Alors que l’hypothèse de la suppression de l’abattement fiscal des retraités, y compris les Algériens, fait grand bruit dans les milieux politiques et sociaux en France, une déclaration récente du ministre de la Justice Gérald Darmanin a jeté un pavé dans la mare, en prenant à contrepied la position envisagée par Bercy. Cette mesure, qui toucherait directement plusieurs millions de retraités, y compris les nombreux retraités algériens vivant en France, semble ne pas recueillir l’adhésion du garde des Sceaux. Sur le plateau de franceinfo, le jeudi 24 avril, le ministre a exprimé ses réserves quant à cette proposition, qui figure parmi les pistes envisagées pour permettre à l’État de réaliser jusqu’à 5 milliards d’euros d’économies dans le cadre du budget 2026.
Le projet gouvernemental de supprimer l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions de retraite suscite l’inquiétude croissante des seniors. Cette disposition fiscale, en place depuis plusieurs décennies, permet à une grande majorité de retraités, y compris ceux issus de l’immigration algérienne, de bénéficier d’un allègement d’impôt non négligeable sur leurs revenus. Sa disparition signifierait non seulement une hausse mécanique de l’impôt pour ceux déjà imposés, mais rendrait aussi imposables de nombreux autres retraités jusque-là exonérés. Pour les retraités algériens, souvent confrontés à des pensions modestes et à des charges de vie importantes, cette éventualité est perçue comme une nouvelle pression fiscale injuste.
Gérald Darmanin a tenu à rappeler que, même si l’idée de faire des économies dans le champ social n’est pas dénuée de fondement, il ne fallait pas se tromper de cible. Selon lui, le problème réside davantage dans le système de retraite lui-même que dans le profil des retraités. Il a ainsi affirmé qu’il ne croyait pas aux solutions fondées uniquement sur des coupes budgétaires systématiques. Pour lui, une réforme en profondeur s’impose : « Il y a un sujet de retraites mais pas forcément un sujet de retraités », a-t-il déclaré, insistant sur le fait que l’approche par le rabot n’est ni durable ni juste. « Les mesures qui consistent à ne faire que du rabot budgétaire, on les fait parfois parce qu’on est pris à la gorge, mais ce ne sont pas des mesures pérennes », a-t-il ajouté, plaidant pour un changement de modèle.
Ce changement de modèle, Gérald Darmanin le conçoit comme un équilibre entre la répartition et la capitalisation. Il a ainsi évoqué l’idée d’un système à deux piliers : d’un côté la répartition classique, où les cotisations des actifs financent les pensions actuelles ; de l’autre, une forme de capitalisation individuelle, permettant à chacun de préparer sa propre retraite en parallèle. Cette vision, qui s’écarte des dogmes traditionnels de la sécurité sociale française, ambitionne d’offrir plus de souplesse tout en garantissant une certaine stabilité pour les générations futures.
Face à cette déclaration, les regards se tournent vers les autres membres du gouvernement. La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, avait récemment exprimé une position différente, laissant entendre que les actifs ne peuvent pas indéfiniment supporter seuls le poids du financement du vieillissement de la population. Elle avait ainsi déclaré au Parisien : « Ce n’est pas votre âge qui doit définir votre contribution, mais aussi les moyens dont vous disposez », ouvrant clairement la porte à la suppression de l’abattement.
Pour les retraités algériens en France, qui représentent une part importante de la communauté senior étrangère, les propos de Darmanin sont perçus comme un soutien de poids dans un contexte de précarisation croissante. Ces retraités, souvent installés depuis des décennies, ont contribué au tissu économique et social du pays et continuent de faire face à des conditions de vie parfois difficiles. Le maintien de l’abattement fiscal constitue, pour beaucoup, un filet de sécurité leur permettant de conserver un équilibre budgétaire fragile.
Si les débats autour du budget 2026 promettent d’être animés, la prise de position du ministre de la Justice vient rebattre les cartes, en posant la question de la justice sociale au cœur du débat fiscal. Reste à savoir si ce soutien affiché se traduira par une inflexion de la ligne gouvernementale, alors que les arbitrages définitifs restent encore à venir. Pour l’heure, les retraités, et en particulier les retraités algériens, gardent un œil attentif sur les prochaines déclarations et décisions qui viendront façonner leur avenir financier.