L’Algérie fait face à une perte économique colossale estimée à plus d’un milliard de dinars, soit 1000 milliards de centimes, à cause des actes de vandalisme et des dégradations visant les trains de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF). Une somme qui aurait pu être investie dans la modernisation du réseau, dans l’amélioration des services de voyage ou encore dans le renforcement des infrastructures ferroviaires. Cette situation préoccupante met en lumière un véritable paradoxe : au moment où l’Algérie cherche à développer son réseau de transport et à encourager le voyage interne, elle subit de plein fouet les conséquences d’actes d’incivilité qui coûtent extrêmement cher à la collectivité.
Selon M. Aibèche Sofiane, directeur de contrôle de gestion des participations à la SNTF, ces dégradations engendrent chaque année un coût financier qui dépasse le milliard de dinars. Entre les jets de pierres, les vols de câbles électriques, les dégradations dans les gares et les incivilités à bord, les pertes se multiplient au détriment du service public et des projets de modernisation. Le voyage ferroviaire, qui devait être un symbole de confort et d’efficacité en Algérie, se transforme parfois en une source de tracas et de dépenses imprévues.
L’impact de ces dégradations sur le voyage des Algériens est direct. Chaque train endommagé doit être immobilisé plusieurs jours pour réparations, perturbant ainsi les lignes et les horaires. Le remplacement d’une seule vitre frontale, par exemple, coûte plus de 3 millions de dinars, soit près de 18 000 euros. Un montant qui ne prend même pas en compte les pertes d’exploitation liées à l’arrêt du train. Dans un pays où les transports jouent un rôle vital pour relier les wilayas et faciliter le voyage, ces incidents pèsent lourdement sur la qualité du service offert.
Le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et des Transports, M. Saïd Sayoud, a récemment rappelé la nécessité de renforcer les performances opérationnelles et financières de la SNTF pour rehausser la qualité du service. Mais les efforts de modernisation se heurtent à une double réalité : la vétusté du matériel et les comportements irresponsables de certains voyageurs. Les systèmes de gestion et d’exploitation remontent parfois aux années 1980, ce qui complique la maintenance et la recherche de pièces de rechange.
Pour sécuriser les trains et protéger les infrastructures, la SNTF déploie actuellement près de 900 agents de sécurité sur le réseau algérois, couvrant 206 kilomètres entre Alger, Blida, Boumerdès et Tizi-Ouzou. Cette portion ne représente que 5 % du réseau national, mais concentre 67 % du trafic de voyage. L’objectif est de réduire les actes de vandalisme et les retards liés aux comportements inappropriés, comme les passagers qui bloquent les portes pour retarder le départ. Selon M. Aibèche, ces gestes apparemment anodins désorganisent l’ensemble du système de transport et provoquent un effet en chaîne sur la ponctualité des trains à travers tout le territoire.
Les équipes techniques, de leur côté, travaillent jour et nuit pour garantir la sécurité et la continuité du service. La priorité est donnée à la réparation des zones de ralentissement et à la remise en service des trains Coradia, acquis en 2018 pour les dessertes régionales et les longues distances. Sur les 16 rames disponibles, seules quatre étaient encore opérationnelles au début de l’année 2025. Grâce au renforcement des capacités de l’atelier spécialisé de Naâma, plusieurs unités ont pu être remises en circulation durant l’été, même si cinq restent encore hors service, en attente de financement pour l’achat de pièces détachées.
En parallèle, la SNTF met également l’accent sur le transport de marchandises, qui représente un levier économique stratégique pour l’Algérie. Plus de 5,7 millions de tonnes de fret sont transportées chaque année, incluant des produits essentiels comme les carburants, les céréales, le phosphate, les engrais et le minerai de fer acheminé d’Annaba vers le complexe d’El Hadjar. Cette activité devrait s’intensifier avec l’ouverture de nouvelles lignes dans le sud du pays, soutenant ainsi le développement logistique et industriel.
Les pertes annuelles estimées à un milliard de dinars ne sont donc pas de simples chiffres abstraits : elles représentent un manque à gagner concret pour l’économie nationale, une entrave à la modernisation et une menace pour la durabilité du réseau ferroviaire. À l’heure où le voyage et la mobilité deviennent essentiels pour connecter les régions et stimuler le tourisme intérieur, l’Algérie ne peut plus se permettre de perdre 1000 milliards de centimes à cause de la négligence et du vandalisme. Chaque acte de dégradation est une atteinte à l’intérêt collectif, et chaque réparation retardée retarde d’autant plus le progrès du voyage en Algérie.