Le mariage interdit aux sans papiers en France : le Sénat valide

Dénoncer un sans-papiers mariage

Le Sénat français a voté, ce jeudi 20 février, en faveur d’une loi interdisant le mariage aux étrangers en situation irrégulière (sans papiers), une décision qui a immédiatement suscité des réactions contrastées. Cette mesure, portée par la majorité de droite et du centre, a été adoptée malgré une forte opposition des groupes de gauche, qui y voient une atteinte aux libertés fondamentales. Le texte prévoit que toute personne en situation irrégulière ne pourra plus contracter de mariage en France, une disposition qui remet en question des principes établis depuis des décennies.

Cette réforme intervient dans un contexte où plusieurs maires avaient déjà fait l’objet de poursuites judiciaires pour avoir refusé de célébrer des unions entre des citoyens français et des étrangers sans papiers. L’exemple le plus récent est celui de Robert Ménard, maire de Béziers, convoqué devant la justice après avoir refusé de marier une Française et un Algérien en situation irrégulière. Ce type d’affaire, de plus en plus fréquent, a poussé certains élus à réclamer une clarification législative afin de les protéger d’éventuelles sanctions juridiques.

Les partisans de cette interdiction sur le mariage des sans papiers mettent en avant la nécessité de lutter contre les mariages de complaisance, ces unions contractées dans le seul but d’obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. Selon eux, il est essentiel d’empêcher les abus du système et d’assurer que le mariage reste un acte basé sur un engagement sincère et non sur des motivations administratives. L’un des initiateurs du texte, le sénateur Stéphane Demilly, a déclaré que la mesure visait à « préserver l’intégrité du mariage en France et à garantir que les engagements matrimoniaux reposent sur des bases solides ».

Cependant, l’opposition ne décolère pas et dénonce un texte discriminatoire qui pourrait être invalidé par le Conseil constitutionnel. En effet, ce dernier avait déjà jugé en 2003 que la liberté du mariage ne pouvait être entravée par la situation administrative d’un individu. Certains juristes estiment donc que la nouvelle loi risque d’être retoquée pour non-conformité aux principes fondamentaux du droit français. Mélanie Vogel, sénatrice écologiste, a dénoncé « une dérive dangereuse qui remet en cause des droits fondamentaux et qui ne repose sur aucune donnée concrète prouvant une recrudescence des mariages frauduleux ».

Dans les rangs du gouvernement, le ministre de la justice, Gérald Darmanin, a tenté de justifier ce durcissement en expliquant qu’il répondait à une volonté de « répondre aux inquiétudes des élus locaux » et de « renforcer les outils de lutte contre la fraude ». Il a néanmoins reconnu que la mise en application de cette interdiction pourrait se heurter à d’importants obstacles juridiques. Le texte prévoit notamment que les futurs époux devront désormais présenter des justificatifs de séjour régulier avant la cérémonie, une mesure qui inquiète les associations de défense des droits de l’Homme, lesquelles redoutent des discriminations et des dérives administratives.

L’Association des maires de France (AMF) s’est déclarée favorable à la réforme, estimant qu’elle donnerait aux élus un cadre juridique plus clair. En revanche, plusieurs maires engagés dans la défense des étrangers, réunis au sein de l’Association nationale des villes et territoires accueillants (Anvita), ont exprimé leur profond désaccord et dénoncé « une loi stigmatisante qui vise uniquement à satisfaire une partie de l’opinion publique en jouant sur des peurs infondées ».

Reste à savoir si ce texte franchira l’épreuve du Conseil constitutionnel, qui pourrait être saisi par l’opposition pour examiner sa validité. En attendant, la France devient l’un des rares pays européens à imposer une telle restriction sur le mariage, un droit pourtant reconnu comme fondamental par de nombreuses conventions internationales. Cette évolution législative illustre bien le durcissement progressif de la politique migratoire française et risque d’alimenter encore davantage les débats déjà vifs sur la question de l’immigration et de l’intégration.

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