Dans une atmosphère politique déjà lourde, la nouvelle est tombée comme un coup de tonnerre. Emmanuel Macron, président de la République, aurait décidé d’annuler une visite très attendue à la Grande Mosquée de Paris, initialement prévue ce lundi 19 mai. Une rencontre discrètement préparée entre Macron, les représentants de la communauté musulmane, et notamment le recteur Chems-Eddine Hafiz, était censée envoyer un message d’apaisement à la communauté des Algériens en France. Mais contre toute attente, Macron aurait préféré, selon le JDD, reculer, sur les conseils insistants de son entourage, alors même que le geste devait marquer un tournant dans les relations fragilisées entre la France et l’Algérie.
Ce déplacement symbolique à la Grande Mosquée de Paris n’était pas anodin. Il devait permettre à Macron de renouer un dialogue avec les Algériens de France, tout en reprenant la main sur le dossier sensible de l’islam en France, un sujet qu’il ne souhaite manifestement pas laisser entièrement dans les mains du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Celui-ci, en pleine bataille pour la présidence du parti Les Républicains, voit son influence grandir, ce qui semble irriter le président. Mais au dernier moment, alors que les préparatifs étaient lancés et que l’agenda présidentiel avait été discrètement modifié, plusieurs voix au sein de l’Élysée ont déconseillé le déplacement. Les tensions récentes entre la France et l’Algérie, couplées à une crispation croissante autour des questions liées à la laïcité et à l’intégration, auraient pesé lourd dans la balance.
Les conseillers de Macron ont jugé que la présence du président dans un lieu de culte aussi symbolique pouvait être interprétée de manière contradictoire. D’un côté, les Algériens de France, pour la plupart attachés à une reconnaissance de leur histoire et de leur identité, attendaient ce signe comme un acte fort. Mais de l’autre, une partie de l’opinion publique française, de plus en plus sensible aux débats sur la neutralité républicaine, aurait pu percevoir ce geste comme une concession excessive dans une période électorale sensible. Emmanuel Macron, malgré sa volonté de reprendre le dialogue avec les Algériens de France, semble donc avoir reculé devant le risque politique immédiat.
En vérité, la visite aurait permis à Macron d’envoyer un signal direct à la fois aux Algériens établis en France, à l’Algérie elle-même et à l’électorat français. Mais le contexte actuel est explosif. Les relations diplomatiques entre la France et l’Algérie sont depuis plusieurs mois traversées par des incompréhensions profondes, exacerbées par des déclarations maladroites de Retailleau, ainsi que par les sujets épineux liés à la mémoire coloniale. Les Algériens de France, souvent pris en étau entre deux récits, attendent de l’Élysée une reconnaissance claire, loin des symboles vite effacés.
Ce revirement de Macron, aussi brutal qu’inattendu, risque de laisser un vide. Beaucoup s’interrogent désormais sur la cohérence de sa stratégie vis-à-vis des Algériens vivant en France. Car en annulant cette visite, Macron prend le risque de donner le sentiment d’un recul, voire d’un renoncement face aux crispations politiques. Ce qui devait être un geste d’ouverture pourrait se transformer en un malentendu de plus dans la longue histoire complexe entre la France et l’Algérie.
L’agenda présidentiel à venir ne prévoit pas, pour l’instant, de nouveau rendez-vous symbolique avec la communauté musulmane ni avec les représentants officiels des Algériens de France. Pourtant, Macron sait combien la gestion de ces équilibres est cruciale, surtout à l’approche de nouvelles échéances électorales. La pression monte, et il faudra bien que le président trouve un autre moyen de réaffirmer sa position. Car entre la France, les Algériens, et la volonté de Macron de maintenir un dialogue équilibré, les occasions manquées peuvent avoir un prix politique élevé.
Ce retrait, silencieux mais observé de près, laisse entendre que l’Élysée marche désormais sur une ligne étroite. L’avenir dira si Macron saura reconquérir la confiance des Algériens de France, tout en maintenant l’autorité attendue par une frange de plus en plus exigeante de l’opinion nationale.