Lalla Salma du Maroc a fêté ses 47 ans samedi 10 mai, loin des projecteurs, comme à son habitude. Celle qui a été l’épouse du roi Mohammed VI pendant seize années reste aujourd’hui l’un des personnages les plus mystérieux du royaume chérifien. Et pourtant, Lalla Salma, cette figure longtemps adulée par les Marocains, semble n’avoir jamais cessé de susciter interrogations et fascination. Le mariage royal, célébré à l’été 2002 dans la capitale marocaine, avait marqué une rupture avec les traditions : pour la première fois, le nom et le visage de l’épouse du roi étaient rendus publics, et le titre officiel de princesse consort était accordé. Un signal d’ouverture, mais aussi une promesse d’un changement d’époque, incarnée par une femme instruite, engagée et indépendante.
Mais en 2018, sans tambour ni trompette, tout s’effondre. Le Palais ne publie aucun communiqué officiel. La disparition soudaine de Lalla Salma alimente les rumeurs les plus folles. En mars 2019, c’est par une déclaration lapidaire de l’avocat Éric Dupond-Moretti, alors représentant légal du roi, que le monde apprend qu’elle est désormais son ex-épouse. Aucun mot de plus. Silence du Palais, silence de la principale intéressée. Depuis, chaque apparition, chaque photo, chaque déplacement est scruté. Et l’été 2024, c’est sur une plage grecque, à Mykonos, que Lalla Salma réapparaît, éclatante, souriante, entourée de ses enfants, le prince héritier Moulay El Hassan et la princesse Lalla Khadija. Des clichés qui suffisent à effacer les rumeurs les plus sombres, notamment celles la disant assignée à résidence dans un palais royal.
La vérité ? Elle réside peut-être sur l’île de Kea, autre perle des Cyclades en Grèce, où Lalla Salma disposerait d’une résidence acquise pour environ 4 millions d’euros. Ce havre de paix, loin des fastes du royaume, soulève d’autres questions : liberté choisie ou exil doré ? Le journaliste Ignacio Cembrero, spécialiste du Maroc, affirme qu’un certain contrôle est toujours exercé sur elle. Selon lui, ses déplacements sont régulés, ses contacts limités. Il évoque même des tentatives pour la déloger de sa résidence marocaine, avant que le souverain ne l’y autorise de nouveau. Une vie sous surveillance, loin du regard public mais toujours dans l’orbite du trône.
Enfant du peuple, née Salma Bennani à Fès, élevée par sa grand-mère Fatima après la mort de sa mère, Lalla Salma a toujours représenté une anomalie au sein d’une monarchie où les unions étaient autrefois arrangées selon des critères tribaux. Major de promotion à l’École nationale supérieure d’informatique de Rabat, elle rencontre Mohammed VI à la fin des années 1990. Leur relation, d’abord discrète, débouche sur des fiançailles annoncées en octobre 2001. Son ascension dans l’espace public est immédiate. À peine mariée, elle enchaîne les représentations officielles, les engagements sociaux et les réceptions diplomatiques. On la voit aux côtés de leaders étrangers, comme Emmanuel Macron ou la reine Letizia d’Espagne. Elle devient également le visage de la lutte contre le cancer, une cause qu’elle embrasse personnellement, visitant les hôpitaux et créant des fondations.
Pourtant, son absence lors de l’hospitalisation de Mohammed VI à Paris début 2018, alors qu’il subit une intervention cardiaque, fait éclater les premières suspicions. Où est-elle ? Pourquoi ne l’accompagne-t-elle pas ? Les questions s’accumulent, les réponses ne viennent pas. Les images se font rares, les commentaires sont inexistants. Et bientôt, le vide est comblé par les hypothèses : enlèvement ? Répudiation ? Réclusion ? En réalité, rien ne permet d’affirmer une version plutôt qu’une autre. Seule certitude : Lalla Salma continue de vivre entre la Grèce et le Maroc, souvent entourée de ses enfants, et dans un silence qui en dit parfois plus long que les mots.
Aujourd’hui, alors que son fils se prépare à monter un jour sur le trône au Maroc, la position de Lalla Salma dans la hiérarchie royale reste floue. Proche de Moulay El Hassan, qui aurait choisi de poursuivre ses études à Rabat pour rester à ses côtés, elle conserve une influence discrète, mais réelle, selon des médias français. Ce lien indéfectible avec le futur roi pourrait être la clé de sa tranquillité future. Lalla Salma… à travers son silence, elle continue d’écrire un chapitre à part de l’histoire du Maroc, celui d’une femme à la croisée des mondes, entre devoir royal et désir de liberté.