Face à la grogne des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), notamment des médecins algériens en France, le gouvernement français a annoncé une réforme des Épreuves de Vérification des Connaissances (EVC). Cette annonce intervient après plusieurs mois de tensions, alors que de nombreux praticiens dénonçaient une procédure jugée « inéquitable » et un manque de reconnaissance de leur engagement dans les hôpitaux français.
Selon le ministère de la Santé, 3 235 praticiens étrangers ont été admis sur liste principale lors de la dernière session des EVC, sur un total de 4 000 postes ouverts. « Une augmentation de près de 50 % par rapport à la session 2023 », précise le ministère dans un communiqué. En ajoutant les 638 lauréats de la liste complémentaire, ce sont plus de 3 800 médecins qui « pourraient venir en renfort au sein de notre système de santé », sous réserve d’obtenir une autorisation de plein exercice.
Le gouvernement assure que des « travaux sont en cours avec les Agences régionales de santé (ARS) » pour faciliter l’affectation de ces professionnels dans les hôpitaux en manque de personnel, tout en maintenant les lauréats déjà en poste en France. Cette déclaration vise à calmer une colère croissante parmi les Padhue, qui dénoncent un système qui les place en situation précaire malgré leur contribution essentielle au bon fonctionnement des établissements de santé.
Depuis la publication des résultats des EVC en janvier, plusieurs syndicats de Padhue ont critiqué la baisse du nombre de postes disponibles par rapport aux annonces initiales. Ils dénoncent un concours qui laisse sur le carreau des candidats ayant pourtant obtenu des résultats supérieurs à la moyenne. « Pourquoi les réévaluer l’année prochaine alors qu’ils ont déjà prouvé leur compétence ? » s’interroge le Dr Abdelhalim Bensaidi, vice-président de l’association Ipadecc. Selon lui, la situation est d’autant plus préoccupante que certains de ces praticiens exercent en France depuis plusieurs années.
Le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a réagi à ces critiques en annonçant une évolution des EVC dès 2025. L’objectif affiché est de « tenir compte de l’engagement des Padhue dans les établissements français » en instaurant une « voie interne simplifiée » pour les candidats déjà en poste. Toutefois, cette réforme tardive ne satisfait pas les syndicats, qui réclament des mesures immédiates. « J’ai déjà tout donné à la France pendant six ans sans reconnaissance, je ne vais pas encore perdre une année de plus », avertit le Dr Bensaidi, menaçant de démissionner avec 150 autres confrères si aucune régularisation rapide n’est mise en place.
Le syndicat SOS Padhue, quant à lui, exprime son scepticisme quant à la mise en œuvre de cette réforme. « Nous voulons un gage de bonne foi », affirme sa présidente, le Dr Kahina Hireche Ziani. Elle rappelle que le président Emmanuel Macron avait déjà promis une régularisation des Padhue en exercice, « et pourtant, rien n’a changé ». Pour elle, l’annonce d’un concours interne pose plus de questions qu’elle n’apporte de solutions : « Il n’y a aucune projection quant au nombre de postes qui seront ouverts pour chaque catégorie (voie interne et externe), ni de recensement précis des Padhue en France. C’est le flou total. »
La psychiatre met également en lumière un problème plus large : « Il faut distinguer les paroles politiciennes du vrai fléau qu’est l’exploitation des médecins étrangers en France. » Beaucoup d’entre eux travaillent depuis plusieurs années dans des conditions précaires, sous des statuts temporaires, avec des rémunérations inférieures à celles de leurs collègues titulaires. Malgré leur rôle indispensable, ils se heurtent à des obstacles administratifs qui freinent leur intégration professionnelle et leur reconnaissance.
L’hôpital public français souffre d’un manque chronique de personnel, notamment dans certaines spécialités comme l’anesthésie, la psychiatrie et la médecine d’urgence. Les Padhue, dont de très nombreux médecins algériens établis en France, sont souvent en première ligne pour pallier ces déficits, mais leur statut ne leur permet pas toujours d’accéder aux mêmes droits que leurs collègues français ou européens. La réforme des EVC pourrait être une première étape vers une reconnaissance plus juste, mais les syndicats restent prudents quant à son application réelle.
Dans les semaines à venir, la pression exercée par les Padhue pourrait forcer le gouvernement à accélérer la mise en place de solutions concrètes. En attendant, beaucoup de médecins étrangers, notamment algériens, restent dans l’incertitude quant à leur avenir en France.
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