Les consommateurs font face à une pratique commerciale trompeuse qui passe souvent inaperçue en Algérie : la vente de tous les oeufs au même prix, quelle que soit leur taille. Certains commerçants, bien conscients du manque d’attention des clients sur ce détail, mélangent délibérément des oeufs de différentes tailles dans les plateaux tout en appliquant un tarif uniforme. Pourtant, les éleveurs et grossistes vendent ces produits à des prix distincts en fonction de leur calibre, les petits œufs étant significativement moins chers que les plus gros. Cette manœuvre permet aux détaillants d’augmenter leurs marges de profit de manière artificielle, au détriment des consommateurs et des producteurs.
Selon les professionnels du secteur avicole interrogés par le média arabophone Echourouk, le marché des oeufs en Algérie suit une tendance similaire à celle de la viande blanche, avec une baisse importante des prix à la source. Actuellement, le plateau d’œufs se négocie à environ 350 dinars en gros, une chute qui cause des pertes considérables aux éleveurs en raison du coût élevé de production. Pendant ce temps, les détaillants continuent de vendre les œufs à des prix stables, maintenant une marge de bénéfice importante grâce à l’harmonisation artificielle des prix. Un éleveur explique que cette pratique permet aux commerçants de maximiser leurs profits en achetant des petits œufs à bas prix et en les vendant au même tarif que les plus gros, sans que le consommateur ne s’en aperçoive immédiatement.
Le président de la Fédération nationale des éleveurs de volaille en Algérie, Ali Benchayba, confirme que les producteurs appliquent une tarification différenciée en fonction de la taille des oeufs. Un plateau contenant exclusivement des œufs de petit calibre coûte entre 50 et 70 dinars de moins qu’un plateau d’œufs plus gros. Concrètement, un plateau d’œufs standard se vend actuellement à 350 dinars en gros et entre 420 et 450 dinars en magasin. En revanche, un plateau de petits œufs ne dépasse pas 280 dinars à l’achat chez les éleveurs et devrait logiquement être proposé aux consommateurs autour de 350 dinars. Pourtant, de nombreux commerçants ne tiennent pas compte de cette différence et appliquent un tarif uniforme, supprimant ainsi la possibilité pour les clients de bénéficier d’un prix plus juste.
Face à cette situation, les associations de défense des consommateurs expriment leur indignation. Mohamed Aïssaoui, président de l’Organisation algérienne de défense du consommateur « Himayatec », dénonce une généralisation des pratiques frauduleuses dans le commerce des œufs et appelle à une vigilance accrue. Selon lui, la multiplication des intermédiaires et le manque de culture de consommation dans la société algérienne favorisent la prolifération de ces abus. Il souligne que les éleveurs respectent les règles du commerce en fixant des prix adaptés à la taille des œufs, mais que certains détaillants n’hésitent pas à les manipuler pour maximiser leurs profits.
Cette tromperie prend parfois des formes encore plus élaborées. Certains commerçants vont jusqu’à modifier la composition des plateaux d’œufs en remplaçant une partie des gros œufs par des plus petits. Résultat : un client qui pense acheter un plateau homogène se retrouve avec un mélange de tailles, sans possibilité de contester puisque tout lui a été vendu sous un prix unique. Cette supercherie permet aux commerçants d’augmenter leurs gains de manière significative, tout en restant à l’abri de toute plainte formelle, car peu de consommateurs vérifient systématiquement le contenu exact de leur achat.
Pour lutter contre ces abus, les associations de consommateurs recommandent d’adopter des réflexes simples mais efficaces. D’abord, il est essentiel de poser des questions précises aux commerçants sur les prix en fonction de la taille des œufs. Ensuite, lors de l’achat d’un plateau, il convient de vérifier si tous les œufs sont de la même taille et de ne pas hésiter à signaler toute anomalie au commerçant. Enfin, une sensibilisation plus large du public sur ces pratiques frauduleuses pourrait encourager les consommateurs à exiger plus de transparence et à dénoncer les abus aux autorités compétentes.
Les autorités de régulation sont également appelées à intensifier les contrôles sur les marchés et les points de vente afin de sanctionner les pratiques frauduleuses. La mise en place de règles plus strictes sur l’étiquetage et la classification des œufs en fonction de leur taille pourrait également contribuer à limiter ces abus et à garantir un meilleur respect des droits des consommateurs.
Si l’astuce des commerçants consistant à mélanger les tailles d’oeufs et à imposer un prix unique peut sembler anodine, elle révèle en réalité une faille dans le contrôle du commerce de détail en Algérie. L’affaire met en évidence la nécessité d’une meilleure transparence dans la fixation des prix et d’un renforcement des mécanismes de protection des consommateurs. En restant attentifs et informés, les clients pourront non seulement éviter de se faire duper, mais aussi contribuer à une plus grande équité dans le marché alimentaire.
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