Le projet de loi de finances 2025, récemment adopté par le gouvernement Bayrou via l’article 49.3, introduit une réforme majeure qui risque de bouleverser l’écosystème des micro-entrepreneurs. Alors que la mesure n’a pas fait l’objet d’une grande médiatisation, ses conséquences pourraient pourtant être considérables pour plus de 200 000 travailleurs indépendants et petites entreprises qui bénéficient aujourd’hui de la franchise en base de TVA.
Jusqu’à présent, les micro-entrepreneurs profitaient d’un régime fiscal simplifié leur permettant de ne pas facturer la TVA tant que leur chiffre d’affaires restait sous certains seuils. Ces plafonds variaient selon le type d’activité exercée : 37 500 euros pour les prestations de services, 85 000 euros pour les activités d’achat-revente et 50 000 euros pour les professions libérales comme les avocats ou les artistes-interprètes. Ce régime permettait aux travailleurs indépendants de pratiquer des tarifs plus compétitifs en évitant de répercuter la TVA sur leurs clients, tout en bénéficiant d’une gestion comptable allégée.
Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, un plafond unique sera désormais fixé à 25 000 euros, un seuil bien plus bas que les montants actuellement en vigueur. Concrètement, cela signifie que des milliers de micro-entrepreneurs, jusqu’ici exonérés, devront désormais appliquer une TVA de 20 % sur leurs services ou leurs produits. Pour certains, cette obligation risque de compromettre leur compétitivité face à des concurrents qui peuvent maintenir des prix plus attractifs.
Les sénateurs à l’origine de cet amendement justifient cette réforme par un double objectif. D’une part, ils mettent en avant une volonté de simplifier le système de la franchise en base de TVA, en harmonisant les règles fiscales et en luttant contre certaines stratégies d’évitement fiscal. D’autre part, l’État espère engranger des recettes fiscales supplémentaires grâce à cette mesure. Cependant, aucune estimation officielle n’a été fournie sur l’impact financier réel de cette réforme pour le budget de l’État.
Si cette réforme représente un avantage pour les finances publiques, elle constitue un véritable coup dur pour les micro-entrepreneurs. Nombre d’entre eux vont devoir revoir leur grille tarifaire à la hausse pour compenser la TVA qu’ils devront reverser. Or, augmenter ses prix dans un contexte économique tendu pourrait entraîner une perte de clientèle, en particulier pour ceux dont l’activité repose sur une clientèle sensible aux variations de prix, comme les indépendants du secteur des services ou du commerce de proximité.
Au-delà de l’impact financier, cette réforme va également alourdir considérablement la charge administrative des micro-entrepreneurs. L’un des grands avantages du régime micro-entreprise était la simplicité de gestion : les travailleurs indépendants n’avaient pas à gérer la collecte de la TVA, ni à remplir des déclarations fiscales complexes. Avec cette réforme, ils devront désormais s’acquitter de nouvelles obligations comptables, ce qui risque d’ajouter une contrainte supplémentaire à leur quotidien déjà bien chargé.
Face à cette décision jugée brutale par une partie des concernés, la Fédération nationale des autoentrepreneurs et micro-entrepreneurs a décidé de réagir. Depuis plusieurs mois, elle mène une mobilisation active pour tenter d’infléchir la décision du gouvernement. Une pétition en ligne a été lancée pour s’opposer à la modification de l’article 293b du Code général des impôts, et celle-ci a déjà recueilli plus de 63 400 signatures.
Dans les semaines à venir, les organisations de micro-entrepreneurs comptent accentuer la pression sur l’exécutif pour obtenir un aménagement de cette réforme, voire son abandon. Certains députés de l’opposition ont déjà annoncé leur intention de déposer des amendements visant à repousser l’entrée en vigueur de la mesure ou à instaurer des compensations pour les entrepreneurs les plus impactés. Mais en l’état actuel des choses, le seuil unique de 25 000 euros devrait bel et bien s’appliquer dès l’adoption définitive du budget 2025.
Si cette réforme est mise en œuvre sans ajustements, elle pourrait bien marquer un tournant dans le régime de la micro-entreprise, qui avait jusqu’ici séduit des centaines de milliers de Français grâce à sa simplicité et ses avantages fiscaux. Beaucoup de micro-entrepreneurs, qui avaient fait le choix de ce statut pour sa souplesse, risquent désormais de voir leur modèle économique fragilisé. Reste à savoir si le gouvernement entendra leur appel ou si cette nouvelle contrainte fiscale sera définitivement entérinée dans les mois à venir.
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