Le passeport diplomatique algérien est un document de voyage réservé à une catégorie spécifique de citoyens, principalement des hauts responsables de l’État, des diplomates, ainsi que certaines personnalités bénéficiant d’un statut privilégié. Son octroi est encadré par des réglementations strictes définies par des décrets présidentiels successifs, le dernier en date ayant modifié en profondeur la liste des bénéficiaires. Ce document permet notamment de voyager à l’étranger avec des facilités spécifiques et d’accéder à certains privilèges liés à la fonction diplomatique.
En vertu du décret présidentiel n° 97-02 du 4 janvier 1997, récemment amendé par le décret 23-201 paru le 4 juin 2023, les bénéficiaires du passeport diplomatique incluent en premier lieu les plus hauts responsables de l’État. Il s’agit notamment du Président de la République, du Premier ministre, des membres du gouvernement, du directeur de cabinet de la Présidence, ainsi que des hauts fonctionnaires occupant des postes stratégiques au sein de l’Exécutif. Ce cercle restreint s’est vu élargi pour inclure de nouvelles figures telles que les directeurs généraux de la sécurité intérieure et extérieure, le commandant de la Garde républicaine et le recteur de Djamaâ El Djazaïr.
Le Parlement et le pouvoir judiciaire sont également concernés. Les présidents du Conseil de la Nation, de l’Assemblée populaire nationale (APN), de la Cour constitutionnelle, ainsi que les hauts magistrats tels que le Premier Président de la Cour suprême et le Président du Conseil d’État figurent sur la liste des bénéficiaires. Ces personnalités disposent de ce document en raison de leur statut et de leurs responsabilités dans l’appareil d’État.
Le ministère de la Défense nationale joue un rôle clé dans l’attribution de ces passeports. Outre le Chef d’État-Major de l’Armée nationale populaire (ANP), les généraux de corps d’armée et les commandants des différentes forces armées en bénéficient également. Cette disposition s’inscrit dans le cadre de leurs missions à l’international, nécessitant des déplacements officiels et des échanges avec d’autres armées et instances diplomatiques.
Certaines personnalités ayant occupé des fonctions d’importance par le passé conservent le droit à ce passeport, sous conditions. Les anciens chefs d’État, les ex-Premiers ministres, ainsi que d’anciens hauts responsables ayant cumulé au moins cinq ans de service dans des fonctions ministérielles ou diplomatiques peuvent continuer d’en bénéficier à titre honorifique. Il en va de même pour les ambassadeurs et consuls généraux retraités, les membres du Conseil national de la révolution et les anciens cadres de l’ALN ayant exercé un rôle clé dans l’histoire du pays.
Le décret de 2023 a également introduit une mesure spécifique permettant aux épouses des bénéficiaires, y compris en cas de pluralité, d’obtenir un passeport diplomatique. Toutefois, cette disposition cesse d’être applicable dès lors que le lien marital est dissous. À l’inverse, les veuves des anciens chefs d’État ne figurent plus parmi les ayants droit, une modification notable par rapport aux règlements précédents.
Le passeport diplomatique offre plusieurs avantages. Il exempte notamment son détenteur de certaines formalités de visa pour divers pays, facilite les passages aux frontières et confère une certaine immunité diplomatique en fonction des accords en vigueur. Ces privilèges visent à simplifier les missions officielles des représentants de l’État et à leur garantir une fluidité dans leurs déplacements internationaux.
Outre le passeport diplomatique, il existe également le passeport de service, délivré aux fonctionnaires civils et militaires affectés à l’étranger, aux cadres supérieurs des administrations de l’État et aux agents en mission diplomatique temporaire. Celui-ci permet d’assurer des déplacements officiels sans pour autant offrir les mêmes prérogatives qu’un passeport diplomatique.
L’évolution récente de la liste des bénéficiaires reflète une volonté de rationalisation et d’adaptation aux nouvelles réalités institutionnelles. Elle vise à renforcer le cadre de l’usage de ce document tout en limitant les abus qui ont pu être observés par le passé. En conséquence, la délivrance de ces passeports demeure strictement encadrée et réservée à une élite dirigeante et administrative en charge des intérêts stratégiques du pays.
Passeport diplomatique algérien : Bruno Retailleau menace
Les relations diplomatiques entre la France et l’Algérie traversent une nouvelle zone de turbulences. Au cœur de la polémique, l’accord bilatéral de 2007, qui permet aux détenteurs d’un passeport diplomatique algérien d’entrer sur le territoire français sans visa pour des séjours de courte durée. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a récemment évoqué la possibilité de remettre en cause cet accord dans un contexte de tensions accrues entre les deux pays.
Lundi, sur BFMTV-RMC, Bruno Retailleau a déclaré que la France devait adopter une position plus ferme face à l’Algérie. Il a affirmé : « Ça commence par des mesures individuelles et ça pourrait se terminer par la remise en cause de nos accords », précisant notamment que « l’accord de 2007 pour les diplomates qui se passent de visas, on pourrait le remettre en cause, jusqu’aux accords de 1968. » Ces déclarations surviennent dans un climat tendu où Paris accuse Alger de refuser de reprendre certains de ses ressortissants faisant l’objet d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF).
L’accord de 2007, signé le 10 juillet de cette année-là par Bernard Kouchner, alors ministre français des Affaires étrangères, et son homologue algérien, Mourad Medelci, prévoit une « exemption réciproque de visas de court séjour pour les titulaires d’un passeport diplomatique ». Plus précisément, il stipule que « les ressortissants de la République algérienne démocratique et populaire, détenteurs de passeports diplomatiques en cours de validité, ont accès sans visa aux départements français métropolitains, pour un séjour ininterrompu ou plusieurs séjours dont la durée totale ne dépasse pas 90 jours au cours d’une période de 180 jours à compter de la date de première entrée. » Une disposition similaire s’applique aux diplomates français se rendant en Algérie.
Toutefois, cet accord contient une clause de dénonciation qui permet à l’une ou l’autre des parties de l’abroger unilatéralement avec un préavis de 90 jours. « Son application pourra être suspendue en totalité ou en partie par l’un ou l’autre gouvernement », précise l’article 7 du texte.
Les tensions entre Paris et Alger ne datent pas d’hier, mais elles se sont intensifiées ces derniers mois, notamment après l’attentat de Mulhouse. En janvier, Gérald Darmanin, alors ministre de la Justice, avait déjà suggéré de « supprimer » l’accord de 2007, qu’il considère comme une « faille » permettant à « des milliers de dirigeants algériens de circuler librement en France », sans aucun contrôle.
Une source proche du ministre, citée par Le Figaro, expliquait alors que remettre en cause cet accord aurait « davantage d’impact que de dénoncer les accords de 1968 », ces derniers encadrant plus largement les conditions d’immigration des ressortissants algériens en France. Les accords de 1968 leur accordent un statut spécifique, leur facilitant l’obtention d’un titre de séjour et l’accès à l’emploi sur le territoire français.
Le durcissement de la position française s’inscrit dans un contexte plus large de pression diplomatique sur Alger. Paris reproche à l’Algérie de ne pas respecter ses engagements en matière de réadmission des ressortissants sous OQTF. Bruno Retailleau a accusé l’Algérie de « ne pas respecter, de manière unilatérale, les accords internationaux », faisant référence à la Convention de Chicago de 1944 et à un accord bilatéral de 1994 qui stipule qu’ »un ressortissant algérien doit être accepté par l’Algérie » lorsqu’il est expulsé de France.
La perspective d’une remise en cause de l’accord de 2007 pourrait donc marquer une nouvelle étape dans le bras de fer diplomatique entre les deux pays. Pour l’instant, aucune décision officielle n’a été prise, mais le ton employé par Bruno Retailleau laisse présager une volonté de durcissement des règles d’entrée sur le territoire français pour les diplomates algériens. Reste à voir quelle sera la réaction d’Alger face à cette nouvelle menace de Paris.
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