Obtenir un visa pour se rendre en France représente pour beaucoup d’Algériens bien plus qu’une simple formalité. C’est souvent le résultat de longues semaines de patience, de démarches méticuleuses, de dépenses non négligeables, et parfois même d’un espoir familial ou professionnel suspendu à une date de rendez-vous. Pourtant, pour certains demandeurs, cette attente tant redoutée s’est transformée en une déception brutale, à cause d’un détail jugé insignifiant : une minute de retard. Cette situation, aussi absurde que choquante, a été vécue par plusieurs ressortissants algériens ces derniers jours, depuis que la gestion des demandes de visa pour la France en Algérie a été confiée à CAPAGO, le nouveau prestataire qui a succédé à VFS Global.
Ce jeudi 24 avril, plusieurs témoignages ont été adressés à la rédaction de DNAlgérie. Tous racontent le même type de scène, vécue dans la confusion, l’incompréhension et une profonde frustration. Un jeune homme, notamment, s’est présenté à son rendez-vous pour déposer sa demande de visa à 15h40. Il explique avoir attendu avec d’autres personnes devant les locaux du centre, dans une ambiance agitée, où chacun tentait de comprendre s’il devait se rapprocher ou patienter. Pris dans ce désordre ambiant, il ne franchit l’entrée qu’à 15h41. Une minute. C’est le délai qui a suffi pour qu’on lui signifie froidement que sa demande ne serait pas prise. Il raconte que les agents sur place lui ont expliqué que le système informatique annulait automatiquement tout rendez-vous dépassé, et qu’il n’y avait donc rien à faire. Malgré ses protestations, il n’a pu obtenir aucun recours. Son créneau était perdu. Il devait tout recommencer.
Une autre situation similaire est rapportée par une femme, mère d’un enfant en bas âge, qui s’est vue opposer le même refus. Son rendez-vous était fixé exactement à la même heure, 15h40. Présente devant le bâtiment avec son bébé de deux ans, elle n’a pu franchir la porte qu’une minute plus tard. Là aussi, la sanction est tombée sans appel. Ce qu’elle dénonce particulièrement, au-delà de la règle, c’est l’incohérence dans la gestion des horaires. Elle affirme que les agents appelaient parfois les créneaux avec une heure d’avance, comme les rendez-vous de 16h40 appelés dès 15h50, mais que ceux qui arrivent une poignée de secondes après leur propre horaire sont systématiquement exclus. Elle dit avoir plaidé sa cause en montrant qu’elle était sur place, qu’elle attendait à l’extérieur, et qu’il ne s’agissait que d’un très léger retard. Mais rien n’y a fait. La consigne est stricte, lui a-t-on répondu. Aucun retard n’est toléré, même si la personne est physiquement présente, même si les conditions d’attente sont confuses.
Ces expériences soulignent une dure réalité à laquelle sont confrontés de nombreux citoyens algériens. Derrière chaque rendez-vous manqué, ce sont des projets annulés, des billets perdus, des familles déçues. Certains avaient pour but de rejoindre un proche malade, d’autres de participer à un événement familial majeur, comme un mariage ou une naissance. Perdre cette chance pour une seule minute de retard paraît incompréhensible à leurs yeux. D’autant plus qu’aucune solution de rechange ne leur est proposée : le rendez-vous est supprimé du système, et le demandeur doit recommencer depuis le début. Cela signifie souvent plusieurs semaines d’attente pour obtenir un nouveau créneau, et parfois des frais supplémentaires, sans aucune garantie de succès.
L’arrivée de CAPAGO, censée améliorer le traitement des demandes, semble au contraire avoir généré une vague de tension et d’amertume chez les usagers. Si le respect des horaires est une règle de base dans toute procédure, l’application mécanique de cette règle sans prise en compte des réalités du terrain suscite des interrogations. À l’extérieur des centres, il n’existe souvent aucun dispositif clair d’accueil ou d’information. Les files s’allongent, les horaires sont flous, les appels sont faits de manière désordonnée, et les gens attendent sans repère. Dans ce contexte, tomber dans le piège d’un minuscule retard n’est pas un signe de négligence, mais bien une conséquence directe d’une organisation peu adaptée à l’afflux massif de demandeurs.
Face à cette situation, beaucoup s’interrogent sur la place laissée à l’humain dans un processus devenu de plus en plus automatisé. Une minute peut sembler dérisoire, mais dans les centres de visa, elle peut décider du sort d’un dossier, d’un projet, d’un rêve. Pour les Algériens concernés, ce n’est pas simplement une question d’horloge. C’est une question de dignité.
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