« Vous avez fini ? » : l’Algérie recadre Israël de manière subtile

Montage : Criminalisation normalisation Israël Algérie

L’Algérie, présidant le Conseil de sécurité de l’ONU en ce mois de janvier 2025, a marqué cette présidence par une subtilité diplomatique rare à l’égard d’Israël. Dans un contexte où chaque geste, chaque mot peut être interprété comme un message politique, Amar Bendjama, l’ambassadeur algérien aux Nations unies, a su conjuguer ses obligations institutionnelles avec la fermeté des principes nationaux. L’incident impliquant la délégation israélienne, au cœur des tensions de cette session, illustre parfaitement l’art de la diplomatie algérienne.

Dès le début de ses fonctions à la présidence du Conseil, Amar Bendjama a opté pour une approche singulière dans sa gestion des prises de parole. Lorsqu’il s’adresse aux représentants des États membres, il emploie une formule directe, déclarant : « Je donne la parole au représentant de… ». Mais lorsqu’il s’agit d’Israël, le ton du représentant de l’Algérie change subtilement : « Le président du Conseil de sécurité donne la parole au représentant d’Israël. » Une nuance qui, bien qu’apparemment anodine, reflète une posture calculée, et qui n’a pas tardé à provoquer une réaction de la part du délégué israélien.

Lors d’une séance officielle, ce dernier n’a pu s’empêcher de souligner la différence. Avec une insistance manifeste, il a interpellé le président du Conseil, déclarant : « Monsieur le Président, j’ai remarqué une particularité dans vos formulations. Vous dites ‘je donne la parole’ pour tous les États, sauf lorsqu’il s’agit d’Israël, où vous utilisez ‘le président du Conseil donne la parole’. Pourquoi cette distinction ? » Une question posée non sans une pointe d’agacement, qui visait à remettre en cause l’impartialité de la présidence algérienne.

Face à cette interpellation, Amar Bendjama, imperturbable, a simplement répondu : « Vous avez terminé votre intervention ? » Cette réplique, aussi brève que désarmante, a laissé son interlocuteur perplexe. Mais loin de se laisser déstabiliser, le représentant israélien a repris, soulignant qu’il s’agissait là d’une démarche intentionnelle, non d’un oubli ou d’une maladresse. « En tant que président, vous devez dépasser vos ressentiments personnels », a-t-il insisté, tentant de placer Bendjama face à ses responsabilités institutionnelles.

Pourtant, la réponse de l’ambassadeur algérien a démontré une maîtrise parfaite des rouages diplomatiques. En utilisant la troisième personne lorsqu’il s’adresse à la délégation israélienne, Bendjama ne fait que réaffirmer une position historique de son pays tout en respectant les contraintes de son rôle. Ce choix de mots reflète une distinction subtile : il s’adresse à Israël non pas en son nom propre, mais uniquement en tant que président d’un organe multilatéral. Cette distinction, habilement pensée, résonne comme un rappel des principes algériens tout en évitant un affront direct.

Ce moment, bien que relativement discret au sein de la session, illustre à quel point la diplomatie multilatérale repose sur l’art des nuances. Chaque mot, chaque expression est minutieusement pesée pour refléter les intérêts nationaux tout en respectant les obligations internationales. Pour l’Algérie, ce genre de posture n’est pas nouveau. Depuis son indépendance, le pays a toujours défendu une position ferme sur les questions de souveraineté et de droit international, notamment en ce qui concerne la cause palestinienne. La présidence du Conseil de sécurité lui offre une scène idéale pour réaffirmer ses principes sans jamais franchir la ligne rouge des règles onusiennes.

Mais cette situation ne se limite pas à un simple échange verbal. Elle met en lumière une tension plus large qui traverse le Conseil de sécurité et les relations internationales en général. L’Algérie, en tant que président, a la lourde tâche de maintenir un équilibre entre ses obligations de neutralité et les attentes de la communauté internationale. En même temps, l’Algérie reste fidèle à ses convictions, notamment sur des dossiers aussi sensibles que celui d’Israël et de la Palestine. Cette capacité à jongler entre ces deux exigences est un témoignage de l’expérience et de la finesse de la diplomatie algérienne.

Le choix des mots de Bendjama n’est pas qu’une anecdote diplomatique ; c’est un geste symbolique. En dissociant son rôle de président de son rôle de représentant de l’Algérie, il trace une ligne claire entre le respect des procédures onusiennes et les positions politiques nationales. Cette distinction, bien qu’elle puisse sembler purement formelle, est en réalité un acte profondément stratégique. Elle envoie un message sans jamais rompre le cadre strict imposé par les règles de l’ONU.

Cet épisode restera sans doute comme l’un des moments marquants de la présidence algérienne au Conseil de sécurité en 2025. Il illustre non seulement la complexité des relations internationales, mais aussi la capacité de l’Algérie à défendre ses principes tout en jouant un rôle actif sur la scène multilatérale. Amar Bendjama, par sa posture ferme et réfléchie, démontre que la diplomatie, même dans les arènes les plus tendues, est un art où chaque détail compte. C’est dans ces nuances que se joue l’équilibre délicat entre respect des institutions et affirmation des convictions.

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