L’attente touche à sa fin pour les voyageurs algériens en quête de clarté sur l’allocation touristique. Après des mois de spéculations et d’incertitudes, la Banque d’Algérie s’apprête à publier une instruction définissant les modalités d’octroi de ce « droit de change pour voyage », communément appelée allocation touristique. Une annonce qui ne manque pas de susciter l’intérêt, tant la question des devises pour les déplacements à l’étranger constitue un sujet sensible dans le pays.
Face à la multitude d’informations circulant sur l’allocation touristique, appelée « Droit de change pour voyage », la Banque d’Algérie annonce la publication imminente d’une instruction précisant les conditions d’octroi. Selon des sources au sein de la BA citées par le média El Moudjahid, « une fois cette instruction publiée, les citoyens connaîtront précisément les démarches à suivre pour en bénéficier ».
Dans un contexte où le marché informel des devises règne en maître, l’intervention des autorités financières vise à instaurer un cadre plus structuré et accessible aux citoyens. Les nouvelles directives devraient permettre une mise en œuvre plus fluide de cette allocation, fixée à 750 euros pour les adultes et 300 euros pour les mineurs. Cette augmentation substantielle tranche radicalement avec l’ancien montant de 100 euros, jugé largement insuffisant face aux réalités du voyage international.
L’un des axes majeurs de cette réforme repose sur l’ouverture de bureaux de change dans les aéroports, une initiative portée par la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires d’Alger (SGSIA). Ces structures, situées au Terminal Ouest et dans le Hall 2 du Terminal 1, auront pour mission de faciliter l’accès à l’allocation touristique dans un cadre sécurisé et réglementé. Cette mesure vise non seulement à fluidifier l’obtention des devises mais aussi à assécher le marché informel, qui prospère sur les restrictions imposées au change officiel.
Mokhtar Saïd Mediouni, P-dg de la SGSIA, confirme que les préparatifs sont bien avancés pour l’ouverture de ces bureaux. « Nos services sont prêts pour l’ouverture des bureaux de change dédiés à l’allocation touristique », déclare-t-il. Il précise qu’« un premier bureau de change est spécifiquement dédié aux pèlerins de la Omra, tandis qu’un second prendra en charge les voyageurs des autres destinations internationales ». Cette segmentation vise à améliorer la gestion des flux et à garantir une meilleure répartition des ressources allouées.
Loin d’être anodine, la révision de l’allocation touristique s’inscrit dans une volonté plus large du gouvernement de réformer le système financier. L’objectif est double : offrir aux citoyens un accès facilité aux devises et renforcer le contrôle des sorties de capitaux. Cette initiative répond également à une nécessité économique, comme le souligne Chabane Assad, expert financier et fondateur du cabinet Finabi Conseil. Selon lui, la décision d’augmenter l’allocation touristique est « optimale, car elle portera un coup de massue au marché informel des devises, source de blanchiment, d’évasion fiscale et de spéculation ».
L’une des grandes questions soulevées par cette réforme est le financement de cette allocation. En 2023, les transferts formels de la diaspora algérienne ont atteint 1,868 milliard de dollars, un montant qui pourrait être en partie redirigé vers ce dispositif. Assad insiste sur l’importance de ne pas intégrer ces flux aux réserves de change, mais plutôt de les affecter directement à la couverture de cette demande : « Les flux transférés par le circuit formel par la diaspora ne doivent pas alimenter les réserves de change. Ils doivent être affectés à la satisfaction de cette demande. »
Par ailleurs, le renforcement du rôle des bureaux de change agréés permettra de capter les devises détenues par les non-résidents et d’accroître l’offre sur le marché officiel. « L’informel doit être combattu en criminalisant les transactions sur ce marché. Les bureaux de change agréés auront comme tâche de récolter les flux physiques (espèces en devises) de la diaspora et des non-résidents. La partie restante de la demande sera financée par ce mécanisme », explique Assad.
Toutefois, la réussite de cette réforme ne dépend pas uniquement de l’allocation en elle-même. Elle repose également sur une lutte active contre le marché informel, où les transactions se font souvent à des taux bien plus élevés que ceux pratiqués par les institutions officielles. La criminalisation des échanges illégaux, combinée à l’instauration d’un réseau structuré de bureaux de change, constitue l’un des leviers clés pour rétablir l’équilibre du marché des devises en Algérie.
Cette refonte du système de change touristique marque une avancée significative dans la gestion des flux monétaires et la modernisation du secteur financier. Reste à voir si la mise en application des nouvelles directives se fera de manière efficace et transparente, afin de garantir aux voyageurs un accès simplifié et sécurisé aux devises nécessaires à leurs déplacements internationaux.
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