Retraités algériens en France : une nouvelle restriction appliquée ?

Retraités algériens euros France retraite

La France s’apprête à resserrer les conditions d’accès aux pensions des retraités algériens, une décision qui pourrait raviver les tensions déjà palpables entre Paris et Alger. Un amendement controversé, estampillé AS90, déposé dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, introduit des mesures sans précédent pour les retraités vivant à l’étranger.

Désormais, ces derniers seraient contraints de se présenter en personne chaque année devant les autorités consulaires françaises ou des représentants accrédités pour prouver qu’ils sont toujours en vie. Faute de quoi, leurs pensions seraient suspendues sans délai.

Porté par le député Fabien Di Filippo, cette proposition vise à lutter contre une fraude massive supposée, évaluée à près de 9 milliards d’euros par an selon la Cour des Comptes. En ligne de mire : les pensions indûment versées après le décès des bénéficiaires, un phénomène que le gouvernement souhaite éradiquer par un contrôle strict.

Mais derrière ce discours se dessine une réalité plus ciblée. Avec 405 351 retraités algériens percevant des pensions françaises depuis l’Algérie, ce groupe constitue une part significative des dépenses sociales de la France, estimées à 1,2 milliard d’euros par an. Par comparaison, les retraités marocains, espagnols ou portugais reçoivent des montants bien moindres, ce qui place les Algériens au centre des préoccupations budgétaires françaises.

Un précédent donne du poids aux arguments des partisans de l’amendement : une enquête menée en 2022 à Alger révélait que près de 30 % des retraités de plus de 98 ans convoqués pour prouver leur existence ne s’étaient jamais présentés. La suspension de leurs pensions avait suffi à alimenter les soupçons de fraude, particulièrement envers les bénéficiaires algériens.

Pourtant, cette initiative pourrait avoir des conséquences dramatiques. Les retraités algériens, souvent âgés et souffrant de maladies chroniques, devront effectuer de longs trajets jusqu’aux consulats français d’Alger, Oran ou Constantine. Une contrainte logistique et physique qui risque de compliquer encore leur quotidien.

Jusqu’ici, la procédure était relativement simple : une attestation de vie délivrée par les autorités locales suffisait à maintenir le versement des pensions. Mais avec cette réforme, le contrôle passerait à un niveau jamais vu, plaçant les retraités face à des démarches bureaucratiques qui pourraient devenir insurmontables pour certains.

Cette proposition intervient dans un contexte politique déjà sensible entre la France et l’Algérie. Après l’abandon d’un amendement similaire sous le gouvernement de Michel Barnier, l’extrême droite et une partie de la droite française tentent aujourd’hui de le réintroduire, suscitant de vives critiques des deux côtés de la Méditerranée.

Alors que Paris prône une normalisation des relations avec Alger, cette mesure risque de creuser davantage le fossé diplomatique entre les deux pays. Pour de nombreux retraités algériens, qui ont contribué à l’économie française durant des décennies, cette nouvelle exigence est perçue comme une épreuve supplémentaire, voire une mise en doute de leur dignité.

La bataille pour l’amendement AS90 ne fait que commencer, mais elle pourrait bien cristalliser les tensions autour de la question des retraites et des relations franco-algériennes, dans un climat déjà marqué par les divisions et les incompréhensions.

 

 

Lire également :

Aéroport international d’Alger : « 99% des voyageurs ne savent pas que… »

Véhicules de moins de 3 ans en Algérie : ce qu’espère le gouvernement

C’est officiel, l’Algérie va lancer la production d’hélicoptères