Depuis l’arrivée de Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur, la politique migratoire en France a pris un virage significatif. À peine installé, Retailleau a annoncé son intention de réduire drastiquement le nombre de régularisations de sans-papiers, un engagement qui s’inscrit dans un durcissement général de la politique migratoire du gouvernement. Cette décision concerne particulièrement la circulaire Valls de 2012, qui permettait la régularisation de 30 000 travailleurs sans-papiers chaque année. L’ère de cette régularisation plus souple semble désormais révolue, alors même que le gouvernement Barnier a chuté le 4 décembre dernier, précipité par une motion de censure du Parlement. Cette déstabilisation politique survient alors que la réforme de la circulaire Valls, censée assouplir les critères de régularisation, n’a toujours pas été mise en place.
Le contexte politique semble avoir favorisé un durcissement des pratiques administratives, et ce, bien avant l’officialisation des nouvelles règles. Selon plusieurs sources, les préfets, dont la mission est de gérer les demandes de régularisation et d’asile, n’ont pas attendu les textes législatifs finaux pour appliquer les directives de Retailleau. Cette initiative a eu pour effet d’aggraver encore une situation déjà tendue depuis plusieurs années. Le dépôt des demandes de régularisation était devenu un véritable parcours du combattant, et désormais, les associations et syndicats dénoncent un blocage systématique des demandes de titres de séjour.
La préfecture de police de Paris, l’une des plus importantes de France en matière de régularisation, illustre parfaitement ce durcissement. Selon le journal Le Monde, les réunions destinées à examiner les dossiers de régularisation ont été suspendues depuis la rentrée, et les syndicats n’ont plus d’audience depuis novembre dernier. La CGT, qui jusqu’ici avait la possibilité de faire examiner une trentaine de dossiers chaque mois, se trouve dans l’incapacité d’agir, déplorant cette interruption brutale des échanges. La situation semble ainsi figée, et les sans-papiers qui espéraient une issue légale à leur situation se voient désormais privés de toute possibilité de régularisation.
Du côté du ministère de l’Intérieur, la situation est décrite comme une phase de « préparation » de la nouvelle circulaire. Cependant, cette annonce laisse un goût d’incertitude dans l’air, d’autant plus que l’actualisation des règles dépendra du prochain ministre de l’Intérieur, dont la nomination sera décidée par le Premier ministre François Bayrou, récemment nommé à la tête du gouvernement. Cette incertitude politique alimente un climat de tension et de confusion, particulièrement pour les travailleurs en situation irrégulière qui vivent dans l’angoisse d’une régularisation impossible.
Les syndicats, quant à eux, ne cachent pas leur inquiétude face à cette situation. Selon eux, la consigne nationale semble désormais de bloquer toutes les demandes de régularisation, ce qui pourrait avoir des conséquences dramatiques pour de nombreuses familles. « Demander une régularisation devient un chemin semé d’embûches, et cela va générer un ressentiment énorme. Mais ce qui est encore plus grave, c’est que cette politique ferme la porte à des situations de grande vulnérabilité, comme des cas de traite des êtres humains, qui ne pourront plus être mis en lumière », souligne une militante de la CGT-Paris.
Parallèlement à la paralysie des régularisations, les Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF) se multiplient. Selon les informations rapportées par Le Monde, les préfectures ont considérablement augmenté la délivrance de ces mesures d’expulsion, en particulier depuis l’instauration de la nouvelle loi sur l’immigration. Les OQTF peuvent désormais être émises même pour des demandes de titre de séjour liées à des personnes ayant déjà reçu une OQTF, parfois ancienne, ou en raison de documents jugés falsifiés. Ce durcissement, bien qu’il ait existé de manière marginale par le passé, est désormais systématique, renforçant le sentiment d’une politique migratoire de plus en plus répressive.
Cette politique, qui semble privilégier les expulsions plutôt que la régularisation des travailleurs en situation irrégulière, soulève des inquiétudes tant sur le plan humain que sur celui de l’efficacité sociale. Les associations d’aide aux migrants dénoncent une approche qui pourrait fragiliser davantage les travailleurs étrangers et précaires, les poussant dans des situations de plus grande vulnérabilité.
En somme, la France traverse une période charnière dans sa gestion des demandes de régularisation et des OQTF. Si le gouvernement actuel semble déterminer à durcir les règles, il reste à savoir quelles seront les conséquences sur le terrain, tant pour les sans-papiers que pour la société dans son ensemble. La situation semble plus que jamais prête à diviser les opinions publiques et à susciter des débats sur la nature et les priorités de la politique migratoire française.
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