La mise en application de la nouvelle allocation touristique fixée à 750 euros par an marque une étape significative dans la politique monétaire algérienne. Officiellement lancée hier, cette mesure suscite un intérêt immédiat, notamment pour son effet sur le marché noir, où le taux de change de l’euro est un indicateur clé. C’est depuis l’agence de Zighoud Youcef à Alger, siège symbolique de la Banque d’Algérie, que les premières réservations ont été ouvertes, en simultané avec l’ensemble des succursales des six banques publiques agréées à travers le territoire national. L’attente était palpable, l’effet, quasi immédiat. Depuis l’annonce faite jeudi, le marché noir de la devise a réagi. L’euro, auparavant échangé à 258 dinars à l’achat et 262 dinars à la vente, a vu son taux fléchir progressivement. Entre vendredi et samedi, l’euro est tombé à 256 à l’achat, puis à 254, tandis que le marché noir, pourtant réputé pour sa stabilité en haute saison touristique, semble montrer des signes de tension.
Le lien entre l’allocation touristique et l’évolution du taux de l’euro sur le marché noir paraît évident pour les cambistes de la capitale. Le simple fait que la Banque d’Algérie autorise désormais 750 euros annuels par voyageur adulte modifie l’équilibre habituel de l’offre et de la demande. Ce volume inédit d’euros injecté dans le circuit officiel limite l’attrait du marché noir, surtout pour les citoyens qui auparavant dépendaient exclusivement de ce canal parallèle pour obtenir de la devise. Sur le terrain, la réalité est plus nuancée. Selon un changeur d’Alger, la baisse de l’euro est bien réelle mais modérée, en raison de facteurs saisonniers comme les départs en vacances et les résultats du Bac, période traditionnellement associée à une forte demande de devises. Il ajoute que l’euro restera influencé par d’autres dynamiques, notamment la reprise des importations de véhicules par des particuliers.
Entre janvier et fin mars 2025, plus de 32 000 souscriptions à l’assurance automobile ont été recensées, selon le Conseil national des assurances. En déduisant les véhicules neufs achetés localement, notamment chez Fiat El Djazair, on comprend que l’importation de voitures d’occasion reste active. Or, ces transactions nécessitent souvent des paiements en euros, que ce soit pour le transport, les taxes ou les frais de dossier. Cette demande supplémentaire en devise vient freiner, même légèrement, la chute de l’euro sur le marché noir, qui reste pour beaucoup une source incontournable d’approvisionnement en devise étrangère.
Parallèlement, les six banques publiques mandatées – BNA, BADR, CNEP, BEA, BDL et CPA – ont mis en place des dispositifs renforcés pour répondre à l’afflux de citoyens. L’objectif est d’assurer une distribution équitable et rapide des allocations. Mohamed Ameziane Achit, directeur d’études à la Banque d’Algérie, précise que toutes les ressources logistiques ont été mobilisées pour garantir une expérience fluide et sans encombre aux voyageurs. Chaque citoyen de 19 ans et plus peut ainsi bénéficier d’un plafond annuel de 750 euros, tandis que les adolescents âgés de 12 à moins de 19 ans peuvent obtenir jusqu’à 300 euros ou l’équivalent dans une autre devise convertible.
L’euro, en tant que référence principale, reste au cœur des préoccupations. Sa valeur sur le marché noir demeure scrutée avec attention, car elle reflète autant la confiance dans la monnaie locale que la solidité des mécanismes officiels de distribution des devises. Le fait que l’euro circule désormais davantage dans le canal bancaire régulé crée une nouvelle donne. Sur le marché noir, la rareté devient moins critique, ce qui contribue à faire baisser l’euro de manière progressive. Pourtant, malgré cette tendance baissière, l’euro conserve une certaine stabilité, preuve que le marché noir, bien que fragilisé, n’est pas encore totalement affaibli.