L’affaire des « faux-vrai » passeports algériens connait son épilogue

Puis-je voyager même si mon passeport algérien expire bientôt passeports algériens

L’affaire relative à l’attribution des documents officiels à des ressortissants étrangers touche enfin à son terme. Ce mercredi, au tribunal de Dar El Beïda, le président du pôle pénal national spécialisé dans la lutte contre la cybercriminalité a rendu son verdict dans un dossier qui mêle falsification, abus de fonction et intrusion informatique. Vingt personnes étaient poursuivies, dont douze sont actuellement incarcérées à la prison d’El Harrach, principalement des fonctionnaires affiliés à la commune de Djelfa. Tous sont accusés d’avoir participé, de près ou de loin, à la délivrance frauduleuse de passeports algériens et de cartes d’identité biométriques à des ressortissants syriens ne possédant pas la nationalité algérienne.

Au terme du procès, un accusé en détention a écopé de 3 ans de prison ferme et d’une amende d’un million de dinars. Parmi les autres prévenus détenus, onze ont été condamnés à des peines allant d’un à deux ans de prison ferme et devront verser 500 000 dinars chacun. Quatre de ces condamnés sont de nationalité syrienne. À l’opposé, les accusés non détenus ont été acquittés, tandis que quatre individus en fuite ont été condamnés par contumace à 5 ans de prison ferme et deux millions de dinars d’amende.

Sur le plan civil, la justice a contraint les accusés reconnus coupables à indemniser solidairement le représentant judiciaire du Trésor public à hauteur d’un million de dinars, au titre des préjudices financiers subis par l’État dans cette affaire de passeports algériens frauduleux.

Lors d’une audience antérieure, le procureur de la République avait pourtant requis jusqu’à 7 ans de prison ferme contre certains des accusés. Il s’agissait alors de répondre à des accusations graves : introduction frauduleuse de données dans un système informatique public, constitution d’une association de malfaiteurs dans le but de commettre une infraction, et abus de fonction.

Les origines de cette affaire de passeports algériens frauduleux remontent à une plainte déposée le 28 février 2024 par le chef du service biométrique de la commune de Djelfa, un certain B. K. Abdallah. Celui-ci a découvert que des passeports algériens et cartes d’identité avaient été délivrés à des ressortissants syriens ne disposant pas de certificat de nationalité algérienne, document pourtant indispensable à l’émission de ces titres. Le principal suspect identifié fut un fonctionnaire communal, B. K. Amira, accusé d’avoir facilité cette délivrance frauduleuse.

L’enquête a mis en lumière un mode opératoire bien rôdé. Treize ressortissants syriens, dont douze enfants mineurs nés entre 2010 et 2018, ont bénéficié de douze cartes d’identité nationales et passeports biométriques. Les documents en question étaient complets sur le plan administratif — taxe, photo, carte d’identité — mais aucun ne comportait le certificat de nationalité exigé.

Les investigations techniques ont révélé des faits troublants. L’empreinte digitale sur le formulaire du mineur syrien A. Ahmed était en réalité celle de B. K. Slimane, employé au service biométrique, qui a apposé sa propre empreinte à la place du père de l’enfant. Sur un autre formulaire, celui du jeune M. Youssef, une annotation manuscrite en rouge indiquait « Amira Ben Khenissa – Nationalité », laissant supposer une tentative manifeste de légitimer un dossier irrégulier en exploitant des réseaux internes.

Les agents de saisie des données ont, de leur côté, rapporté que leurs comptes informatiques avaient été utilisés sans leur consentement pour intégrer les données falsifiées dans le système national. L’employé B. K. Slimane est cité à nouveau comme ayant manipulé les accès informatiques pour faire enregistrer les enfants étrangers comme des citoyens algériens, permettant ainsi l’émission illégale de documents officiels.

Pour le chef du service biométrique, ces anomalies sont particulièrement difficiles à détecter sans des informations précises permettant une vérification croisée entre documents physiques et base de données nationale. Une fois les irrégularités constatées, il a adressé une plainte au secrétaire général de la commune et enclenché la procédure judiciaire.

Le dossier s’est étoffé au fil de l’enquête : formulaires comportant des empreintes ne correspondant pas aux déclarants, annotations manuscrites, complicités internes, abus d’autorité, tous les éléments convergent vers un réseau structuré ayant permis l’émission de faux documents administratifs à des personnes n’ayant aucun droit légal d’en bénéficier. Les passeports algériens délivrés illégalement, les passeports algériens obtenus sans certificat de nationalité, les passeports algériens attribués grâce à des complicités internes : autant d’éléments ayant contribué à l’un des scandales les plus retentissants de l’administration civile récente.