France : Menacée par Retailleau, Air Algérie reçoit un soutien de taille

Air Algérie demi-tour France

La tension entre la France et l’Algérie vient une nouvelle fois de monter d’un cran après les accusations du ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, contre Air Algérie. Cette dernière se retrouve sous la menace de sanctions suite à son refus d’embarquer certains ressortissants algériens sous le coup d’une décision d’éloignement. Pourtant, face à ces attaques, la compagnie nationale a reçu un soutien de poids : celui de l’agence officielle Algérie Presse Service (APS), qui a publié une analyse détaillée réfutant point par point les affirmations françaises.

Le différend prend racine dans une question épineuse : l’expulsion de ressortissants algériens en situation irrégulière en France. Depuis plusieurs années, ce sujet est une source de friction récurrente entre les deux pays. La France reproche à l’Algérie de ne pas délivrer suffisamment de laissez-passer consulaires permettant l’expulsion de ces personnes, ce qui empêche leur éloignement. De son côté, l’Algérie conteste les méthodes utilisées par Paris, notamment l’envoi de listes unilatérales et le recours à des mesures coercitives. Cette situation s’est encore envenimée avec la récente sortie de Bruno Retailleau, qui a accusé l’Algérie de « ne pas respecter ses engagements internationaux » et menacé Air Algérie de représailles.

Dans sa réponse, l’APS a développé cinq arguments majeurs pour démonter les accusations françaises. Tout d’abord, elle rappelle que la transmission de listes de ressortissants algériens à expulser ne repose sur aucun accord officiel entre les deux pays. En d’autres termes, Paris tente d’imposer une procédure qui n’a aucune base légale et qui ne respecte pas les pratiques développées depuis plus de trente ans. L’Algérie estime que toute expulsion doit passer par une concertation entre les autorités consulaires et les préfectures françaises, et non par des décisions unilatérales assorties de menaces.

Deuxièmement, l’APS met en avant l’importance de la protection consulaire. Selon elle, la véritable bataille ne concerne pas seulement les expulsions, mais aussi le droit de l’Algérie à assurer la protection de ses ressortissants à l’étranger. La convention consulaire de 1974 entre les deux pays oblige la France à notifier toute mesure privative de liberté à l’encontre d’un Algérien. Or, d’après l’agence algérienne, cette obligation est régulièrement ignorée par Paris, qui tente de contourner les dispositions légales pour accélérer les expulsions.

Le troisième point soulevé par l’APS concerne la Convention de Chicago, un texte qui régit l’aviation civile internationale. Retailleau accuse Air Algérie de violer cette convention en refusant d’embarquer certains passagers sous le coup d’une mesure d’éloignement. Pourtant, comme le souligne l’agence algérienne, cette accusation ne repose sur aucun fondement juridique. La Convention de Chicago ne contient aucune disposition obligeant une compagnie aérienne à embarquer des passagers contre son gré, surtout si ces derniers ne disposent pas des documents de voyage requis.

Le quatrième argument avancé par l’Algérie porte sur les restrictions imposées aux titulaires de passeports diplomatiques algériens. Retailleau s’est vanté d’avoir mis en place des mesures de restrictions à l’encontre de certains responsables algériens. Or, selon l’APS, ces mesures violent directement un accord bilatéral signé en 2013, qui prévoit des exemptions de visa pour certaines catégories de passeports. En ne respectant pas cet accord, la France se place donc elle-même en infraction avec ses engagements internationaux.

Enfin, l’APS revient sur l’annonce d’une éventuelle suspension de l’accord franco-algérien de 2013 sur l’exemption de visa pour les titulaires de passeports diplomatiques et de service. L’agence rappelle que cet accord prévoit des mécanismes précis en cas de suspension ou de dénonciation, notamment une obligation de notification officielle. Or, Paris semble vouloir contourner ces procédures en multipliant les effets d’annonce, ce qui s’éloigne des pratiques diplomatiques usuelles.

Ces cinq éléments, selon l’APS, démontrent que la France instrumentalise le dossier des expulsions à des fins politiques, en accusant l’Algérie de pratiques dont elle-même se rend coupable. L’Algérie ne refuse pas de coopérer, mais elle exige que cela se fasse dans un cadre légal et respectueux des accords bilatéraux. De son côté, Air Algérie, en tant que compagnie nationale, applique simplement les règles en vigueur et n’a aucune obligation de se plier aux injonctions françaises lorsqu’elles violent les principes internationaux.

Derrière ce bras de fer, des enjeux bien plus larges se dessinent. La crise migratoire est un sujet ultra-sensible en France, et le gouvernement cherche à donner des gages à une opinion publique de plus en plus hostile à l’immigration. En pointant du doigt l’Algérie et en menaçant Air Algérie, Bruno Retailleau cherche sans doute à détourner l’attention des véritables problèmes structurels liés à l’immigration en France. Cependant, cette stratégie risque de détériorer encore un peu plus les relations entre les deux pays, qui traversent déjà une période de froid diplomatique.

Du côté algérien, la position est claire : il n’est pas question de céder à des pressions considérées comme abusives. L’Algérie entend défendre ses ressortissants et exiger que toute procédure d’éloignement respecte les règles établies. Dans cette optique, le soutien apporté par l’APS à Air Algérie revêt une importance particulière, car il traduit une position officielle de l’État algérien. Ce n’est donc pas seulement une question aérienne ou consulaire, mais un véritable bras de fer diplomatique qui s’inscrit dans un contexte plus large de relations complexes entre Alger et Paris.

Alors que les tensions ne cessent de s’accumuler, une question demeure : jusqu’où ira cette escalade ? La France choisira-t-elle de durcir encore le ton en appliquant des sanctions contre Air Algérie, au risque de provoquer une réponse forte de l’Algérie ? Ou bien finira-t-elle par opter pour la voie du dialogue, en acceptant de revoir ses pratiques en matière d’expulsions ? L’avenir le dira, mais une chose est certaine : la compagnie nationale algérienne peut compter sur un soutien indéfectible face aux menaces françaises.

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