagement. Ensemble, ils ont publié L’Algérie des illusions en 1972, un ouvrage critique à l’égard des choix politiques post-indépendance et des défis liés à la condition féminine dans le pays.

La force de Fadéla M’rabet réside également dans son franc-parler face aux dérives sectaires et aux retours en arrière concernant les droits des femmes. Elle a toujours dénoncé l’hypocrisie et les faux-semblants, notamment au sein de l’Union des Femmes Algériennes des années 70, qu’elle accusait de défendre des causes étrangères tout en négligeant celles des femmes algériennes. Son franc-parler lui a valu des inimitiés, mais aussi le respect de nombreuses militantes qui ont fait d’elle un repère incontournable. Elle s’est opposée vigoureusement à l’intégrisme, accusant les femmes portant le hijab de renoncer à leur liberté, un point de vue qui illustre sa vision radicale et déterminée de la lutte féminine.

Fadéla M’rabet a aussi mis en lumière la condition difficile des femmes africaines, dénonçant la bigamie et les violences, et appelant à une solidarité entre femmes de tous horizons. Sa lutte incessante pour l’émancipation et la liberté n’a jamais faibli, même face aux obstacles sociaux et culturels les plus durs. La colère, la révolte, la quête de justice ont toujours animé Fadéla M’rabet, faisant d’elle une figure emblématique du féminisme algérien et un symbole de résistance.

Son décès a suscité un vibrant hommage en France, où de nombreux médias ont salué la mémoire de Fadéla M’rabet, soulignant son rôle de pionnière et son influence durable. Elle laisse derrière elle une œuvre riche et engagée, qui continue d’inspirer les combats pour les droits des femmes en Algérie et au-delà. La vie et l’œuvre de Fadéla M’rabet témoignent de la complexité des luttes identitaires, politiques et sociales, faisant d’elle un personnage incontournable pour comprendre l’histoire récente de l’Algérie et de sa diaspora.

Ainsi, Fadéla M’rabet restera dans les mémoires comme une romancière engagée, une militante infatigable et une femme qui a su faire entendre sa voix contre vents et marées. Son héritage est une invitation à poursuivre le combat pour la liberté, la dignité et l’égalité, au nom de toutes les femmes qu’elle a portées dans ses écrits et dans son action. Fadéla M’rabet, à la croisée des chemins entre mémoire et modernité, entre Algérie et France, incarne à jamais la force du militantisme et la puissance des mots.