La situation des Algériens en France connaît un tournant préoccupant, marqué par une complexité croissante des procédures administratives, y compris la naturalisation, et une pression grandissante sur la communauté. Entre les tensions diplomatiques entre Alger et Paris et les discours politiques souvent instrumentalisés par certaines figures de la droite et de l’extrême droite, les Algériens établis en France font face à des restrictions qui affectent directement leur quotidien. Mohamed Hani, membre de la Commission des Affaires étrangères à l’Assemblée populaire nationale (APN), apporte son éclairage sur cette situation en soulignant que « la communauté algérienne est consciente des enjeux » et fait preuve de vigilance.
Dans les quartiers, les lieux de travail et l’espace public, un climat de méfiance s’installe progressivement. « Certains responsables politiques exploitent la question de l’immigration pour détourner l’attention de l’opinion publique de leurs propres crises internes », observe Mohamed Hani, dans un entretien accordé à Horizons. Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il semble s’intensifier, rendant les démarches administratives encore plus ardues pour les Algériens en France. Les préfectures voient leurs délais de traitement s’allonger de manière alarmante, parfois jusqu’à deux ans pour un simple renouvellement de titre de séjour. Une situation qui place de nombreux Algériens dans un véritable casse-tête bureaucratique.
L’une des conséquences directes de cette tension est la stigmatisation ressentie par une partie de la communauté. « Les discours politiques hostiles créent un climat d’incertitude et de méfiance, où beaucoup craignent que leurs droits soient progressivement restreints sous couvert de mesures sécuritaires », affirme Hani. Cette inquiétude est renforcée par la pression policière accrue, en particulier sur les sans-papiers, confrontés à des contrôles plus fréquents et des risques d’expulsion. « Il est évident que les restrictions imposées actuellement par la France aux Algériens, qu’il s’agisse des limitations de déplacement ou d’autres mesures non officiellement annoncées, créent une pression accrue », ajoute-t-il.
Naturalisation, titres de séjour pour les Algériens en France : l’avis tranché de Hani
Les demandes de naturalisation sont également concernées par ce durcissement administratif appliqué sur les Algériens en France. Obtenir la nationalité française est devenu un parcours du combattant pour beaucoup d’Algériens remplissant pourtant les critères requis. Des dossiers sont ajournés sans explication claire, tandis que certaines demandes de titres de séjour connaissent des refus inattendus.
« Concernant les procédures administratives (naturalisation, titres de séjour…etc), la situation est particulièrement compliquée pour les Algériens en France. À titre d’exemple, obtenir un rendez-vous en préfecture pour un simple renouvellement de titre de séjour peut prendre jusqu’à 2 ans. Il est donc évident que des restrictions sont mises en place par les autorités françaises, notamment à la suite des directives de l’ancien ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et de l’actuel ministre, Bruno Retailleau. Notre communauté subit une véritable pression administrative, rendant l’accès aux titres de séjour de plus en plus difficile. Cette situation entrave la mobilité des Algériens, les empêchant non seulement de régulariser leur statut mais aussi de se déplacer librement, y compris pour rendre visite à leur famille. Ainsi, la pression exercée ne se limite pas aux discours politiques, elle se traduit concrètement par des obstacles administratifs majeurs. », détaille le député algérien.
Cette situation inquiète aussi bien les travailleurs que les retraités algériens en France. Les changements dans l’attribution de certaines aides sociales et la remise en cause de certains droits, notamment en matière de logement et de protection sociale, suscitent de vives réactions. « De nombreuses nouvelles tentatives de lois touchent directement les Algériens, notamment en matière d’aide sociale, de logement ou encore de retraite », souligne-t-il, rappelant que la communauté algérienne représente l’une des plus importantes en France.
Les jeunes issus de l’immigration algérienne ne restent pas inactifs face à ces difficultés. Nombre d’entre eux s’engagent au sein d’associations ou utilisent les réseaux sociaux pour sensibiliser sur ces enjeux et faire entendre leur voix. « Aujourd’hui, il est intéressant de voir leur réaction, car ils ne sont généralement pas dans l’affrontement, mais plutôt dans une démarche constructive », analyse Mohamed Hani. Face aux restrictions et aux discriminations, la résilience et la solidarité semblent devenir les armes privilégiées d’une communauté qui refuse de se laisser marginaliser.
Les associations et la société civile jouent un rôle essentiel pour accompagner les Algériens en difficulté et dénoncer les injustices. « Les associations, la société civile et certains acteurs politiques jouent un rôle essentiel en alertant et en sensibilisant notre communauté sur l’importance de rester unis et de respecter les droits de la République française », assure Mohamed Hani. « Ce que nous pouvons leur assurer, c’est notre soutien indéfectible », ajoute-t-il, soulignant que les institutions algériennes suivent de près la situation.
L’Algérie ne reste en effet pas silencieuse face à ces restrictions. « Comme l’a souligné le président de la République, les Algériens doivent respecter les lois françaises, tout en sachant qu’ils bénéficient du soutien et de la protection de leur pays d’origine, notamment à travers l’accompagnement consulaire », rappelle Mohamed Hani. L’enjeu est de taille, car derrière ces mesures administratives se joue aussi une partie de l’avenir des relations entre la France et l’Algérie. « La pression exercée dans l’espoir d’affaiblir l’Algérie s’est avérée inefficace », conclut-il, optimiste quant à une éventuelle désescalade des tensions.
La communauté algérienne en France fait donc face à des défis multiples, entre restrictions administratives, stigmatisation et difficultés croissantes d’insertion. Mais loin de se laisser abattre, elle répond par l’organisation, la solidarité et l’attachement à ses droits. L’avenir des relations franco-algériennes pourrait bien dépendre, en partie, de la manière dont cette crise sera gérée des deux côtés de la Méditerranée.
Lire également :
Boualem Sansal : la Grande Mosquée de Paris intervient et lance un appel à Tebboune
Algériens, Paris : c’est acté, les amendes vont devenir plus salées
Bagages, Air Algérie : les passagers reçoivent une mise en garde