La crise diplomatique entre la France et l’Algérie ne cesse d’inquiéter les milieux économiques des deux rives de la Méditerranée. Ce climat de crispation, nourri par des déclarations politiques et des postures tranchées, pourrait coûter très cher aux entreprises françaises implantées en Algérie. Selon un reportage de France 2 diffusé jeudi dernier, pas moins de 6 000 entreprises hexagonales se retrouvent aujourd’hui dans l’incertitude, alors que les relations commerciales entre les deux pays subissent de plein fouet les contrecoups de cette crise.
La chaîne publique française a mis en lumière la position périlleuse des entrepreneurs français qui opèrent en Algérie, en pleine crise avec la France. Jusqu’à présent, le marché algérien constituait un véritable levier de croissance pour la France en Afrique. « De nombreuses entreprises françaises pâtissent des tensions entre Paris et Alger et voient leurs activités menacées », a affirmé la présentatrice du journal de 20 heures, Anne-Sophie Lapix. Elle a rappelé que l’Algérie était le deuxième débouché des exportations françaises sur le continent africain, un marché essentiel pour de nombreux secteurs.
Depuis plusieurs mois, les relations diplomatiques entre Paris et Alger sont plombées par des prises de position tranchées et des critiques réciproques, amplifiées par certains discours de l’extrême droite française. Ces tensions suscitent une grande appréhension chez les chefs d’entreprise français, qui redoutent une rupture définitive des liens commerciaux. « Certains patrons craignent que les tensions actuelles entre les deux pays aient un impact sur leurs affaires. Car, il y a des entreprises françaises qui dépendent entièrement du marché algérien », a relayé France 2.
Parmi ces entrepreneurs, un industriel spécialisé dans la fourniture d’équipements destinés aux entreprises algériennes a confié son inquiétude : « Si la situation dégénère, cela pourrait nous coûter très cher. L’Algérie reste un marché stratégique pour nous, et une coupure brutale de nos activités là-bas serait catastrophique », a-t-il expliqué.
Selon les chiffres communiqués dans le reportage, les exportations françaises vers l’Algérie représentaient 4,8 milliards d’euros en 2024, un montant qui pourrait s’effondrer en cas d’aggravation de la crise. Dans un contexte où la dette publique française atteint les 3 600 milliards de dollars, peut-on se permettre de sacrifier un tel volume d’échanges sur l’autel des tensions politiques ?
L’Algérie, de son côté, poursuit une stratégie de diversification de ses partenaires économiques. Si les entreprises françaises venaient à se retirer du marché algérien, d’autres puissances européennes, à l’instar de l’Allemagne et de l’Italie, seraient prêtes à prendre le relais. Cette analyse est partagée par Michel Bisac, président de la Chambre de commerce et d’industrie franco-algérienne, qui a mis en garde contre les conséquences économiques d’une escalade diplomatique. « Si l’Algérie ne travaille pas avec la France, elle travaillera avec d’autres pays. Et je peux vous dire que les Allemands, les Italiens et encore d’autres nations sont aujourd’hui très actifs sur l’Algérie. Ils sont en train de prendre les parts de marché que les Français perdent », a-t-il averti.
Cependant, malgré les tensions, les importations algériennes en provenance de France ont enregistré une hausse de 7 % en 2024, signe que les liens commerciaux restent solides malgré le climat diplomatique tendu. Cette situation montre que les intérêts économiques continuent de prévaloir dans une certaine mesure, mais jusqu’à quand ?
Le reportage de France 2 illustre avec précision les enjeux majeurs que représente cette crise diplomatique. Bien au-delà des querelles politiques, c’est la stabilité économique qui est en jeu. Si la France ne parvient pas à apaiser les tensions et à restaurer une relation de confiance avec l’Algérie, elle risque de voir son influence s’éroder sur un marché historiquement stratégique. Une perspective que les 6 000 entreprises françaises concernées espèrent à tout prix éviter.
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