Le gouvernement français s’apprête à franchir une étape majeure en matière de politique migratoire avec une circulaire signée par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Ce texte, daté du 21 mars, marque un tournant significatif en ciblant les détenus étrangers éligibles à une expulsion, en mettant fin au renouvellement des titres de séjour pour ces personnes. Cette mesure s’inscrit dans une volonté affichée du gouvernement de lutter contre la surpopulation carcérale et d’accélérer les expulsions des étrangers condamnés en France.
Le ministre met en avant un constat alarmant : les prisons françaises comptent actuellement plus de 19 000 détenus étrangers, soit près d’un quart de la population carcérale totale. Cette situation, couplée à une surpopulation atteignant 82 000 détenus pour seulement 62 000 places disponibles, pousse les autorités à actionner tous les leviers possibles pour libérer de l’espace. Parmi ces mesures, le transfèrement des détenus étrangers vers leur pays d’origine est perçu comme une solution incontournable.
Dans cette optique, la circulaire exige un repérage systématique des détenus étrangers dès le début de la procédure judiciaire. Les procureurs et les directeurs de prison devront assurer un suivi rigoureux de chaque étape de l’exécution de leur peine afin de faciliter leur expulsion à la fin de leur incarcération. Ce dispositif repose sur une collaboration accrue entre les services de la Justice, les préfectures et le ministère des Affaires étrangères, notamment pour accélérer l’obtention des laissez-passer consulaires nécessaires à ces expulsions.
Par ailleurs, la circulaire préconise un recours accru aux mesures de libération anticipée sous condition d’expulsion. Ce dispositif permet d’expulser un étranger incarcéré ayant purgé la moitié de sa peine en France, à condition que son identité soit établie et qu’il fasse déjà l’objet d’une interdiction de territoire. L’objectif est clair : libérer des places en prison tout en garantissant que ces individus ne restent pas sur le sol français après leur condamnation.
Arrêt immédiat du renouvellement des titres de séjour : ce qu’il faut savoir
Mais la décision qui suscite le plus de réactions concerne l’arrêt immédiat du renouvellement des titres de séjour pour les détenus étrangers. Jusqu’à présent, certains bénéficiaient encore de cette possibilité depuis leur cellule ou lors de permissions de sortie. Désormais, cette pratique est stoppée net, avec une justification assumée par le ministre : il est bien plus simple d’expulser une personne en situation irrégulière qu’une personne détenant un titre de séjour valide. Cette disposition vise ainsi à rendre les expulsions plus efficaces en limitant les obstacles administratifs et juridiques liés au statut des détenus.
Le gouvernement entend également intensifier la coopération avec les pays d’origine des détenus afin de faciliter les transfèrements. Une décision-cadre européenne, déjà transposée en droit français, permet de renvoyer des ressortissants de l’Union européenne dans leur pays d’origine pour qu’ils y purgent leur peine. L’exécutif souhaite désormais étendre cette logique à d’autres États partenaires.
Cette circulaire, bien que présentée comme une réponse pragmatique à la crise de la surpopulation carcérale, soulève de nombreuses questions juridiques et éthiques. Les associations de défense des droits des étrangers s’inquiètent d’un traitement discriminatoire à l’égard des détenus non-français et d’une logique qui pourrait mener à des expulsions expéditives sans garanties suffisantes.
L’application de cette circulaire risque aussi de poser des difficultés logistiques. Tous les pays d’origine des détenus accepteront-ils de les reprendre ? L’obtention des documents de voyage nécessaires sera-t-elle aussi rapide que le prétend le gouvernement ? Ces incertitudes demeurent alors que la mise en œuvre de cette politique devrait être surveillée de près dans les mois à venir.
Quoi qu’il en soit, cette décision marque une nouvelle étape dans le durcissement de la politique migratoire française. En conditionnant plus strictement le maintien sur le territoire français aux critères de sécurité et de justice, le gouvernement envoie un signal fort. Reste à voir si cette approche portera ses fruits sur le plan opérationnel et juridique, ou si elle donnera lieu à de nouveaux débats sur le respect des droits fondamentaux des détenus étrangers.
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