Longtemps réticente à ouvrir la voie à l’importation d’un certain type de véhicules usagés de moins de 5 ans, à savoir les bus, l’Algérie vient d’opérer un virage significatif dans sa politique de transport. Le ministre des Transports, Saïd Sayoud, a confirmé, jeudi 29 mai 2025, devant les membres du Conseil de la nation, que l’importation des bus de moins de 5 ans est désormais autorisée. Cette mesure, qui s’inscrit dans le cadre d’un vaste programme de modernisation du parc automobile algérien, répond à un besoin urgent de renouvellement, notamment dans le transport public routier.
Cette décision intervient dans un contexte où près de 50% des véhicules, notamment les bus actuellement en circulation en Algérie, affichent un âge supérieur à 20 ans. Sur les 80.603 unités recensées dans le parc national, la vétusté représente un danger potentiel pour la sécurité des usagers et une contrainte majeure pour les performances du secteur. Les opérateurs algériens avaient sollicité cette autorisation depuis plusieurs années, arguant de l’obsolescence du matériel existant et du manque d’alternatives économiques pour accéder à des véhicules modernes. Le ministre Sayoud, initialement prudent sur ce dossier, a finalement répondu favorablement à ces requêtes après plusieurs rounds de discussions et consultations avec les acteurs du secteur.
« Les opérateurs ont sollicité et obtenu l’autorisation des bus, mais ils veulent d’autres mesures incitatives. Ils demandent des exonérations fiscales et douanières. Cela a été proposé dans la Loi de finances 2025, mais la mesure n’a pas été retenue. Nous allons la proposer dans la Loi de finances de 2026 », a détaillé le ministre algérien des transports.
Au-delà de l’importation de véhicules de moins de 5 ans, l’Algérie envisage également une série de mesures incitatives destinées à encourager les investissements dans le renouvellement du parc. Si les exonérations fiscales et douanières proposées dans la Loi de finances 2025 n’ont pas été retenues, le ministre a annoncé qu’elles seront de nouveau soumises à l’étude dans la prochaine Loi de finances pour 2026. Un projet de décret exécutif est en cours de préparation pour concrétiser ces avantages, incluant notamment des crédits à taux préférentiels et des allègements fiscaux ciblés.
Dans le même élan, l’Algérie mise sur la production locale pour accélérer le remplacement progressif des véhicules anciens. Dès 2025, trois wilayas stratégiques — Constantine, Oran et Annaba — verront leurs entreprises publiques de transport routier renforcées par 108 nouveaux bus fabriqués localement à l’unité industrielle de Rouïba, sous la tutelle des industries militaires. Ces livraisons marqueront la première phase d’un plan ambitieux visant à fournir plus de 1760 nouveaux véhicules au secteur public de transport routier dans tout le pays. La fabrication locale est également envisagée dans le secteur privé, pour répondre à l’ampleur de la demande.
L’autorisation d’importer des véhicules de moins de 5 ans, particulièrement des bus, s’inscrit dans une stratégie nationale plus vaste pour réhabiliter le réseau de transport et assurer un meilleur service aux citoyens. La vétusté des véhicules, souvent pointée du doigt lors de contrôles techniques, représente un enjeu de sécurité publique. Le président du Conseil de la nation a d’ailleurs insisté sur l’impératif de renforcer les inspections techniques pour garantir la fiabilité des véhicules, qu’ils soient importés ou produits localement. Cette exigence s’impose d’autant plus que la densification du parc s’accompagne d’une hausse significative de la fréquentation des transports en commun dans les grandes villes du pays.
L’Algérie, en ouvrant la voie à l’importation de ces véhicules de moins de 5 ans, tourne ainsi une page et amorce un nouveau chapitre dans la modernisation de ses infrastructures de transport. Cette mesure, bien que centrée sur les bus pour l’instant, pourrait à terme s’étendre à d’autres catégories de véhicules. Elle reflète la volonté des autorités de conjuguer pragmatisme économique et exigences de sécurité. Le ministre Sayoud, après avoir longtemps temporisé, semble désormais déterminé à agir pour accélérer le rajeunissement du parc national. Ce signal fort pourrait attirer de nouveaux opérateurs sur le marché, raviver la filière industrielle locale et améliorer durablement la qualité des services de transport en Algérie.