Le parcours de certains médecins étrangers en France est souvent semé d’embûches administratives et professionnelles. C’est le cas du docteur N.S., une médecin algérienne talentueuse, aujourd’hui au cœur d’une affaire judiciaire après sa suspension de l’hôpital de Pontoise, dans le Val d’Oise, en région Ile de France. Une situation qui suscite indignation et interrogations sur les conditions d’exercice des médecins diplômés hors de l’Union européenne.
Spécialisée en médecine d’urgence, N.S. a intégré l’hôpital de Pontoise après un parcours exemplaire. Diplômée en Algérie, elle a brillamment réussi les épreuves de vérification des connaissances (EVC), un examen imposé aux praticiens formés hors de l’UE. Son classement, septième sur 564 candidats, avec une note de 15,49/20, atteste de ses compétences et de son engagement. Depuis 2017, elle a exercé dans divers hôpitaux français, notamment à Creil, Argenteuil et Reims, avant de revenir à Pontoise.
Cependant, en décembre 2023, la carrière de la médecin algérienne établie en France prend un tournant brutal, selon Actu.fr. Un patient de 54 ans se présente aux urgences avec des douleurs aux jambes. Diagnostiqué par le docteur N.S. comme souffrant d’une sciatique, il est renvoyé chez lui avec une prescription pour des examens complémentaires. Le lendemain, il est admis aux urgences d’Argenteuil, où une embolie pulmonaire grave est détectée. L’affaire prend une dimension judiciaire lorsque le patient porte plainte contre l’hôpital de Pontoise. En conséquence, la direction de l’établissement suspend la médecin sans attendre les conclusions d’une éventuelle enquête médicale approfondie.
Face à cette suspension qu’elle juge abusive, N.S. saisit le tribunal administratif pour contester la décision de son employeur. Soutenue par la CGT Santé 95, elle dénonce une sanction disproportionnée qui met en péril non seulement sa carrière mais aussi son avenir professionnel en France. « Si la décision n’est pas suspendue par le tribunal administratif, il lui sera impossible de poursuivre ses fonctions dans cet hôpital, et partout en France », s’insurge le syndicat. La suspension interrompt son parcours de consolidation de deux ans, une étape cruciale pour les praticiens associés avant d’obtenir un poste stable.
L’affaire prend une tournure plus complexe lorsque l’hôpital de Pontoise avance que d’autres erreurs médicales auraient été « remontées à la chef de service ». L’établissement reproche à N.S. un manque de « pratique collégiale », l’accusant de ne pas solliciter suffisamment l’avis de ses collègues avant de poser un diagnostic. Une défense que la médecin rejette fermement : « Je suis prête à en discuter avec un médecin extérieur au Novo, donc impartial, pour aborder des diagnostics différentiels et des prises en charge. »
Au-delà de cette affaire individuelle, le dossier de la médecin algérienne met en lumière les difficultés récurrentes rencontrées par les praticiens diplômés hors de l’UE en France. Elle dénonce un traitement discriminatoire et affirme avoir été mise à l’écart par rapport à ses collègues : « Je suis le seul médecin mis à l’écart. Contrairement à d’autres, je n’ai pas pu valider mes stages. On a refusé de signer une attestation et mes évaluations semestrielles. »
Son avocat, Me Léonard Balme-Leygues, souligne les conditions de travail extrêmement exigeantes que subissent les praticiens étrangers. En deux ans, N.S. aurait assuré 2 250 heures de service, incluant 75 gardes de nuit, 45 demi-gardes et 500 heures de temps additionnel. « Quatorze mois d’affilée sans congés, c’est délirant », martèle l’avocat. Il met en avant le manque d’encadrement et la pression subie par ces médecins, souvent contraints de travailler au-delà des heures légales, sans réelle reconnaissance de leur compétence.
Ce cas particulier révèle une réalité plus large : la précarité des praticiens formés à l’étranger et leur difficulté à intégrer pleinement le système de santé français. Si la justice ne suspend pas la décision de l’hôpital, la carrière de N.S. en France risque d’être irrémédiablement compromise. Pour l’instant, elle poursuit ses études universitaires tout en attendant le verdict. La décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, attendue le 3 mars, pourrait marquer un tournant dans son combat pour la reconnaissance de son travail et de sa dignité professionnelle.
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