Le marché noir des devises en Algérie traverse une période de turbulences marquée par une hausse significative de l’euro face au dinar algérien, malgré une baisse de la demande, en ce mois de Ramadan. Ce jeudi 6 mars 2025, au cœur du Square Port-Saïd d’Alger, principal foyer du change informel, l’euro a atteint 250 dinars à l’achat et 254 dinars à la vente, contrastant avec les 248 dinars à l’achat et 252 dinars à la vente enregistrés la veille. Cette augmentation soudaine attire l’attention des analystes financiers, qui tentent de cerner les mécanismes derrière cette dynamique.
Contrairement à l’euro, d’autres devises majeures connaissent un recul sur le marché noir face au dinar. Le dollar américain, souvent perçu comme une valeur refuge, a vu sa valeur diminuer, s’échangeant actuellement à 235 dinars à l’achat et 238 dinars à la vente. La livre sterling n’est pas épargnée par cette tendance baissière, s’établissant à 294 dinars à l’achat et 297 dinars à la vente. Ces variations asymétriques intriguent les observateurs et suscitent des interrogations sur les forces économiques et politiques à l’œuvre.
Le décalage entre les taux de change officiels et ceux du marché noir demeure un problème persistant en Algérie. Selon la Banque d’Algérie, l’euro s’échange actuellement à 143,06 dinars, le dollar à 134,48 dinars et la livre sterling à 171,76 dinars. L’écart entre les deux régimes de change alimente la spéculation et pousse les citoyens à privilégier le marché informel. Cette situation s’explique par plusieurs facteurs, notamment les restrictions bancaires et la forte demande en devises pour les voyages, les études ou les transactions commerciales.
L’histoire de ces taux de change de l’euro face au dinar sur le marché noir des devises en Algérie n’est pas récente. Depuis des décennies, il prospère en raison des restrictions imposées sur l’accès aux devises étrangères via les circuits bancaires officiels. Pour contourner ces limitations, de nombreux Algériens se tournent vers des marchés parallèles, où les taux sont plus avantageux. Toutefois, cette alternative présente des risques, notamment en matière de sécurité, d’authenticité des billets échangés et de potentielles fluctuations brutales des taux.
Dans un contexte où le gouvernement cherche à maîtriser le marché des changes, des mesures sont régulièrement annoncées pour réduire l’impact du marché noir. L’objectif principal est de réduire l’écart entre les taux officiels et informels, ce qui permettrait d’attirer davantage de transactions vers les circuits bancaires légaux. Certaines initiatives, comme la révision des allocations en devises pour les voyages et les facilitations administratives, visent à rassurer les citoyens et les encourager à utiliser les canaux officiels.
Change euro dinar algérien : l’allocation touristique risque d’impacter le marché noir
Le ministre des Finances, Abdelkrim Bouzred, a officiellement annoncé le 20 février 2025 que la nouvelle allocation touristique de 750 euros entrerait en vigueur après l’Aïd El-Fitr. Cette décision, très attendue par les voyageurs algériens, s’inscrit dans une volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux devises étrangères tout en encadrant strictement leur distribution afin d’éviter les abus.
Depuis plusieurs mois, la mise en place de cette réforme faisait l’objet de discussions intenses au sein de l’exécutif. Une réunion présidée par Abdelmadjid Tebboune le 10 février dernier avait permis de finaliser les préparatifs en présence des principaux acteurs concernés, notamment des représentants du ministère des Finances, de la Banque d’Algérie et de la direction générale des douanes. Ce cadre de concertation avait pour but de définir les modalités d’attribution de cette allocation et de garantir une mise en application efficace.
Lors de son intervention devant l’Assemblée populaire nationale, Abdelkrim Bouzred a précisé que cette allocation serait accessible avant la fin du mois de Ramadan ou immédiatement après l’Aïd El-Fitr. Cette annonce confirme que la distribution des 750 euros aux voyageurs pourrait débuter entre la fin mars et le début avril 2025. Cependant, contrairement aux dispositifs précédents, ce nouveau mécanisme impose des conditions strictes afin de garantir que l’allocation profite exclusivement aux personnes se rendant réellement à l’étranger.
Ainsi, les voyageurs devront se conformer à une procédure bien définie pour bénéficier de cette allocation. Il leur faudra se rendre à la succursale de la Banque d’Algérie de leur wilaya, munis de leur passeport, d’un billet d’avion ou de bateau confirmé, d’une assurance voyage et de l’équivalent en dinars du montant de l’allocation. Une fois ces éléments vérifiés, un récépissé sera délivré, document indispensable à présenter à l’aéroport ou au port avant l’embarquement afin de récupérer les devises.
Cette nouvelle réglementation vise à limiter les tentatives de fraude et les détournements de devises, un problème récurrent qui a souvent entravé le bon fonctionnement des précédents dispositifs. L’objectif est d’assurer que seules les personnes effectuant un voyage légitime puissent en bénéficier et de mettre fin aux pratiques où certains obtenaient des devises sans quitter le territoire national.
Pour faciliter la distribution, la Banque d’Algérie a mis en place plusieurs bureaux de change dans les principales infrastructures de transport du pays. Les premiers points de retrait ont été installés à l’aéroport et au port d’Alger, et d’autres suivront progressivement à travers le pays. Une source gouvernementale a précisé que ces bureaux seront spécifiquement dédiés à l’octroi de l’allocation touristique et non à la vente libre de devises. Cette organisation vise à fluidifier le processus et à éviter les files d’attente interminables, un problème qui pourrait émerger face à une forte demande initiale.
Bien que cette mesure soit perçue comme une avancée par une partie des voyageurs, des incertitudes subsistent quant à son application concrète. Certains craignent que les procédures administratives ne ralentissent l’accès aux devises ou que les bureaux de change ne soient pas en mesure de répondre immédiatement à l’afflux de demandes. Des questions se posent également sur la possibilité pour les voyageurs empruntant les itinéraires terrestres de bénéficier de cette allocation, un point qui devrait être clarifié dans les textes d’application à venir.
Le gouvernement s’est engagé à surveiller de près la mise en place de cette réforme et à apporter les ajustements nécessaires en fonction des retours des citoyens et des réalités du terrain. L’objectif affiché est de garantir un accès simplifié aux devises tout en préservant les réserves de change du pays et en luttant contre le marché parallèle. Si l’efficacité de cette mesure reste à prouver, elle marque néanmoins un tournant dans la gestion de l’allocation touristique en Algérie, avec une volonté claire d’assainir et d’encadrer ce dispositif afin qu’il bénéficie réellement aux voyageurs algériens.
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