En France, une médecin algérienne se retrouve au cœur d’une affaire administrative qui soulève de nombreuses interrogations sur le sort réservé aux praticiens étrangers. Sophia, médecin algérienne exerçant en France depuis un an et demi, a vu son parcours basculer après avoir reçu une lettre officielle lui intimant de restituer la somme de 34.000 euros. Cette médecin algérienne, installée en Seine-et-Marne et en poste au Grand Hôpital de l’Est Francilien (GHEF), occupait la fonction de PADHUE, c’est-à-dire praticienne à diplôme hors Union Européenne. À travers son cas, c’est une nouvelle fois la précarité des médecins étrangers en France qui est mise en lumière, dans un système hospitalier où les contradictions ne cessent de se multiplier.
Comme 46 autres professionnels de santé dans la même situation, elle aurait bénéficié, durant dix-huit mois, d’une prime censée renforcer l’attractivité de certains services en tension. Cette prime, versée chaque mois, avait pour objectif de compenser les faibles salaires attribués aux stagiaires associés, qui, comme dans son cas, percevaient environ 1.500 euros par mois. L’administration hospitalière lui avait proposé cette indemnité comme un complément, dans le cadre d’un accord oral validé en interne. Ce geste, présenté comme un moyen d’attirer des compétences étrangères dans des établissements sous pression, s’est transformé en une injonction brutale à rembourser une somme équivalente à près de deux années de revenus. Sophia, médecin algérienne intégrée à une équipe médicale en France et engagée dans une dynamique de soins, n’a jamais imaginé que son parcours prendrait une tournure aussi kafkaïenne.
Dans un témoignage diffusé sur TF1, elle exprime un profond sentiment d’injustice : « Ce qui est révoltant, c’est qu’ils nous ont attirés avec cette prime, ils n’ont pas respecté le contrat. C’était un mélange de colère, de trahison, de tristesse. » Des mots lourds de sens qui traduisent un véritable malaise vécu par ces professionnels venus en France pour exercer leur métier avec engagement et dignité. D’autres soignants se retrouvent dans une situation similaire, certains devant même rembourser des montants dépassant les 60.000 euros. Ils dénoncent une pression psychologique permanente, entre obligation de remboursement et peur de perdre leur statut.
L’administration hospitalière explique cette situation par une erreur imputée à la précédente direction. Ces primes auraient été attribuées en dehors du cadre réglementaire, ce qui justifie, selon les autorités, leur récupération. Une proposition d’étalement des remboursements sur plusieurs mois a été mise sur la table, mais elle reste loin de calmer les esprits. Du côté des défenseurs des médecins concernés, l’argument est clair : « L’administration qui commet une faute doit en réparer le préjudice », plaide Me Delphine Krzisch, avocate de plusieurs praticiens.
Mais le problème ne se limite pas à une question financière. En France, les médecins algériens dans cette situation sont juridiquement coincés. Ils ne peuvent pas démissionner sous peine de perdre la reconnaissance de leur diplôme et l’équivalence qui leur permet d’exercer. Ce blocage administratif les enferme dans un cercle vicieux, où il est presque impossible de défendre ses droits sans mettre en péril sa carrière. Certains choisissent de se mettre en arrêt maladie pour protester, d’autres gardent le silence, espérant une issue moins violente.
Dans ce contexte tendu, la médecin algérienne concernée, tout comme ses confrères étrangers en poste en France, soulève malgré elle un débat bien plus large sur la reconnaissance, la régularisation et la juste intégration des praticiens étrangers dans le système de santé français. Ces femmes et ces hommes venus de l’étranger, dont beaucoup comme cette médecin algérienne formée en Algérie, assurent une grande partie des soins dans les hôpitaux français, sont aujourd’hui confrontés à des décisions administratives qui remettent en cause leur stabilité, leur engagement et parfois même leur dignité.