Un réseau sophistiqué vient d’être mis au jour, révélant un trafic d’ampleur entre la France et l’Algérie, avec à la clé un préjudice estimé à 30 millions d’euros. L’affaire, dévoilée à Marseille, implique dix individus, dont cinq ont été placés en détention provisoire. Le fonctionnement du système s’étalait sur plusieurs années et utilisait les ports français comme plateformes d’expédition vers l’Algérie. Ce scandale, mêlant complicité, logistique et fraude à grande échelle, expose un circuit parfaitement organisé qui aurait permis l’écoulement de millions d’euros de marchandises vers l’Algérie depuis la France.
C’est en 2024 que les premières alertes sont apparues, mettant en lumière un flux anormal de biens entre la France et l’Algérie. Les enquêteurs, alertés par la répétition de procédures similaires, ont identifié un schéma récurrent. Le processus était simple mais redoutablement efficace : des biens étaient loués à l’étranger, convoyés jusqu’en France avant d’être signalés comme volés. Les réseaux prenaient alors soin de les modifier, maquiller, et d’obtenir des documents provisoires pour légaliser leur transfert. Une fois ces étapes franchies, les objets étaient discrètement envoyés vers l’Algérie via les installations portuaires françaises.
Le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, a précisé que près de 20 biens étaient expédiés chaque mois, créant une chaîne continue entre la France et l’Algérie. Le préjudice global, estimé à 30 millions d’euros, met en évidence la dimension financière de cette fraude qui a enrichi ses auteurs tout en affaiblissant la confiance dans les circuits logistiques légitimes reliant la France à l’Algérie. Une partie de ces millions d’euros provenait directement de ces expéditions, rendues possibles grâce à des complicités internes au sein du Grand Port Maritime de Marseille.
Les suspects bénéficiaient de soutiens bien placés. Certains agents portuaires sont soupçonnés d’avoir facilité l’accès à des zones sensibles en échange de sommes d’argent. Ces individus permettaient l’entrée des cargaisons dans des hangars situés en zone sécurisée, à l’abri des regards et des contrôles. Là, les opérations de camouflage et de préparation pouvaient s’opérer dans la plus grande discrétion. Cette infiltration, dans l’un des plus importants ports de France, démontre à quel point les réseaux criminels parviennent à contourner les dispositifs de sécurité pour faire transiter des millions d’euros en marchandises vers l’Algérie.
Une information judiciaire a été ouverte le 30 janvier 2025. La Division de la Criminalité Territoriale et le Groupe Interministériel de Recherche ont mené des investigations complexes. Les méthodes utilisées comprenaient des filatures, des écoutes, et des surveillances vidéo. Grâce à ce travail minutieux, les agents ont pu cartographier toute l’organisation, de la France jusqu’à l’Algérie, en passant par chaque intermédiaire, et mettre un terme à ce réseau générant des millions d’euros illégalement.
Le 22 mai, une opération de grande envergure a permis l’interpellation de dix suspects. Lors des perquisitions, la police a saisi plus de 60 000 euros en espèces, douze biens de grande valeur, des montres de luxe et du matériel utilisé dans le processus de transformation. Ces éléments confirment l’ampleur du préjudice financier. Présentés entre le 24 et le 26 mai devant le juge d’instruction, tous les suspects ont été mis en examen pour recel en bande organisée, blanchiment et faux. Cinq ont été incarcérés, les autres placés sous contrôle judiciaire.