L’annonce a provoqué une onde de choc discrète mais significative dans le paysage politique français et européen. Moins d’un an après avoir intégré la liste du Rassemblement national aux élections européennes de 2024 en deuxième position, juste derrière Jordan Bardella, Malika Sorel a décidé de claquer la porte de la délégation RN au Parlement européen. Une décision rendue publique le samedi 19 avril, via un message diffusé sur le réseau X, où l’essayiste a exposé les raisons de son départ avec une rare clarté.
« Je n’ai jamais été membre du Rassemblement National mais pensais pouvoir être utile à la France au sein de cette délégation », a-t-elle déclaré en introduction, posant ainsi les bases d’une rupture fondée sur des désillusions profondes. Son engagement s’inscrivait dans une logique d’intérêt national, selon ses propres mots, mais s’est heurté à ce qu’elle qualifie de « logique de groupe oppressante », laquelle imposerait, selon elle, un renoncement à toute liberté individuelle et intellectuelle.
Malika Sorel, née en France de parents algériens, n’est pas une novice sur la scène publique. Elle a siégé au Haut Conseil à l’intégration durant le mandat de Nicolas Sarkozy et s’est imposée au fil des années comme une voix marquante, parfois clivante, sur les questions d’immigration et d’identité nationale. Dans ses essais, elle dénonce ce qu’elle appelle la « décomposition de la France », attribuant cette dégradation à une partie des immigrés accusés de « se retourner contre la terre d’accueil ». En 2017, elle saluait la lucidité supposée de Marine Le Pen, tout en soutenant François Fillon. Ce positionnement idéologique l’avait conduite, quelques années plus tard, à rejoindre la liste menée par Bardella, sous la bannière du RN, estimant alors que ce parti était devenu le seul à défendre, selon elle, « les intérêts supérieurs de la France et du peuple français ». Dans un entretien accordé au Figaro en mars 2024, elle déclarait craindre une « libanisation de la France » et évoquait un chaos généralisé – migratoire, sécuritaire, scolaire – comme menace à la cohésion nationale.
Ce ralliement, déjà perçu comme atypique au vu de son parcours antérieur auprès de figures telles que Dominique de Villepin, Nicolas Sarkozy et François Fillon, avait surpris de nombreux observateurs. Pourtant, son départ du RN vient réaffirmer une constante dans son discours : un attachement affiché à la France, mais une méfiance toujours vive envers les appareils partisans lorsqu’ils entravent sa liberté de ton. Elle affirme aujourd’hui que la gravité de la situation actuelle du pays impose de dépasser les logiques partisanes, en particulier lorsqu’elles deviennent un frein à l’action. Désormais eurodéputée non-inscrite, elle entend poursuivre son travail sans s’enfermer dans une discipline qu’elle considère contraire à l’intérêt collectif.
La réaction ne s’est pas fait attendre. Plusieurs élus du Rassemblement national ont publiquement appelé Malika Sorel à renoncer à son mandat d’eurodéputée, estimant qu’elle avait été élue grâce à l’étiquette RN et qu’il serait logique, par respect pour les électeurs, de rendre ce siège. Cette position souligne une ligne de fracture de plus en plus visible entre les élus s’inscrivant dans une fidélité stricte à l’appareil partisan, et ceux qui revendiquent une indépendance politique, quitte à provoquer tensions et ruptures.
Cette défection ne représente pas seulement un fait divers politique, elle s’inscrit dans une dynamique plus large de repositionnements idéologiques au sein même de la droite française, où des personnalités issues de parcours différents se retrouvent, puis se désolidarisent, selon l’évolution des stratégies internes. Pour Malika Sorel, le choix de quitter la délégation RN au Parlement européen ne signifie pas un retrait de la scène politique, mais plutôt un repositionnement assumé, au nom d’une vision qu’elle dit placer au-dessus des appartenances partisanes. Le débat sur l’appartenance, la loyauté électorale et l’indépendance d’esprit s’en trouve relancé, à la lumière de ce nouvel épisode, qui vient rappeler la complexité des alliances politiques dans un climat européen en pleine recomposition.
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