Qui profite réellement de la crise France – Algérie ?

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La crise actuelle entre la France et l’Algérie suscite de nombreuses interrogations. Au-delà des tensions diplomatiques et des discours enflammés, qui sont réellement les gagnants et les perdants de cette situation ? Abdelkader Haddouche, ancien député de la communauté algérienne en France et professeur à l’université de Marseille, livre son analyse à nos confrères de El Khabar, en mettant en lumière les forces en présence et les enjeux cachés derrière cette détérioration des relations bilatérales.

Pour lui, la politique française est aujourd’hui marquée par une lutte d’influence intense, où certains acteurs cherchent à instrumentaliser la crise pour asseoir leur pouvoir. Il rappelle que François Bayrou, l’actuel Premier ministre, se retrouve sous la pression de courants politiques aux idées radicalement opposées aux siennes. Entre les Républicains et le Rassemblement national, l’équilibre est fragile et pourrait basculer à tout moment. Cette fragilité politique rend Paris encore plus vulnérable à l’exploitation de la crise par ceux qui ont intérêt à attiser les tensions.

La situation d’Emmanuel Macron n’est pas plus enviable. Privé de sa majorité parlementaire après la dissolution de l’Assemblée nationale, il fait face à des forces politiques influentes qui s’opposent à tout rapprochement avec l’Algérie. Certains noms sont connus, comme Retailleau, Le Pen ou Dati, mais d’autres acteurs plus discrets tirent également les ficelles en coulisses. Ce climat instable ne fait que nourrir la montée du populisme et de l’extrémisme.

Dans ce jeu politique complexe, les véritables bénéficiaires de la crise entre la France et l’Algérie sont, selon Haddouche, ces mêmes populistes et extrémistes qui trouvent dans les tensions franco-algériennes un terreau fertile pour asseoir leur discours. Pourtant, il rappelle que les intérêts économiques, commerciaux et stratégiques entre les deux pays surpassent largement ces polémiques. Malheureusement, les médias et les réseaux sociaux contribuent souvent à envenimer la situation en amplifiant des divergences qui pourraient être gérées avec plus de prudence et de discernement.

L’ancien député insiste sur un point essentiel : la nécessité de repenser la question de l’immigration avec lucidité. Il souligne que les élites françaises doivent prendre conscience du rôle positif joué par de nombreux immigrés dans le développement du pays. Selon lui, il est injuste de généraliser et d’associer toute une communauté aux actes de quelques individus. La diabolisation de l’immigration alimente les discours populistes et détourne l’attention des véritables enjeux économiques et sociaux.

D’un point de vue historique, il estime que même sous la présidence de Houari Boumédiène, les tensions entre Alger et Paris n’avaient pas atteint un tel niveau. Pourtant, la raison et l’intérêt commun exigent une approche plus apaisée. Il évoque notamment la coopération nécessaire entre les deux pays pour lutter contre le trafic de drogue et le terrorisme, deux fléaux qui ne connaissent pas de frontières et qui nécessitent une action concertée.

Mais la politique intérieure française, avec son jeu d’alliances et de rivalités, complique la donne. Haddouche rappelle que Retailleau suit une stratégie similaire à celle de Nicolas Sarkozy en 2007. À l’époque, ce dernier avait adopté un discours dur sur l’immigration et la sécurité afin de séduire l’électorat de droite et d’extrême droite, une manœuvre qui lui avait permis de remporter l’élection présidentielle. Aujourd’hui, cette même tactique est utilisée par plusieurs figures des Républicains et de l’extrême droite, comme Darmanin, Ciotti et Wauquiez, qui rivalisent pour imposer leur ligne politique en vue des prochaines échéances électorales.

Face à cette situation, l’Algérie doit-elle rompre totalement avec la France ? Haddouche ne le pense pas. Il estime qu’il est primordial de maintenir des canaux de communication diplomatiques et sécuritaires officiels, loin des pressions partisanes et des controverses médiatiques. Car, au fond, ce ne sont pas les peuples qui bénéficient de la crise, mais bien ceux qui cherchent à la transformer en un tremplin politique.

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