Un climat lourd s’installe entre Paris et Alger, révélant une fois de plus la fragilité des relations bilatérales. En effet, les autorités françaises ont pris la décision d’expulser douze agents appartenant au réseau consulaire et diplomatique algérien présents sur le territoire français. Cette mesure, qualifiée de ferme mais proportionnée par l’Élysée, intervient en réponse directe à la décision algérienne du 13 avril dernier d’expulser, à son tour, douze fonctionnaires français du ministère de l’Intérieur. Le geste d’Alger visait à dénoncer l’arrestation, en France, de trois ressortissants algériens, dont un agent consulaire. Ces derniers sont soupçonnés, selon le parquet national antiterroriste français, d’avoir participé à l’enlèvement d’un opposant politique algérien très suivi sur les réseaux sociaux, connu sous le pseudonyme d’Amir DZ. Une affaire sensible, qui a rapidement franchi le seuil du judiciaire pour prendre une dimension diplomatique, et qui a poussé Macron à réagir.
Face à cet enchaînement de représailles, l’Élysée a tenu à rappeler que la France n’avait agi que dans le cadre de l’indépendance de la justice. Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, a ainsi affirmé que cette procédure judiciaire, entamée bien avant les récentes tensions, n’avait « rien à voir » avec le dialogue diplomatique relancé avec Alger depuis mars. Pourtant, les réactions en chaîne montrent que le malaise est profond et que chaque décision est perçue comme une provocation par l’autre camp. L’Algérie, par la voix de ses responsables, a revendiqué une décision « souveraine », rejetant toute forme d’ingérence et pointant directement Bruno Retailleau, actuel ministre de l’Intérieur français, comme principal responsable de l’escalade.
Macron lance un appel à l’Algérie
Le président Emmanuel Macron a donc réagi en conséquence, tout en annonçant le rappel pour consultations de l’ambassadeur français à Alger, Stéphane Romatet. Ce geste, symbolique mais grave de Macron, marque une rupture temporaire dans la continuité diplomatique entre les deux pays. Selon un communiqué de l’Élysée, « les autorités algériennes prennent la responsabilité d’une dégradation brutale de nos relations bilatérales », appelant cependant l’Algérie à « faire preuve de responsabilité » afin de restaurer le dialogue. Les fonctionnaires français expulsés par Alger ont, selon des sources diplomatiques, déjà quitté le territoire et sont « en route pour la France ».
Ce bras de fer s’inscrit dans un contexte plus large de crispation. Depuis plusieurs mois, les tensions entre la France et l’Algérie ne cessent de resurgir, parfois pour des questions mémorielles, parfois pour des motifs de sécurité. Le récent article du journal Le Figaro, titré « Pourquoi les consulats algériens sont de plus en plus nombreux en France », illustre également une forme de méfiance croissante de la classe politique française, notamment de ses courants les plus à droite, à l’égard des institutions algériennes sur le sol français. Ce média, réputé proche de Bruno Retailleau et des milieux sécuritaires, y voit un réseau consulaire trop peu coopératif dans les procédures d’éloignement des étrangers visés par des OQTF. Une critique à peine voilée qui alimente une rhétorique plus large de contestation contre la présence diplomatique algérienne.
Derrière ces décisions, se dessine un véritable affrontement entre deux souverainetés, chacune cherchant à affirmer sa légitimité sur des questions jugées cruciales pour sa sécurité nationale. L’affaire Amir DZ, au-delà de ses aspects judiciaires, cristallise désormais une opposition frontale entre Paris et Alger, où diplomatie et justice se mêlent dans un scénario aux relents de guerre froide. Les expulsions croisées et le rappel de l’ambassadeur sont des signaux forts, rarement observés depuis les grandes crises diplomatiques des décennies précédentes.
La situation reste évolutive. Si aucun camp ne semble prêt à faire marche arrière dans l’immédiat, les conséquences pourraient aller au-delà du simple échange d’agents diplomatiques. Des voix s’élèvent déjà en France pour réclamer une renégociation de l’accord migratoire de 1968, jugé trop favorable à l’Algérie. Un tel projet, s’il devait aboutir, pourrait rebattre durablement les cartes dans les relations franco-algériennes et ouvrir une nouvelle phase de tension diplomatique de longue durée.
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