France : un Algérien condamné pour son rôle de « nourrice »

Tribunal Habitants Alger Français Prosélytisme Algérie Française État algérien France

Récemment, une opération menée dans un immeuble de la rue Henri-Dunant à Creil a mis au jour un maillon discret mais essentiel d’un trafic de stupéfiants bien rodé. Ce jour-là, les forces de l’ordre, accompagnées d’un chien de l’unité cynophile, ciblent un bâtiment déjà connu de leurs services. Tandis que le chien s’arrête devant une porte suspecte, à l’extérieur, des policiers municipaux aperçoivent une silhouette jeter un sac par la fenêtre. Le sac est rapidement récupéré par les fonctionnaires, et il contient 77,3 grammes de cocaïne ainsi qu’une balance de précision. La scène, aussi rapide qu’inattendue, mène à l’interpellation de Kada S., un Algérien de 39 ans, en situation irrégulière en France, et sous OQTF.

À l’intérieur de l’appartement, les policiers découvrent aussi des gélules de Prégabaline, un médicament détourné de son usage médical initial et parfois utilisé à des fins récréatives ou comme coupe-faim pour des produits illicites. Les premières constatations révèlent que l’homme interpellé n’est pas le locataire du logement. Sur son téléphone, les enquêteurs trouvent une trentaine de photographies représentant des pochons de cocaïne, renforçant les soupçons autour de son implication dans l’affaire. Présenté ce jeudi devant le tribunal correctionnel de Senlis, Kada S. a été condamné à six mois de prison ferme, avec maintien en détention. C’est en effet ce que détaille le média français Le Parisien.

Lors de son audience, l’homme a reconnu avoir jeté le sac par la fenêtre, invoquant la panique causée par l’arrivée des policiers. Il nie en revanche toute implication directe dans le trafic : « Cette drogue n’est pas à moi. Je dormais dans une voiture et on m’a proposé de dormir dans cet appartement. Il y a des gens qui viennent et qui se servent. » Pour la défense, il est clair que l’homme n’a pas été placé dans cet appartement par hasard. Son avocate, Me Carine Barba Stelmach, a insisté sur sa vulnérabilité et sa précarité pour tenter d’expliquer sa présence sur les lieux : « Il est en situation précaire, on s’est servi de sa misère pour l’utiliser dans un trafic de stupéfiants. On a profité de lui pour en faire une sorte de gardien. »

Cette affaire soulève une problématique bien connue des services judiciaires et des associations d’aide aux personnes en situation irrégulière : l’exploitation de la précarité par les réseaux criminels. Appelé dans le jargon policier une « nourrice », le rôle de Kada S. aurait été de garder temporairement la marchandise pour le compte de dealers, souvent contre un logement de fortune ou quelques billets. Une méthode fréquemment utilisée dans les cités sensibles, où les réseaux préfèrent déléguer la détention physique des produits à des individus qu’ils jugent « jetables », pour minimiser les risques en cas d’intervention des forces de l’ordre.

L’histoire de Kada S. s’ajoute à une longue liste de dossiers où la frontière entre la victime et le complice reste floue. La justice a toutefois tranché : les éléments matériels, tels que les photos sur son téléphone et la présence de produits stupéfiants dans le logement, ont pesé dans la balance. Sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), l’homme n’avait pas respecté son obligation d’assignation à résidence. Ce manquement a également été retenu contre lui au moment du jugement. Son profil, entre errance, survie et implication indirecte, n’aura pas suffi à lui épargner l’incarcération.

Ce type d’affaires rappelle que derrière les grands réseaux de trafic, se trouvent souvent des hommes invisibles, en marge de la société, recrutés pour leur silence et leur solitude. La condamnation de l’Algérien établi de manière irrégulière en France illustre la manière dont certaines failles sociales sont instrumentalisées par des organisations plus structurées, bien conscientes du peu de défense dont disposent ces « pions » dans l’échiquier du trafic. Le tribunal de Senlis a donc décidé de ne pas se laisser attendrir par ce contexte, préférant sanctionner la participation, même passive, à un système illégal.

Lire également :

Allocation touristique de 750 euros : un changement inattendu appliqué ?

Change euro dinar : les Algériens de France face à une nouvelle alerte

France : un Algérien affirme avoir « bossé 12 heures pour 7 euros »