En 2022, une année marquée par un scandale sanitaire majeur, la multinationale Ferrero, célèbre pour ses marques Nutella et Kinder, s’est également retrouvée au cœur d’une affaire fiscale en France. Cette année-là, le groupe italien, domicilié au Luxembourg, a été contraint de rapatrier 115 millions d’euros en France, à la suite d’un redressement fiscal. Un coup dur pour l’empire Ferrero, déjà fragilisé par la crise des Kinder contaminés à la salmonelle, qui avait envoyé des dizaines d’enfants à l’hôpital. Cependant, l’aspect financier de cette affaire est resté discret pendant longtemps avant de se voir divulgué au cours de ces derniers jours, bien que les répercussions soient importantes. La marque qui aurait tout fait pour bloquer l’arrivée de la pate algérienne en France voit ainsi son image ternie.
Ferrero, dont l’activité principale repose sur la confiserie, génère un chiffre d’affaires annuel de 17 milliards d’euros. Fondée il y a plus de cinquante ans, la multinationale a choisi d’installer son siège au Luxembourg, un paradis fiscal notoire. Au cœur de cet empire financier se trouve la holding Schenkenberg, qui détient toutes les filiales du groupe à travers le monde. Avec 104 entreprises sous son contrôle, cette entité aurait permis à la famille Ferrero de bénéficier de dividendes massifs, évalués à plus de 10 milliards d’euros sur les vingt dernières années. Et ce, quasiment sans impôt, grâce aux avantages fiscaux du Luxembourg.
Selon un journaliste italien qui a enquêté sur l’empire Ferrero, cette stratégie d’évasion fiscale a permis au groupe de réaliser des économies colossales. « Si Ferrero International et Schenkenberg étaient basés en Italie, ils paieraient beaucoup plus d’impôts », souligne-t-il. Les contribuables italiens, tout comme les Français, sont ainsi les grands perdants de ce système d’optimisation fiscale sophistiqué. Cette pratique, bien que légale, soulève de nombreuses questions éthiques, surtout lorsque l’on considère les milliards d’euros que Ferrero a pu soustraire à l’impôt.
En France, les choses se sont compliquées pour Ferrero en 2022. Quelques mois après l’éclatement du scandale sanitaire lié à la contamination de Kinder à la salmonelle, un contrôle fiscal a révélé que la branche commerciale de Ferrero France n’avait pas été correctement rémunérée pour ses activités entre 2015 et 2021. Ferrero France Commerciale, qui distribue bonbons, chocolats et pâte à tartiner dans l’Hexagone, génère un chiffre d’affaires annuel moyen de 1,3 milliard d’euros. Cependant, durant six années, le siège luxembourgeois du groupe aurait « oublié » de lui verser une rémunération adéquate pour son travail.
Cette omission n’a pas échappé aux services fiscaux français, qui ont exigé que Ferrero rapatrie 115 millions d’euros en France. Sur cette somme, près de 45 millions ont été récupérés par le Trésor public français. Me Eric Lecocq, avocat fiscaliste et ancien inspecteur des impôts, a expliqué à l’émission Complément d’enquête que cet acte de gestion, bien qu’il ne soit pas totalement illégal, a été jugé « anormal » par Bercy, d’où la nécessité du redressement fiscal.
Pour sa défense, la filiale française de Ferrero a précisé qu’elle avait mis en œuvre une procédure de régularisation spontanée et qu’elle n’avait écopé d’aucune majoration ni pénalité fiscale. En d’autres termes, le groupe a collaboré avec les autorités fiscales pour régulariser la situation, sans pour autant être lourdement sanctionné. Néanmoins, cette affaire met en lumière les pratiques d’optimisation fiscale de grandes multinationales comme Ferrero, qui profitent des failles du système pour réduire leurs obligations fiscales dans des pays où elles réalisent pourtant des profits conséquents.
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