Algériens de France : la préfecture acte un changement que personne n’osait espérer

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C’est un changement que peu de personnes osaient encore espérer. Pourtant, depuis le mois de mars, la préfecture de l’Isère a initié un véritable tournant dans la gestion administrative des étrangers, dont les Algériens de France. Ce qui relevait auparavant du parcours du combattant semble peu à peu s’adoucir, à la faveur de nouveaux dispositifs censés désengorger le système. Pour beaucoup de ressortissants étrangers, notamment algériens, cela représente un véritable soulagement après des mois, voire des années, de démarches laborieuses et d’attente interminable.

Vendredi 18 avril à Grenoble, Neila, une Algérienne de 35 ans, s’est avancée vers le guichet de la préfecture avec une légère appréhension. Malgré les informations rassurantes, elle craignait une énième mauvaise surprise. Pourtant, elle en ressortira soulagée, le précieux document enfin entre les mains. “Aujourd’hui, on peut venir retirer son titre de séjour sans rendez-vous. À l’époque, ce n’était pas possible. Lorsqu’on recevait le SMS informant de la disponibilité du titre de séjour, il fallait encore prendre un rendez-vous sur le site de la préfecture et c’était pratiquement impossible”, raconte-t-elle avec émotion à France 3. Son parcours a été marqué par les difficultés : arrivée en France avec un visa long séjour en tant que conjointe de Français, elle a ensuite été victime de violences conjugales. Après une ordonnance de protection, elle avait droit à un titre de séjour. Mais entre l’expiration de son précédent titre et l’obtention du nouveau, près d’un an s’est écoulé.

Son accompagnant, témoin de ses efforts, communs à de nombreux Algériens avec la préfecture en France, explique : “Elle a dû monter au créneau pour pouvoir avoir un rendez-vous afin d’effectuer sa demande.” Pendant six longs mois, Neila est restée sans titre de séjour, mettant son emploi en danger. Ce n’est qu’en janvier, grâce à l’intervention d’un avocat, qu’elle obtient enfin un rendez-vous. “C’était la croix et la bannière pour pouvoir avoir un rendez-vous. Elle s’est retrouvée pendant une longue période sans titre, ni droit alors qu’elle était en CDI. Son entreprise a été compréhensive parce qu’elle a prouvé les efforts qu’elle faisait pour obtenir un titre.”

Préfecture : les Algériens de France ont souffert à cause de la dématérialisation

Comme elle, d’innombrables étrangers ont souffert de la politique de dématérialisation lancée en mars 2024. L’accès aux créneaux en ligne, devenu incontournable pour toute démarche, s’est révélé quasiment impossible. Face à cela, plusieurs associations, dont la Cimade, ont saisi en référé le tribunal administratif de Grenoble. Le 24 mars 2025, elles dénonçaient “de graves dysfonctionnements” dans l’usage obligatoire du téléservice. Quatre jours plus tard, le juge leur donne raison et suspend cette obligation, exigeant de la préfecture la mise en place d’alternatives pour les démarches non concernées par l’ANEF.

Un pas en avant salué par les associations, même si la prudence reste de mise. “L’audience a eu lieu le 24 mars et l’ordonnance du tribunal est tombée quatre jours après. Donc c’était assez rapide comme réponse, on était contents. Bien sûr qu’on a des réserves sur l’application et sur le fait qu’on ne sait pas encore si la préfecture fera appel de la décision”, précise Martine Faure Saint-Aman, présidente régionale de la Cimade.

Quelques jours avant cette décision judiciaire, la préfète de l’Isère, Catherine Séguin, annonçait déjà des changements notoires. Dans un communiqué daté du 14 mars, elle reconnaissait que le module national mis en place avait été “la cible d’actes malveillants consistant à bloquer les créneaux disponibles pour, dans certains cas, les revendre aux usagers”. Deux mesures ont donc été instaurées pour “garantir un accès équitable et gratuit au service public”.

Le 12 mars, la préfecture s’est appuyée sur la plateforme “Démarches Simplifiées” pour un nouveau système de rendez-vous. “Les usagers soumettent une demande en ligne et reçoivent une convocation dans les meilleurs délais”, précisait la préfecture. Et dès le 17 mars, une autre mesure a été lancée : la remise physique des titres de séjour sans rendez-vous.

Sur le terrain, certains usagers constatent déjà les effets positifs. Demba, rencontré devant la préfecture par France 3, témoigne : “J’ai galéré pendant des mois à obtenir un rendez-vous. Mais récemment, j’ai fait une demande en ligne et deux jours après, j’avais un créneau.” Pour lui, le système est limpide : “Il suffit de renseigner son numéro étranger et la date de fin de validité du titre de séjour. Et en fonction de cette date, la préfecture fixe un rendez-vous.”

Même Martine Faure Saint-Aman admet une amélioration : “Avant, il fallait entre six semaines et deux mois pour récupérer son titre de séjour. Le nouveau fonctionnement permet aux personnes d’avoir plus facilement un rendez-vous.” Elle ajoute : “Auparavant, il fallait être à 18 heures pile devant son ordinateur. Il y avait des créneaux qui s’affichaient, et lorsqu’on cliquait sur un rendez-vous, celui-ci disparaissait. C’était dramatique parce que beaucoup de personnes ont perdu leur titre de séjour et leur emploi à cause de ça.”

Mais les associations insistent : les progrès techniques ne suffisent pas sans un véritable dialogue. “On aimerait avoir régulièrement un dialogue avec la préfecture pour tout ce qui concerne de petits dysfonctionnements. Et il y en a énormément. Et ces petits dysfonctionnements créent actuellement des ruptures de droit”, conclut Martine Faure Saint-Aman. Malgré les avancées, la vigilance reste donc de mise pour les défenseurs des droits des étrangers.

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