Le président Tebboune accorde une grâce présidentielle à Mohamed Amine Belghit

Mohamed Amine Belghit

Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a décidé d’accorder une grâce présidentielle à l’historien Mohamed Amine Belghit, mettant ainsi fin à une affaire judiciaire et médiatique qui a profondément marqué l’opinion publique algérienne ces derniers mois. L’annonce a été faite lundi 15 décembre 2025 à travers un communiqué officiel de la Présidence de la République, confirmant la remise totale de la peine restante à purger pour l’intéressé, condamné de manière définitive par la justice.

Selon le communiqué, cette décision a été prise conformément aux dispositions de la Constitution, notamment les articles 91 (alinéas 7 et 8) et 182, et après avis consultatif du Conseil supérieur de la magistrature. Le décret présidentiel signé par le chef de l’État prévoit une remise totale de la peine restant à exécuter, ce qui permet à Mohamed Amine Belghit de quitter la prison après environ sept mois de détention.

Cette grâce intervient quelques jours seulement après l’épuisement de toutes les voies de recours judiciaires. Le 11 décembre dernier, la Cour suprême avait rejeté le pourvoi en cassation introduit par la défense de l’historien, rendant ainsi définitive la condamnation prononcée à son encontre. Son avocat, Me Toufik Hichour, avait d’ailleurs confirmé la veille que le rejet du pourvoi mettait un terme au parcours judiciaire du dossier.

Pour rappel, Mohamed Amine Belghit avait été interpellé le 3 mai 2025 à la suite de déclarations controversées tenues lors d’une intervention télévisée diffusée sur une chaîne émiratie. Ses propos portaient sur la question de l’amazighité en Algérie, reconnue par la Constitution comme une composante fondamentale de l’identité nationale aux côtés de l’arabité et de l’islam. Lors de cette émission, l’historien avait affirmé que l’amazighité serait une construction « franco-sioniste », suscitant une vive indignation dans de larges pans de la société algérienne.

Au-delà de cette déclaration, Belghit avait également tenu des propos qualifiant les Franco-Algériens de « harkis », ce qui avait renforcé la polémique et accentué les tensions autour de son intervention. Ces déclarations avaient été largement relayées sur les réseaux sociaux, provoquant une vague de réactions dénonçant un discours jugé attentatoire à l’unité nationale et porteur de haine et de discrimination.

Sur le plan judiciaire, Mohamed Amine Belghit avait été poursuivi pour plusieurs chefs d’accusation, notamment des actes visant l’unité nationale par l’atteinte aux symboles de la nation et de la République, ainsi que la diffusion d’un discours de haine et de discrimination à travers les technologies de l’information et de la communication. En juillet 2025, le tribunal l’avait condamné à cinq ans de prison ferme. En appel, la peine avait été révisée en octobre à cinq ans de prison, dont trois ans fermes, maintenant néanmoins une lourde sanction.

La décision présidentielle de lui accorder une grâce totale de la peine restante intervient dans un contexte délicat, marqué par des débats sensibles autour de la liberté d’expression, des limites du discours public et de la préservation de l’unité nationale. Si certains y verront un geste d’apaisement et une volonté de tourner la page d’un dossier hautement polémique, d’autres estimeront que cette grâce ne saurait effacer la gravité des propos tenus ni le malaise qu’ils ont provoqué.

Du côté des institutions, la Présidence a tenu à rappeler que cette mesure relève des prérogatives constitutionnelles du chef de l’État, exercées dans le respect des procédures prévues par la loi et après consultation des instances compétentes. La grâce présidentielle, distincte de l’amnistie, ne remet pas en cause la condamnation judiciaire elle-même, mais porte uniquement sur l’exécution de la peine.