Tebboune veut une statue géante de l’Emir Abdelkader à Paris

Tebboune visite France

Abdelmadjid Tebboune, président de la République algérienne, a récemment saisi l’occasion d’un discours à la nation pour aborder les relations complexes entre l’Algérie et la France, marquées par un passé colonial lourd. S’exprimant devant les deux chambres du Parlement réunies en Congrès au Palais des Nations, il a insisté sur la nécessité d’une reconnaissance morale des crimes coloniaux perpétrés par la France, tout en excluant toute demande de compensation financière. Ce discours, teinté de fermeté et de symbolisme, a captivé l’attention en Algérie comme en France.

Dans son allocution, Abdelmadjid Tebboune a rappelé que la mémoire des Algériens ne pouvait être effacée, et que le passé colonial de la France devait être pleinement assumé. Il a rejeté l’idée de revendications financières, estimant que la véritable réparation passait par une reconnaissance historique. « Vous êtes devenus une puissance nucléaire et vous nous avez laissé des maladies. Venez nettoyer, nous n’avons rien à faire de votre argent. Je ne laisserai pas tomber la mémoire. Je ne réclame pas une compensation financière, je veux plutôt une reconnaissance morale », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Je ne demande pas à ce que vous vous excusez de ce qu’ont fait vos ancêtres en Algérie, mais au moins reconnaissez. »

Tebboune a également dénoncé les discours affirmant que la France aurait laissé un « paradis » en Algérie après 132 ans de colonisation. Il a souligné l’héritage catastrophique laissé par cette période, citant notamment un taux d’analphabétisme de 90 % au lendemain de l’indépendance en 1962. Selon lui, cette réalité témoigne des ravages sociaux, économiques et éducatifs causés par le système colonial.

Le président a ensuite proposé un geste hautement symbolique : ériger une statue géante de l’Émir Abdelkader à Paris. « Je serai reconnaissant si une statue géante de l’Emir Abdelkader trône à Paris », a-t-il affirmé. Cette initiative, selon lui, serait un hommage appuyé à l’un des plus grands héros de la résistance algérienne et un acte de réconciliation significatif entre les deux nations. L’Émir Abdelkader, connu pour sa lutte contre l’occupation française au XIXᵉ siècle, incarne les valeurs de dignité, de résilience et de liberté. Sa statue à Paris serait non seulement une reconnaissance des luttes du passé, mais également un signe de respect envers l’histoire et l’identité algériennes.

Cependant, Tebboune n’a pas hésité à critiquer ce qu’il considère comme des incohérences dans la manière dont la France gère son propre passé colonial. « Ils parlent de civilisation alors qu’ils se vantent d’avoir pris des crânes comme des butins de guerre », a-t-il dénoncé avec véhémence. Cette déclaration fait écho à la restitution par la France, en juillet 2020, de 24 crânes de résistants algériens, conservés depuis le XIXᵉ siècle au musée de l’Homme à Paris. Bien que ce geste ait été perçu comme un acte d’apaisement, il reste insuffisant aux yeux de nombreux Algériens.

Les travaux de recherche menés par le musée avaient identifié 41 crânes dans sa collection algérienne, dont sept appartenaient à des figures majeures de la résistance. Si cette restitution marque un début de reconnaissance, elle soulève aussi des questions sur les objets et vestiges encore détenus par la France et l’importance d’un processus de réconciliation plus profond.

En Algérie, les propos de Tebboune ont résonné comme un rappel que la mémoire collective ne peut être ignorée. Pour beaucoup, la reconnaissance des crimes coloniaux ne représente pas seulement une étape historique, mais également une base essentielle pour construire des relations bilatérales plus équilibrées. Tandis que l’Algérie poursuit son chemin vers la réappropriation de son histoire, les déclarations du président Tebboune montrent clairement que la mémoire et l’identité nationale resteront au cœur de ses priorités.

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